Pour sa cinquième édition, le Pitchfork Music Festival a une nouvelle fois posé ses valises à Paris, dans la Grande Halle de la Villette. Et une fois de plus, l’artillerie organisationnelle était bien lourde : 3 jours de festoch, 26 concerts, des pass 3 jours sold-out et 80% de festivaliers étrangers… Avec une programmation foisonnante regroupant les têtes d’affiches de la « musique underground qui a du succès aujourd’hui » naviguant entre indiepop, rock psyché, rap et musiques électroniques. On y était grâce à nos amis de Greenroom et on debrief sur fond de beaux gifs, vidéos et bande sons.
Jeudi 29 octobre
Pitchfork Festival 2015
Mobile
Préparation
Kirin J Callinan
Foule du premier jour
Destroyer
Ariel Pink
Godspeed You ! Black Emperor
Deerhunter
Klin d’oeil market
Beach House
Après s’être fait fouiller en règle par une vigile qui pensait que chaque festivalière souhaitait introduire 2 kilos de cocaïne dans son soutif sur le site, nous arrivions enfin à pénétrer dans ce temple de la musique de bon goût et des styles vestimentaires aléatoires.
Nous avons entamé notre festival avec le très étrange Kirin J. Callinan. Entre son col roulé, son marcel, son mulet et le fait qu’il nous ait fait écouter des trucs chelous sur son iPhone, nous étions un peu perplexes. Son set fut bruyant, très kitsch et totalement décalé. Cela nous a laissé un peu confus. Heureusement le flegme et la classe de Destroyer nous ont remis sur la bonne voie. La nonchalance du chanteur drapé de son grand trench beige était appuyée par des cuivres élégants et des orchestrations généreuses. La classe du crooner mais avec plus de retenue.
Après cette entrée en matière abracadabrantesque, nous étions super contents de pouvoir voir Ariel Pink, qui jouait sur la Green Stage ce jeudi soir. L’homme, natif de Los Angeles, promettait un show extravagant. Ses chansons sont en effet un mélange d’un tas d’influences différentes : de David Bowie à New Order en passant par Elvis, on y retrouve tout ce qui se rapproche de près ou de loin à de la pop des années 50 à 80. La déception fut donc d’autant plus grande lorsqu’on s’est rendu compte que les balances avaient dû être faites par un ingénieur du son stagiaire pas assez rémunéré et/ou sourd. C’est bien simple, sur les 3 premières chansons, nous n’avons absolument pas entendu la voix d’Ariel Pink (par contre le duo basse-batterie, ça va…) et même si cela s’est légèrement amélioré au fur et à mesure du concert, cela n’a absolument pas suffit à nous faire rester une minute de plus. Même les plus grands fans présents ce soir-là se sont accordés à dire qu’ils étaient juste dégoutés d’avoir vu ça. Pour nous faire passer l’impression de s’être fait entuber, nous sommes donc allés nous chercher une pinte à 7€. Oh wait…
Nous avons ensuite enchainé sur Godspeed You ! Black Emperor. Le groupe de psyché a une mise en scène assez particulière mais qui colle bien à l’esprit de la formation : en cercle, les guitaristes assis, plongé dans le noir, tout est fait pour que le public se concentre au maximum sur la musique qu’ils ont à proposer. Et lorsqu’on se laisse porter par leurs chansons (de 20 min et sans paroles, faut être préparé psychologiquement quand même), cela fonctionne assez bien. On n’a plus qu’à fermer les yeux et à se laisser porter par le son du violon, des guitares et des deux batteries, quitte à rentrer dans une sorte de transe d’où il est difficile de sortir.
A peine le temps de manger dans un des nombreux food-trucks présents (chers MAIS de qualitay !) qu’on filait voir Deerhunter. Pour ceux qui étaient venus là voir du bon rock qui décoiffe, ils ont pu être servis ! Le groupe a assuré le show, fait grincer ses guitares, envoyé de la fumée et des lumières rouges dans tous les sens. On a même pu voir des pogos aux premiers rangs, alors que le public était jusque-là plutôt victime du syndrome parisien dit « Des bras croisés » (vous savez, ce symptôme où le summum de l’amusement prend la forme d’un hochement de tête). Bref, ça s’amusait, ça se chamaillait et ça passait du bon temps !
Dernière tête d’affiche de la journée, Beach House était attendu par une foule compacte. On se demandait bien ce que le duo allait jouer puisqu’ils ont sorti deux albums quasiment coup sur coup. Ils ont entamé leur set avec le titre d’ouverture de « Depression Cherry » puis ils ont joué, pour notre plus grand plaisir, une sélection variée de leur discographie. Tout ça sur fond étoilé et lumières tamisées ou aveuglantes sur lesquelles se découpaient les silhouettes du groupe. De l’incontournable « 10 Mile Stereo » au rare « Saltwater », la dream pop aiguisée de Beach House a fait mouche.
Vendredi 30 octobre
Pitchfork festival
Foule du deuxième jour
Kurt Vile & The Violators
Le pote Guigui du Mellotron et ses pinesco
La balançoire
Battles
Thom Yorke
Thom Yorke is on fire
Run the Jewels
Après avoir distraitement écouté Dornik et Rome Future, qui ouvraient le deuxième jour, nous étions bien en place pour HEALTH à 18h40. Oui, sept heures moins vingt, encore une frasque programmationnelle dont Pitchfork a le secret et qui chaque année nous étonne. C’est un groupe que l’on a plutôt l’habitude de voir tard dans la nuit et passablement éméché mais ça ne nous a pas empêché de prendre une grande gifle bien noisy dans la tronche. Un rock psyché, aux accents électro tapageur, complètement fou nous a embarqué et on a été hypnotisé par le sex appeal de John, le bassiste aux cheveux de princesse.
Les balades pop toute douces de Rhye nous ont ensuite permis de reprendre nos esprits. Sans être transcendant, le set du Danois était fort agréable et joliment fort. Mention spéciale au violoniste à la carrure d’ours viking qui sautait partout et qui créait un peu d’animation sur scène. On est parti un peu avant la fin pour se placer devant la Pink Stage en attendant Kurt Vile and the Violators.
Kurt a débarqué avec ses cheveux longs, son t-shirt de baseball et sa drôle de dégaine nonchalante qui nous rappelle un peu l’autre Kurt. Guitariste hors-pair, il nous a trimballé dans son univers folk rock avec une aisance déconcertante tantôt électrique, tantôt acoustique, tantôt banjo. La langueur de son chant et la qualité de ses textes et de ses compositions font de lui un des nouveaux grands song writers. Accompagné par les Violators, il a livré un set à la hauteur de sa réputation, la classe.
Pas beaucoup de répit, les concerts s’enchainèrent et on ne voulait rien manquer. On s’est faufilé dans la foule pour aller voir Battles. Le trio de dads du rock expérimental new-yorkais nous a étonné. C’était un choix audacieux de programmer un groupe instrumental en plein milieu de festival. Car pour Battles, depuis le départ de Tyondai Braxton, c’est la musique dans laquelle ils se jettent à corps perdu qui compte. Et les mecs nous ont balancé des morceaux à l’architecture impeccable, d’une intensité singulière. Le batteur avait positionné sa cymbale si haut, qu’il lui fallait presque bondir pour la frapper. Une performance physique et musicale renforcée par le plaisir évident qu’ont pris les musiciens.
À peine le temps d’aller remplir son verre que la foule se pressait déjà devant les cinq écrans installés pour le set de Thom Yorke. Il est venu avec son projet solo, Tomorrow’s Modern Boxes, et son fidèle compagnon Nigel Godrich. Entre projections psychédéliques, pas de danse épileptiques et envolées vocales lyriques, Thom Yorke a fait du Thom Yorke. Et c’était très bien. On espérait un peu de Radiohead, comme ça, pour le plaisir, mais non. On a eu le droit à deux titres d’Atoms for Peace et on était bien content d’être venu. Nous sommes restés encore un peu pour voir Four Tet qui a enflammé la Grand Halle en ce vendredi soir. Entre onirisme planant et tubes dansants, c’était le rendez-vous du kiff.
Samedi 31 octobre
Foule du troisième jour
Spiritualized
Super Mario
Viens, c’est Halloween !
Wouhou c’est la grosse teuf
Le fameux « hochement de tête Parisien »
Nous étions en place dès l’ouverture des portes, pour être sûr de ne rien rater (et de tout pouvoir vous raconter).
La journée a donc commencé avec Hinds, un groupe de rock garage espagnol composé de 4 (jeunes) filles. Si les compositions sont plutôt correctes et les nanas bonnes musiciennes, il faudrait que quelqu’un dise à Barbie-fait-du-rock qu’elle n’est pas obligé de minauder puis de froncer les sourcils puis de crier « braaaaa » dans son micro pour faire rock’n’roll. On n‘arrivait pas à savoir si elle se foutait de notre gueule en mode « mimi cute », si elle avait juste rien compris ou si en fait elle était un peu niaise, mais ses minauderies ont un peu gâché l’ensemble.
Venait ensuite le tour de Curtis Harding. Arrivé sur scène maquillé pour Halloween, le chanteur vint pour nous livrer un set assez calme, empreint de soul, de gospel et (d’un peu) de rock. Un peu comme si Bobby Womack était revenu en 2015 nous livrer de nouvelles chansons, mais en ayant intégré au passage dans ses morceaux toute la musique créée depuis 1970. Le micro filaire lui donnait la bonne voix qui va bien sur les chansons les plus souls. Le courant est bien passé avec le public et le set de 30min paraissait finalement bien court.
Soirée de l’éclectisme encore une fois pour le Pitchfork puisqu’on a enchainé avec Nao. Pop, R’n’B et électro, la chanteuse a très bien réussi à réunir ces 3 genres pourtant assez différents au premier abord. Nao était naturelle, semblait vraiment contente d’être là et c’était donc logiquement que la salle a commencé à se chauffer sérieusement ! Elle nous a fait penser à Aluna George et nous a bien fait danser.
L’arrivée de Father John Misty a quant à elle divisé. Son style de dandy qui en rajoute des tonnes fascinait à la fois les admirateurs et les haters. Josh Tillman, ancien batteur des Fleet Foxes, se la jouait un peu prêcheur folk : il était clairement sur scène pour faire passer son message de paix et est rentré dans une sorte de transe qu’on a trouvé assez authentique. Cela se doublait d’un potentiel de drama queen second degré et très ironique. La synthèse du concert ? L’enfer sur terre pour les uns, incroyable set pour les autres. Peut-être la preuve d’un show réussi finalement.
Mauvais point pour la Team Limo pour Unknown Mortal Orchestra, qui était prévu juste après. Plutôt friand des albums du groupe, mais peu convaincu par leurs prestations live, nous avons préféré aller manger pendant le concert. Shame ! Shame ! (Mais ce burger-mexicain…. Mmmmm un délice !).
La dernière frite enfilée, on a couru rejoindre la salle pour aller applaudir Run The Jewels. Les Papas du rap américains n’ont absolument déçu personne ! Tout le monde était réuni pour reprendre en chœur les punchlines du groupe, lever les mains en l’air et sauter partout ! Ils ont enchainé les tubes de leurs 2 albums : « Run the Jewels », « Oh my darling don’t cry », « Pew Pew Pew »… Chaque titre était efficace et explosait comme de petites bombes hip-hop dans la Grande Halle et ça faisait du bien !
Les légendes du rock indé britannique, Spiritualized ont ensuite pris possession de la scène. Leur rock psychédélico-shoegazo-garage a envahi tout l’espace de l’ancien abattoir en même temps que des flots lumineux verts et jaunes. Les deux guitaristes, face à face, n’ont pas quitté les côtés de la scène comme pour mettre leur musique en avant. Place donc aux riffs accrocheurs et saccadés, aux pédales d’effet grinçantes ou tout en rondeur et aux orchestrations titanesques. Double dose de légendes donc. Bang bang !
Le dernier groupe à être programmé (avant la soirée électro sous l’égide de la Red Bull Music Academy) était Ratatat ! Un monde fou avait rejoint la scène bien avant le début du concert afin de pouvoir être sûr de profiter du spectacle que le groupe ne manquerait pas de nous fournir ! Et ce qu’on peut dire, c’est qu’ils ont été à la hauteur ! On a atteint là un haut niveau dans la scénographie : des lasers dans tout les sens, des projections 3D, de la fumée, des lumières… La claque était tout aussi visuelle que sonore ! Parce que bien entendu le groupe a assuré niveau son. Aller voir Ratatat en électro, c’est un peu comme aller voir David Gilmour en rock, tu te demandes pas si les mecs vont assurer sur scène, tu le sais déjà. Le son inimitable du duo New-Yorkais a donc réussi encore une fois à imposer son style dès la première note et à enflammer la salle à partir de la 2eme. « Pricks of Brightness », « Loud Pipes » et « Cream on Chrome » ont introduit ce set endiablé. On a enchainé avec un maximum de tubes, et ils nous ont réservé « Shempi » pour le rappel, comme ultime cadeau ! Vraiment un des meilleurs concerts programmés lors de cette édition. On vous laisse avec le live !
Ce concert a fini de nous achever, et certains d’entre nous ne sont donc pas restés pour la suite, même si ils auraient bien vu Laurent Garnier. Les autres ne se souviennent pas de grand chose sinon que le set de Hudson Mohawke, le B2B John Talabot – Roman Flügel puis le set de Laurent Garnier n’ont laissé aucun répit aux danseurs plus ou moins éméchés. On se rappelle quand même que c’était super bien.
Pour conclure, on peut dire que le si Pitchfork est un festival assez bien ficelé, où quelques groupes valent bien-sûr le coup d’être vus, l’ensemble reste tout de même assez inégal et sans vrai prise de risque artistique. On peut se demander si le festival ne reste pas sur la crédibilité que lui confère son nom. Avoir été un blog musical vraiment novateur, de qualité et dénicheur de nombreux talents ne suffit peut-être pas, ou plus. On attend en tout cas avec impatience la programmation de l’année prochaine afin que les organisateurs nous donnent tort.
Peace !
La team Limo
GIFs: Rubens Ben
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Clémence DL
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