Le transfert horizontal ou latéral de gènes entre différentes espèces –à la différence du transfert vertical, des parents à leur descendance- est déjà documenté comme la clé de l’évolution des bactéries, en particulier vers la résistance aux antibiotiques. Ces scientifiques de l’Université d’Oxford se sont investis dans la modélisation de ce qu’ils nomment » sexe bactérien » (bacterial sex ou horizontal gene transfer) et cherchent à mieux comprendre ce processus de l’évolution microbienne. Ils mettent en exergue ici un facteur clé, jusque-là peu évoqué, la capacité de migration des bactéries. Une vie sociale qui permet, chez les bactéries aussi, une forme de sexualité.
Les biologistes de l’Université d’Oxford montrent ici que ces » échanges » latéraux entre communautés bactériennes augmentent considérablement les probabilités, pour les espèces en cause, d’échanger de petits » bouts » de matériel génétique afin d’être mieux à même d’évoluer, de s’adapter et finalement desurvivre à de nouveaux environnements; dont l’exposition aux antibiotiques.
Les bactéries pratiquent aussi une sorte de sexualité qui consiste en une injection de gènes, un événement très rare, précisent les auteurs, une cellule parmi des millions pouvant ainsi modifier son ADN. Ce mécanisme de transfert horizontal permet la propagation de gènes de résistance, notamment aux antibiotiques ou aux antiseptiques.
Si ce mécanisme est extrêmement rare, la migration bactérienne, en revanche, est un processus très courant chez les bactéries. C’est ce processus, nous révèle cette étude, qui ouvre une fenêtre d’opportunité suffisante pour les » rencontres » et les échanges d’ADN bactérien.
Ici, les chercheurs d’Oxford ont développé des scenarii de communautés microbiennes dans lesquelles toutes les cellules sont en concurrence pour la même ressource. Ils ont ensuite regardé à la fois le taux de transfert horizontal de gènes et l’impact que ce transfert pouvait avoir sur la génomique de la communauté. C’est ainsi qu’ils identifient l’importance de ce facteur peu évoqué de transferts horizontaux: la migration. Et lorsqu’ils optimisent ce facteur dans leurs modèles, les taux de transfert horizontaux augmentent, en particulier pour des traits de sélection naturelle positifs (ou de survie).
Cette migration des communautés bactériennes peut avoir lieu n’importe où, au sein de l’hôte ou à l’extérieur. Ainsi, le » trait » de résistance aux antibiotiques peut se passer horizontalement de microbe à microbe, mais peut également se nicher au sein d’une toxine ou sur d’un nutriment.
Bref, c’est bien la migration des bactéries qui favorise la propagation de la résistance aux antibiotiques entre les différentes espèces de bactéries. Et les chercheurs proposent ici un modèle théorique qui permet de mieux comprendre ces processus de propagation.
Source: Nature Communications 23 November 2015 doi:10.1038/ncomms9924 Migration and horizontal gene transfer divide microbial genomes into multiple niches
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