Peux-tu te présenter en quelques lignes ?
Akir Ovitch, 35 ans de Paris, graffeur et calligrapheur autodidacte…
Premier contact avec le graff en 1995/96 : j’avais 15 ans, avec les P.19 crew (JB et LOOP) qui venaient plus ou moins du même quartier que moi et qui présentaient des ateliers d’initiation à Juvisy et Athis-Mons (91). J’ai passé pas mal de temps à les observer avant qu’ils me tendent une bombe de peinture et que je me lance. Ça été vraiment le premier contact. Après quoi, j’ai essayé d’appliquer les conseils de base qui me suivent encore aujourd’hui : quand on me demande des conseils, je balance la formule magique (rires)…
Est-ce que cela t’a donné envie de faire la même chose ?
Ah ouais carrément ! Un mur c’est comme une feuille blanche à souiller, n’importe quel gamin (je pense) prendrait plaisir à le gribouiller. Pour moi, cela a vraiment été une révélation, je suis dans le graff un intérimaire qui s’est accordé de longues pauses mais au contact d’un stylo je cherche toujours à gratter quelques formes… C’est à mon sens ça la vraie passion du lettrage, pas forcément actif dans la rue mais en perpétuel recherche de création. j’ai toujours des millions de choses en tête, alors quand j’ai un espace d’expression ça permet en quelque sorte de rendre visible mes idées. Il y a une ambiance et un feeling pas facile à décrire, c’est un kiff tout simplement, du coup c’est tout ça qui m’a poussé à être créateur à mon tour.
Les première pièces (ou première croutes) : autour de chez moi, derrière le gymnase ou derrière la bibliothèque où nous squattions à l’adolescence (j’en profite pour m’excuser auprès des préposés au nettoyage). Souvent avec TYRZE qui posait un autre blaze au début… bref, avec les mecs de mon quartier principalement (KROE et BOZE) et d’autres qui suivaient le mouv’ sans pour autant être graffeurs, juste pour le plaisir de faire des conneries je pense.
C’est assez difficile à dire, obligé (un bien grand mot)… Pas vraiment mais ça a clairement aidé à forger un style, des dynamiques, une patte quoi !
Je dirais donc pas obligatoire mais utile : je vois pas mal de graffeurs qui, comme moi, se sentent à l’étroit dans le graffiti qui malheureusement ne dispose que d’un outil : la bombe. Alors je me suis orienté vers la calligraphie qui offre plus d’outils pour aboutir au calligraffiti. Notre pays ne nous facilite pas la tâche : graff égal vandalisme ! Il fait l’amalgame avec trop de choses, le graffiti souffre toujours d’une sale image du coup avec la calligraphie on arrive à s’extraire de cette image même si dans le fond pour moi c’est exactement la même chose. On se colle une étiquette plus politiquement correct c’est tout, au final c’est toujours une question de lettrages !
Que penses-tu des street-artistes d’un jour ?
Au risque de passer pour une vielle carne râleuse, je vais quand même être franc, les artistes d’un jour nous polluent clairement, ils sont la cause de l’amalgame dont je parlais il y a un instant, donc prise de position clair : c’est pas à mon goût !
Pour autant, je ne critique pas la nouvelle génération qui regorge de pépites, il y a toujours des idées nouvelles : c’est en constante évolution surtout avec les outils spécialisés mis à dispotion aujourd’hui… Mais là je m’éloigne du sujet…
Peux-tu nous raconter ton histoire à partir du moment où tu as commencé ?
Mon histoire… Graffeur peu assidu je l’avoue, de 1995 à 1997 dans mon quartier principalement avec ma petite équipe sans grande prétention, juste pour se faire plaisir. Puis en 2001 à Montpellier, là aussi pas super actif surtout après une pause de 4 ans mais il y a eu de bon moment avec WER et Stef, des mecs rencontrés dans le sud, l’un était de Grenoble et l’autre de Nice. Retour à Paris en 2002/03 : c’est là que j’ai eu ma période la plus active avec EPOK, OBER et SOLO (AC /AOC) sur les voies, les autoroutes, les trains, les métros ; tout y est passé ! C’était une époque encore un peu cool pour peindre. En 2004, je deviens papa du coup le graff repasse au second plan jusqu’en 2012 mais toujours à gratter sur papier, jamais fait de pause sur papier de 1995/96 à ce jour… Quelques performances à l’étranger (Rio de Janeiro) en 2012 avec les mecs du santa crew, là aussi assiduité zéro et quelques flops en Thaïlande à Koh Phangan en 2014 avec un autre expatrié (DYKAL) que j’ai rencontré sur l’île.
Pour résumer, je dirais que c’est souvent le même schéma, je trouve toujours où que je sois un acolyte pour créer l’émulsion, échanger les techniques et les influences… Bref, graffiti worldwide !
As-tu exposé en galerie ?
Oui dans la galerie graffArt aux puces à Saint-Ouen en 2011 sur un thème assez rigolo vu que c’était en partenariat avec Paris love shop… Je me suis retrouvé à exposer des petites « teubs » en one line dans l’esprit flop : c’était assez inattendu même pour moi mais bon c’était une première expérience et on a joué le jeux… ça a permis de rencontrer quelques membres des 3DT et de se faire une première expérience.
J’étais pas forcément à la recherche de galeries et d’expos à l’époque donc j’ai pas vraiment creusé. Après ça, j’ai exposé récemment à Paris dans un bar : c’était du calligraffiti sur vinyles, bonne expérience aussi. Du coup, je me concentre plus là dessus maintenant : je vais présenter au Miami art basel pour une éventuel expo l’année prochaine (je croise les doigts) et en janvier/février à Chiang Mai (Thaïlande) dans un prestigieux hôtel 5 étoiles (Anantara Resort and spa). À suivre….
Est-ce que tu vis de ton art ?
Vivre non, survivre à la rigueur, mais j’ai trop mis mon côté artiste au second plan. Aujourd’hui, je suis prêt à aller au bout des choses et je ferais tout pour que ça fonctionne (rires)…