Une nouvelle chroniqueuse chez moi? Bon, elle n'est pas si nouvelle que cela, et puis il faut dire qu' elle officie aussi ici et ailleurs sur la blogosphère...mais comme elle préfère rester dans l'anonymat, laissons lui le choix et laissons lui aussi parler de l'artiste peintre Vigée le Brun à l'honneur à Paris depuis la rentrée et que pas mal de publications et de DVD mettent en avant, comme cette chroniqueuse masquée a tenu à nous le dire :
D’Elisabeth Vigée le Brun, je ne connaissais rien il y a encore quelques semaines. Son nom me disait-il même quelque chose ? J’ai commencé par voir passer des tableaux de l’exposition qui lui est consacrée actuellement au Grand Palais via les réseaux sociaux.
L’exposition, proposée au Grand Palais du 23 septembre au 11 janvier, est la première rétrospective française à lui être consacrée, et elle présente près de 130 oeuvres de l’artiste, construisant un parcours complet à travers un oeuvre pictural majeur et une grande page de l’histoire de l’Europe.
Élisabeth Louise Vigée Le Brun est l’une des grandes portraitistes de son temps, à l’égal de Quentin de La Tour ou Jean-Baptiste Greuze. Issue de la petite bourgeoisie, elle va trouver sa place au milieu des grands du royaume, et notamment auprès du roi et de sa famille. Elle devient ainsi le peintre officiel de la reine Marie-Antoinette.
Cela m’a donné envie d’en savoir plus à son sujet alors quand j’ai eu sous les yeux le DVD le fabuleux destin d’ Elisabeth Vigée le Brun proposé par Arte Editions, qui retraçe sous forme de docu fiction et sa vie et son parcours sous forme de documentaire fiction, je n'ai pu m'empêcher de sauter sur l’occasion.
« Tu seras peintre, mon enfant, ou jamais il n’en sera », c’est ce qu’on peut appeler de bien beaux mots d’encouragement prononcés par son père lui-même pastelliste alors qu’Elisabeth est très jeune.
Pour mieux comprendre le futur succès d’Elisabeth Vigée le Brun, il faut préciser qu’à l’époque tout le monde veut son portrait, car c'est bien l'unique façon de garder une trace.
Après avoir été au couvent de 6 à 11 ans, Elisabeth Vigée est obligée de travailler pour aider sa mère. Son premier portrait remarquable représente son frère Etienne en écolier et sa mère. E. Vigée se créé très vite, une clientèle de nobles. Elle demande à ceux qui posent pour elle de regarder au loin, éloignant ainsi la concupiscence des hommes et inventant un personnage pré-romantique.
Au 18ème siècle, la distraction incontournable est la promenade et c’est au cours d’une d’entre elles, qu’elle croise la Duchesse de Chartres qui la présente ensuite à la reine Marie Antoinette.
Elisabeth Vigée intègre l’Académie de St Luc (corporation professionnelle) et épouse Pierre le Brun, marchand et collectionneur dont l’appartement est un véritable musée (qui regorge de modèles pour Elisabeth).
Elle voyage en Flandres puis s’inspire par la suite de Rubens pour faire des portraits sur bois. D’un portrait à l’autre, elle reprend la même tenue et les mêmes accessoires, signant ainsi ses œuvres.
Elle créée un atelier/école pour transmettre sa technique et apprendre aux jeunes filles la peinture. Ses tarifs en tant que portraitiste sont alors parmi les plus élevés de son temps (fixés par son mari qui connait le marché de l’art). Elle construit ses propres réseaux du fait de son talent mais aussi parce qu’elle est à la fois belle, intelligente, cultivée et ambitieuse.
En 1778, elle accède à Versailles alors que Marie Antoinette est systématiquement déçue par les portraits que l’on fait d’elle. Elisabeth Vigée le Brun adoucit de portrait en portrait les défauts physiques de la reine et en fait une femme d’une très grande beauté qui ne ressemble plus à la réalité. Elle a la capacité de s’adapter à la personnalité de ses modèles et sait mettre en valeur leurs atouts. La grâce et l’empathie se traduisent dans ses peintures.
Après intervention de la reine dont elle est devenue le peintre officiel, elle est admise ainsi que 3 autres femmes à l’Académie de Peinture. A l’époque, son autoportrait du chapeau de paille est considéré comme un de ses chefs d’œuvre. Sa proximité avec la reine met à mal sa réputation car on l’assimile à la frivolité de cette dernière.
Son portrait de la tendresse maternelle (elle a une fille Julie surnommée Brunette) est unanimement applaudi au Salon.
Elle invente une mode simple et pratique pour peindre à l’atelier et bientôt les parisiennes voudront l’imiter. Elle accompagne également un mouvement de retour à la mode antique et fait beaucoup parler d’elle lors d’une soirée où le Comte de Vautreuil (amant potentiel) est invité.
Début octobre 1789, la foule envahit Versailles et Elisabeth Vigée le Brun, fidèle à la famille royale jusqu’à la fin de sa vie, est contrainte à l’exil. Déguisée en ouvrière, elle s’embarque pour un périple qui la mène d’abord à Lyon puis à Chambéry avant de rejoindre Rome, Bologne, Florence. A Naples, elle est la portraitiste de Lady Hamilton (Emma). Elle reste ensuite 3 ans à Vienne, 7 ans à St Pétersbourg.
Après 13 ans d’exil, elle rentre à Paris et réalise combien la société à changé. Elle repart à Londres. En 1807, elle séjourne à plusieurs reprises chez Mme de Staël en Suisse. En 1819, elle perd sa fille de la syphylis. Elle-même s’éteint en 1842, non sans avoir écrit ses mémoires auparavant.
Le Larousse qui lui est consacré revient également sur les grands événements de sa vie, sur son talent à peindre les sentiments dont l’amour maternel et sur ses chefs d’œuvre comme Naïdes, la reine Marie-Antoinette à la rose, Lady Hamilton en bacchante.
Après cette mise en bouche consistante, j’avais encore plus envie d’aller voir en vrai les tableaux réunis dans l’exposition consacrée à cette peintre. J’ai alors feuilleté le livre intitulé L’expo qui regroupe 150 œuvres et leurs cartels, les panneaux pédagogiques …une façon de prolonger la visite ou dans mon cas de la vivre par procuration.
A travers ses quelques autoportraits, j’ai eu une image d’elle plus proche de la réalité probablement que celle renvoyée par l’actrice jouant son rôle dans le DVD Le fabuleux destin de Vigée Le Brun proposé par Arte Editions. J’ai aussi fait « connaissance » avec les membres de sa famille. L’Expo met également en avant le fait que les femmes peintes par Vigée le Brun dans les années 1780 dégagent une grande sensualité voire un certain érotisme.
On la suit dans son exil au fil des portraits des comtesses, princesses et autres nobles des pays où elle s’installe. Enfin chose peut-être moins connue, dans la dernière période de sa vie, l’artiste se livre à un genre nouveau, le paysage en plein air (elle aurait peint plus de 200 pastels).
Et enfin, pour ceux qui veulent avoir un condensé de la vie de l’artiste dans un livre au format plus facile à transporter, Les éditions Gallimard en partenariat avec RMN Grand Palais ont édité également un petit livre de 48 pages sous le contrôle de Geneviève Haroche Bouzignac, professeur à l’université d’Orléans et spécialiste du XVVIII siècle qui offre un premier aperçu dense et interessant de l’œuvre de cette immense artiste qui mérite inconstablement tous ces honneurs.
Bref, largement de quoi devenir incollable désormais sur cette grande peintre de nos têtes courronnées!!