La mare aux étrons
Publié le 09 juin 2008 par Chondre
Il faut surtout éviter de s’énerver quand tout va de travers. On a forcement été marabouté ou été l’innocente victime d’un méchant prêtre vaudou. Il faut rester zen, passif, d’un calme olympien et attendre que les choses redeviennent normales, un point c’est tout. Je crois avoir vécu la pire semaine de l’année. Un véritable condensé de merdes (sans jeu de mot).
Tout à commencé à
Chicago. Je ressemblais à blanche neige au pays des nains. J’étais heureux car je venais de passer une semaine délicieuse. Je chantais dans la rue et mes amis les lapins, nains de la mine, écureuils et autres biches m’accompagnaient jusqu’à la bouche du métro, à l’orée de la foret magique. J’étais chargé car je rentrais en France. Tout d’un coup, de gros nuages firent leur apparition. La vilaine sorcière de l’ouest déclencha une grosse tempête. Plic, ploc. J’ai vite été trempé. Ploc. Je n’avais plus qu’une centaine de mètres à parcourir avant de m’engouffrer dans le métro. Le feu est passé au vert. J’ai attendu que les voitures passent. Un automobiliste a accéléré, s’est approché du trottoir bordé de flaques et m’a éclaboussé de la tête aux pieds. Ploc ploc. Mon sac en papier contenant ipod, chocolats, bouquins et portefeuille a naturellement cédé, me forçant à tout récupérer dans le caniveau. J’avais la haine et je commençais à avoir un peu froid.
Je suis enfin arrivé à l’aéroport. J’étais toujours trempé. Mon jean avait déteint sur mon caleçon, mon polo était dégueulasse et mes chaussettes s’étaient transformées en deux immondes serpillières. J’ai rapidement embarqué. Je me suis shooté comme les trois quarts de l’avion et me suis réveillé quelques minutes avant l’atterrissage. J’ai allumé mon téléphone et consulté mes messages. Snooze m’informait qu’il y avait eu un problème et que nous avions inondé la salle de bains de nos voisins du dessous. J’étais vraiment contrarié mais je ne pensais qu’à une seule chose: prendre une douche bien chaude et me changer. Je suis vite arrivé à la maison. L’eau était coupée car la fuite n’était pas réparée. Une seule option s’offrait à moi pour pouvoir rapidement prendre une douche: changer le maudit joint responsable de la fuite. J’ai serré bien fort les fesses, démonté le vilain robinet et séparé la cuvette de l’arrivée d’eau. Bob le bricoleur avait pris possession de mon corps et j’étais fier comme Artaban d’avoir colmaté seul comme un grand la fuite. J’étais le maître du monde.
La réparation m’a également permis de profiter des cabinets. J’ai malheureusement eu la bonne surprise, après avoir tiré la chasse, que le fruit de mon intense métabolisme se déversait joyeusement dans la baignoire. Le tuyau d’évacuation des eaux usées était bouché. Chiottes, évier et baignoire communiquaient allègrement. Blop. Des litres de merde verdâtre remontaient et tout l’appartement sentait la marée basse. J’ai soudain eu envie de pleurer quand le tuyau d’arrivée d’eau a commencé à fuir de nouveau et que je me suis aperçu que la cuvette des toilettes n’était plus étanche. La baignoire a fini par se vider au bout d’une dizaine d’heures, me permettant de me soulager à nouveau et de la re-remplir instantanément. Des litres d’un liquide marron qui pique les yeux un peu biohasard dégorgeaient de partout, et ni soude, ni tuyau déboucheur magique ne permettaient d’écouler les eaux usées. Moi qui adorais prendre des bains avec mes canards en plastique, je me retrouvais avec une baignoire remplie d’un liquide marron à 37° maculée de jolis étrons flottants.
Dans ce genre de cas, il est fort peu probable de trouver un plombier en urgence. Le syndic de notre immeuble, peu motivé, m’a proposé un créneau pour aujourd’hui (c’est à dire cinq jours plus tard). Les ouvriers qui officiaient dans l’appartement du dessous sont montés et m’ont balancé que notre système d’évacuation était merdique (ah ah, humour) et qu’ils n’avaient rien à voir dans nos malheurs. Je me suis enfin prostiputé pour trouver un gentil plombier qui m’a tout d’abord affirmé qu’il ne pouvait rien faire car il fallait faire sauter la colonne d’évacuation extérieure. Il a ensuite tenté le tout pour le tout avec un instrument de l’espace. Le bouchon a fini par sauter libérant un gros pchouit magistral. J’ai hésité à sauter sur mon plombier et à lui rouler un patin. Il ne me restait plus qu’à stériliser l’ensemble de l’appartement au gel anti-bactérien et à la Javel.
Juste le temps de me connecter sur ma boîte e-mail professionnelle et me rendre compte que Nadine était encore en arrêt pour d’obscures raisons depuis mon départ et que l’on m’avait refilé assez de boulot pour me priver de vacances jusqu’à 2015 et me faire claquer d’un arrêt cardiaque par excès de stress.
Au moins, chez Bonum, les chiottes ne sont pas bouchées.
C’est un peu ça le bonheur.