Combien de premières parties a-t-on ratées, intentionnellement ou non, en allant à un concert ? Parce qu’on était en retard. Parce qu’on avait écouté un titre distraitement en se disant que ce n’était pas transcendant. Ou parce qu’on attendait notre pinte au bar. Cette fois-ci, on a inversé la vapeur. Oui, on a acheté notre billet essentiellement pour aller voir la première partie. Non pas qu’Editors ne nous intéressaient pas mais parce qu’ils étaient accompagnés des excellents The Twilight Sad pour leur tournée européenne qui faisait escale au Trianon la semaine dernière.
On avait découvert ce groupe écossais au Pop-Up du Label. Leur rock torturé porté par la voix claire et puissante de James, le chanteur, nous avait fasciné. Leur album Nobody Wants To Be Here And Nobody Wants To Leave tourne depuis en boucle sur nos platines. La date au Trianon marquait d’ailleurs le premier anniversaire de ce très beau disque.
Nous étions donc bien à l’heure pour voir entrer en scène le quintet à l’accent chantant de Glasgow. La présence scénique et l’intensité de leur (trop) court set ont d’emblée séduit les fans d’Editors déjà pressés aux premiers rangs. Le chanteur semblait se battre contre ses démons à chaque morceau, vivant viscéralement sa musique. Et c’est toujours très impressionnant à voir. Yeux révulsés, cris déchirants et danse macabre, tout en sincérité, il nous a encore une fois stupéfait.
Côté setlist, le groupe a démarré avec le titre d’ouverture du dernier album « There’s a Girl in the Corner ». La batterie pesante et le riff entêtant se nappèrent de synthé inquiétant avant de laisser se déployer la voix de James pour finir dans un tumulte désordonné de cris et de gestes rageurs. Tiré du même album vint ensuite le titre « Last January ». Le break et la montée en puissance jusqu’à la fin du morceau nous firent franchir un palier de plus sur l’échelle de l’intensité. James glissa alors quelques mots pour remercier le public sur un ton si mignon que ça nous a presque surpris après sa transe musicale.
Puis il a annoncé la chanson suivante : « I Became a Prostitute », extrait de leur album Forget the Night Ahead sorti en 2009. Le répit fut bref. Le rugissement des guitares et le tonnerre des percussions reprirent de plus belle. Le chanteur a oscillé entre le parlé et toute l’amplitude vocale dont il est capable. Retour au dernier album avec « It Never Was the Same » et son synthétiseur lancinant. On s’est époumoné sur le refrain presque choral « So we dance to save them all / we try to save them all / you didn’t have to kill them all » et les « We’ve fallen / we fall apart ». Un peu de l’étrange transe du chanteur nous gagnait.
L’orgue aigrelet de « Nil » a résonné. Ce morceau est tiré de l’album No One Can Ever Know (2012). Le flot des paroles nous enivrait puis les envolés lyriques nous collèrent la chaire de poule. Le groupe fit un bond jusqu’à leur premier album pour nous livrer « Cold Days From the Birdhouse ». Après les tourmentés « Where are your manners ? », le public a grondé et soulevé une vague d’applaudissement. Le charme de la tristesse crépusculaire semblait faire effet. Tant mieux.
Malheureusement, c’était déjà l’heure de se dire au revoir sur « And She Would Darken the Memory ». Encore un moment de magie et d’exorcisme, d’épanchement et d’émotion, de saccades et d’exhortations puis l’ovation et les remerciements.
Avec ces sept morceaux, The Twilight Sad ont offert au Trianon, alors plein de fans d’Editors, un panorama intense et exaltant de leur discographie. On en aurait bien repris encore pour une heure, mais c’est la dure loi de la première partie.
Pour se remettre de nos émotions, on est donc allé boire une bière et on a vu beaucoup de monde au stand de merchandising se procurer les disques de Twilight Sad. Nous n’étions visiblement pas les seuls à prendre une grande claque. Espérons que ça permette aux Écossais de revenir dans l’Hexagone pour une tournée en tête d’affiche cette fois !
Retour dans la salle pour un concert d’Editors en dents de scie. Il faut dire qu’on s’était un peu désintéressé de leur cas après leur deuxième album sorti en 2007. Les nouvelles compositions, aux productions parfois électro-niaiseuses, ne mettent pas vraiment en valeur la voix si singulière du chanteur. On est donc parti après « Munich », juste avant le rappel, pour éviter la foule et la déception aussi. Le monde à l’envers.
Mathilde
Chroniqueuse et petites mains des partenariats.Pop, folk, rock et indies, le tout arrosé d'un Basile Boli bien frais.
Mon Cocktail Préféré : Champomy d'abord ! Puis une bonne bière en bonne compagnie.
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