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Grâce à cet article de Pascale Robert-Diard, nous pouvons donc accéder aux attendus de ce jugement qui, plus que la peine, sont particulièrement édifiants pour étayer son jugement personnel. Ils sont également porteurs d’une sagesse et d’un souci de l’intérêt commun qu’on aimerait à retrouver chez nos politiques, qui se sont si terriblement écartés des voies de la morale ordinaire, entachée par toute une série de comportements du même ordre, quels que soient les partis :
Claude Guéant, a donc, selon le tribunal, « dans une volonté assumée d’enrichissement de lui-même et de ses plus proches collaborateurs, volontairement transgressé les lois de la République et détourné des fonds publics, évalués à 210 000 euros. Ces faits commis au sommet de la hiérarchie du cabinet ministériel, par un éminent représentant du pouvoir exécutif dont les fonctions exigent une probité irréprochable, portent une atteinte d’une extrême gravité à l’ordre public dont le ministère de l’intérieur a précisément pour mission de faire assurer le respect. Ils constituent en outre une atteinte aux valeurs de la démocratie républicaine et à la transparence de la vie publique, participant de la défiance que les citoyens peuvent nourrir à l’égard de la politique, des institutions et de ceux qui les gouvernent. »
Il se trouve que ce sont ces mêmes personnages de l’Etat qui exhortent les français à se serrer la ceinture, à accepter de plus en plus d’impôts et de taxes diverses, à travailler de plus âgés, et à subir l’austérité imposée par des règles européennes qui étranglent tellement des pans entiers de notre fonction publique.. Alors qu’ on voit cette dernière – belle injonction paradoxale ! – tant décriée… Il est clair que de tels comportements, qui relèvent pour le coup du dédoublement de personnalité, n’engagent pas en effet à une franche confiance et aux chèques en blanc des catégories les plus modestes envers nos politiques de tous bords… Et si Sarkozy, dont Guéant était le plus proche collaborateur, l’homme de confiance, avait une réelle préoccupation dénuée d’intérêts personnels de l’avenir de son pays, et s’il savait se montrer aussi responsable qu’il le dit, avec les épaules qu’il prétend avoir, il en tirerait les conséquences et retirerait immédiatement sa candidature, dans une attitude bien plus noble qu’il ne le peut et ne le devrait hélas, de respect de la démocratie, de la fonction présidentielle, et de la vie de son parti . Car tout le monde le sait en France, hormis cette caste droitière, affairiste et sans scrupules qui, comme Balkany et Ceccaldi Renaud, ont des intérêts personnels dans son accession au trône, à la fonction présidentielle : ce jugement n’est pas seulement celui d’un homme, mais d’un système. Les juges qui ont instruit cette affaire le savent bien, qui ont voulu marquer de leur esprit les attendus de ce procès sous cette forme si didactique… Mais seront-ils, et peuvent-ils être entendus par des classes politiques énarchisées, aux intérêts si proches voire confondus dans ceux de l’oligarchie industrielle et financière de notre vieux pays, si terriblement détachées des réalités qui s’imposent à nous, simples mortels… Car nous, avons pris l’habitude, contraints et forcés, d’être quotidiennement, régulièrement, plus étroitement fliqués, contrôlés, et condamnés à la moindre incartade… Nos politiques sont ils en capacité de comprendre cela, de prendre la pleine mesure de ce phénomène que Guéant incarne si symboliquement ? L’avenir le dira. Mais en cela, en ce contexte, en cet exemple, il est clairement démontré que ce système dit démocratique, prétendûment républicain (un mot qui n’a jamais été aussi galvaudé et traîné dans la boue) est arrivé à son terme, son dernier souffle, et à sa perte. Il est vraiment tant d’en changer, de faire le ménage, et d’inventer un nouveau mode de gouvernance. J’ai cru un temps en l’idée rassembleuse de 6ème république, qui en effet s’imposerait. Mais on voit bien que les intérêts supérieurs, politiques, financiers et personnels, dans notre pays, ne sont pas prêts à abandonner leurs prérogatives et leurs avantages. Et la démarche de la 6ème république est bien trop complexe, idéale, intellectuelle, et difficilement accessible sans une longue période de maturation et de réflexion à laquelle notre civilisation n’incline pas vraiment. Cette idée de l’urgence d’une 6ème république n’est incarnée au mieux que par 5 % de la population, ce qui ne permet pas un rapport de force en notre faveur en celle des plus humbles, des démunis, des gens modestes, des classes non possédantes, des ‘sans dents’, des sans voix. Nous sommes donc arrivés en une période de l’histoire de notre pays à mon sens comparable à celle de 1789 en termes de tensions entre classes sociales, entre communautés, et en termes d’intérêts matériels divergents. Il m’apparait donc évident qu’on ne pourra sortir de l’impasse sociétale dans laquelle nous sommes que par la force, et la violence, n’en déplaise au discours si politiquement correct qui s’en effraie et bannit jusqu’à ce mot, alors qu’il accepte si aisément que des vies entières soient balayées d’un revers de manche de chemise blanche… Cette évidente injustice sociale énorme, justice de classe, il faudra bien qu’elle se paie, d’une manière ou d’une autre. Entendons nous bien : je ne fais pas là l’apologie de la violence, que je redoute tout autant qu’un autre. Il s ‘agit simplement d’un effort d’analyse globale, sur le registre sociétal. je dis simplement qu’à défaut d’être souhaitable, elle est manifestement, objectivement, fortement prévisible… Et que nos gouvernants ne font vraiment rien, ni dans leurs pratiques, ni dans leurs programmes, ni dans leurs projets devenus si pauvrement et trop exclusivement économiques, pour ne pas souffler sur la braise de ce feu dormant qui couve dans l’ombre, et ne demande plus que de simples accidents pour se transformer en incendies… Remember 2005. Dans les classes les plus modestes, personne n’acceptera que Zyed et Bounia ou Rémy Fraisse soient morts pour rien.