Le sigle de la paix, selon Jean Julien : http://www.jeanjullien.com/
En janvier, je croyais qu'on avait touché le fond de l'intolérance. La violence pour empêcher les gens de s'exprimer, d'être libre.En novembre, je découvre que certains exterminent juste ceux qui s'amusent et sont heureux. Parce qu'ils ne supportent pas qu'en France, nous sommes un pays où les gens sont ÉGAUX en droit. Hommes, femmes. Sans distinction de couleur, d'orientation sexuelle... et bien évidement, ÉGAUX en droits avec l'état de DROIT et DÉMOCRATIQUE qui prévaut sur la religion.
Atterrée. Groggy. Très fatiguée après une courte nuit à cauchemarder.Ce matin, non, ça ne va pas bien.
Réveil craintif
Le réveil est difficile. Les réveils ont d’ailleurs été nombreux, violents. Un nuit de cauchemar, à ouvrir les yeux en panique, dans ma maison, enfin, mon appart, au cœur du 9ème. Tendre la main et vérifier qu'à côté de moi, La Moustache coince la bulle. En sécurité.
Mes yeux restent ouverts, les images du dernier rêve persistent.Une rue déserte avec une ambiance lourde. La peur au ventre. Je suis drapée dans le droit de me taire. Je cherche Franck. Je me suis réveillée sans qu'il soit à mes côtés, je suis sortie le chercher. C'est dangereux, je ne devrais pas être dehors. Il y a les tunnels, les escalators d'un métro étrange, une image déformée de la réalité ; une zone de passage entre deux mondes, celui juste dangereux et l'autre, pire, où on risque sa vie. Parce qu'ici, rien n'est sûr. Et là, par terre, je trouve ses chaussons, comme le matin quand je me lève et qu'il est parti tôt travailler. Il y a aussi ses lunettes de soleil, celle de pilote qu'il a depuis plus de 20 ans et son téléphone portable.Je ne peux pas le joindre. Pourquoi est-il sorti ? S'il ne rentre pas ? S’il ne rentrait plus jamais ?
Un cauchemar. Juste un cauchemar.Un cauchemar de plus dans cette courte nuit.J'ai de la chance, pour moi, ce n'est qu'un cauchemar...
Le vendredi 13 novembre : la journée de la gentillesse
Hier, c'était la journée de la gentillesse.Hier, la soirée était bien entamé avec des amis chers, partager un repas, boire une (plusieurs) bonnes bouteilles, rire, échanger sur des conneries et des sujet très sérieux.Et puis, le coup de téléphone de la petit sœur de La Moustache, pour savoir si tout allait bien. L’insouciance du diner qui s'envole par la fenêtre avec la vie d'anonymes. L'incompréhension. Le choc.
Ils sont 120 ce matin qui ne rentreront pas chez eux. 120 à avoir gagné un aller simple pour le cimetière juste par qu'ils s'amusaient, par qu'ils passaient pas là, par ce qu’ils vivaient ici, à Paris.Ils sont plus de 200 blessés, à se battre pour survivre, simplement pour avoir croisé le chemin d'autres humains qui ne pensent pas comme eux.
Liberté, égalité, fraternité. Une devise qui déplait à ceux qui ne conçoivent leur existence qu'en imposant aux autres leur mode de vie, leur croyance, leur foi. Merveilleux cette certitude qu'une entité supérieur leur arrogerait le droit de massacrer leur prochain et qu'il le font pour ELLE, qu'ils ne sont pas responsables...
C'est quoi votre définition du bonheur ?
Dans mon rêve, alors que je paniquais, une jeune femme vient m'interroger :- C'est quoi votre définition du bonheur ?Dans ma douleur, sa question me semble soutenable ; je la rabroue. Je l'entends se plaindre de ma réaction et, prenant sur moi, je retourne lui expliquer:- Le bonheur, c'est d'être entouré de gens que j'aime, de les savoir heureux, c'est de savoir qu'autour de moins les gens sont heureux, même ceux que je ne connais pas. Savoir que c'est possible.Il y a des écrans TV qui égrainent les noms des disparus. Je lui dis alors que j'aimerai avoir assez de compassion pour voir les terroristes comme des humains qui souffrent.Mais je n'y arrive pas.
Parce que ce déchainement de violence est trop. Trop. Comme si cela amputait ma capacité à aimer, à espérer. A m'amuser.
Hier soir, je me sentais si mal que je ne pouvais plus lire, que je me suis forcée à éteindre mon téléphone mobile pour stopper le flot d'information.Ce matin, je me sens encore plus mal.
Les attentats de janvier m'ont bouleversée et mis dans une colère noire. Ces abrutis touchaient à la liberté de la presse, la liberté d'expression la plus brute et la plus inaliénable : les mots et l'image. Je pouvais conceptualiser. Je pouvais analyser. Détacher les motivations politiques. J'arrivais à ne pas être noyée dans une douleur où la soif de violence peu à peu s'invite. J'arrivais à prendre du recul (si si je vous jure, malgré la teneur de mes article, j'ai modéré mes propos).
Dix mois plus tard, tout remonte, tout est pire.Je crois que si on demandait à un terroriste « quel est votre définition du bonheur », il flinguerait simplement l'interlocuteur pour ne surtout pas se poser la question. Ne pas réfléchir. Appliquer aveuglément une soi-disant loi divine extraite d'un recueil de texte parcellaire tout juste bon, à mon avis, à se torcher le popotin.
Ne priez surtout pas pour Paris ! Ca suffit avec ces conneries de religion !
Dessin de Joann Sfar https://instagram.com/joannsfar/
L’insouciance à abattre
Là, je suis groggy. Fatiguée.Et j'en ai marre. Marre de CES PUTAINS D'HISTOIRES DE DIEUX, de religions, de types qui pensent que les femmes sont une merde sous leur semelle. Marre de l'intolérance, marre des discours racistes qui ne vont pas manquer de flamber. Marre du FN. Marre des harceleurs en tout genre.
J'aime ma ville.J'aime mon pays.Et par défaut, pour moi, la journée de la gentillesse, c'est TOUS les jours. Même si je suis introvertie. Même si parfois je suis sauvage et je ne comprends rien à mes frères humains. Même si je suis une grenouille râleuse et qu'il m'arrive de blesser d'autres humains par mes propos, mes intentions sont toujours de propager le bonheur, que ce soit égoïstement pour ma pomme ou pour les autres.
Je n'aime pas les Dieux.Je n'aime pas les religionsJe voudrais vraiment qu'on me foute la paix avec.
Alors, s'il vous plait, comme l'a dit Joann Sfar, ne priez pas pour Paris.Nous voulons juste AIMER la vie. En profiter, boire, manger, écouter de la zic, danser, apprécier des films, des BD, des œuvres d'art qui nous font vibrer. Nous engueuler pour de faux et débattre de tout.Nous aimons marcher dans les rues de notre ville, vieille, séculaire, avec des ossements sous les pavés, des étoiles invisibles accrochées dans le ciel orange. Des millions de touristes casse-pieds qui viennent découvrir les merveilles qu'on ignore à force de les croiser tous les matins, dans le pâté.Nous râlons, nous chouinons et nous rigolons aussi beaucoup. Chacun, dans nos pénates, d'un côté ou de l'autre du périph, avec plus ou moins de potes, plus ou moins de thunes, plus ou moins d'espoir. Nous vivons LIBRES et nous nous AMUSONS.
Que reste-t-il de la vie quand il est temps de tirer sa révérence si ce n'est une collection d'instants éphémères, colorés et hétéroclites. Autant qu'ils soient les plus épanouissants et les plus enrichissants possible non ? Si vous avez besoin de croire en un Dieu, aux pokemons, aux p’tits hommes verts, ou aux licornes, ça vous regarde. Si cela vous rend heureux, tant mieux. Mais ne l’imposez pas aux autres.
S'il vous plait, ne priez pas pour Paris.Envoyez vos plus belles pensées aux victimes, à leur famille.Juste de l'amour.Inconditionnel.
Cet article a été écrit sous le coup de l'émotion. Il est probablement truffé de fautes, pas très cohérent et pas construit. Mais ça me fait mal. Il fallait que ça sorte. Merci de m'avoir lu.Copyright : Marianne Ciaudo