MALADIE du SOMMEIL: Combiner géographie et génomique pour éradiquer tsé-tsé – CIRAD et PNAS

Publié le 10 novembre 2015 par Santelog @santelog

En Afrique subsaharienne, les mouches tsé-tsé (ou glossines) propagent des maladies parasitaires, les trypanosomoses, qui menacent la santé humaine, au-delà de l’agriculture. Les campagnes d’éradication constituent des outils essentiels de lutte contre les trypanosomoses humaines ou animales. Malheureusement, elles restent très coûteuses et peu efficaces. Ici, en couplant analyses génétiques et analyses d’images satellites, les chercheurs du Cirad et leurs partenaires français, africains et européens ont développé une méthodologie novatrice permettant d’améliorer l’efficacité des campagnes d’éradication de mouches tsé-tsé et la sécurisation de long terme des régions nettoyées.

La trypanosomiase africaine ou maladie du sommeil est liée à la piqûre de glossine ou mouche tsé-tsé et à l’introduction du parasite Trypanosoma brucei gambiense (Afrique de l’Ouest) ou Trypanosoma brucei rhodesiense (Afrique de l’Est) dans l’organisme. La maladie du sommeil est endémique en Afrique subsaharienne et son incidence est estimée à 7.000 cas par an. La maladie peut être mortelle chez l’Homme. Elle affecte aussi les animaux, et tue chaque année plus de 3 millions de têtes de bétail.

Or les populations de mouches tsé-tsé isolées, à éradiquer, sont difficiles à repérer. Les campagnes d’éradication sont très coûteuses et peu efficaces, ne parvenant à éliminer les mouches tsé-tsé que dans 2% des zones infectées.

La nouvelle méthodologie développée par l’équipe du CIRAD, dirigée par Jérémy Bouyer, permet de les débusquer à l’échelle du continent : elle utilise à la fois la génomique et le concept de  » friction de paysage « , emprunté aux géographes, qui définit en biologie la façon dont les éléments du paysage influencent le déplacement des espèces animales :

   Les scientifiques ont dans un premier temps déterminé la distance génétique séparant 37 populations de l’espèce Glossina palpalis gambiensis, le principal vecteur de trypanosomoses, via l’analyse du génome de 1.158 mouches capturées dans 4 pays d’Afrique de l’Ouest.

   ils ont, en parallèle, identifié les barrières naturelles susceptibles d’influencer les chemins de dispersion les plus probables.

   leurs travaux aboutissent à une  » carte de friction  » révélant les connections entre 8 populations de tsé-tsé identifiées, présentant divers degrés d’isolement, soit autant de cibles potentielles pour les campagnes d’éradication.

Cette approche novatrice, résultat de huit ans de travaux, pourra être appliquée au ciblage d’autres vecteurs de maladies, ainsi qu’à la conservation des espèces menacées. L’approche a d’ailleurs attiré l’attention des responsables d’Earth Engine, la plate-forme d’analyse de données de télédétection de la société Google.

Source: PNAS doi: 10.1073/pnas.1516778112Mapping landscape friction to locate isolated tsetse populations candidate for eliminationet Communiqué du CIRAD- Lionel Cavicchioli

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