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Internet et le couple: de la rencontre à la non-rencontre

Publié le 02 novembre 2015 par Podcastjournal @Podcast_Journal
Rédacteurs et stagiaires: cliquez sur cette barre pour vous connecter en back-office de la rédaction! Cette tendance est confirmée par une récente enquête IFOP pour cam4.fr dévoilée le 26 septembre dernier. Réalisée auprès d’un échantillon représentatif de 2001 personnes résidant en France métropolitaine, par questionnaire auto-administré en ligne du 16 au 18 septembre 2015, elle confirme que l’optimisation et la rationalisation de la sexualité vont crescendo. En d’autres termes, les sites de rencontre en ligne et particulièrement les applications géolocalisées contribuent à une sexualisation rapide des relations. L’enquête montre également un taux relatif de frustration suite à ces expériences sexuelles chez les femmes. L’adage américain jamais le premier soir n’est pas transposable à la France puisque 55% des hommes et 34 % des femmes ont déjà "couché" lors de la première rencontre alors que 69% des hommes et 47% des femmes ont déjà eu un rapport sexuel lors d’un premier rapport amoureux.

Les modes de rencontre favorisant le sexe dès la première rencontre sont les sites ou application de rencontre (26%), devant les soirées entre amis à égalité avec les sorties en discothèque tous deux à 13%.
Le taux de satisfaction lors du premier rapport est différent en fonction du sexe: les hommes sont globalement satisfaits affichant 75% de satisfaction lors d’une rencontre via internet pour 78% de satisfaction lors d’une rencontre dans "la vraie vie". Les femmes de leur côté affichent un taux de satisfaction de 55% avec une personne rencontrée via internet pour 70% avec une personne rencontrée dans "la vraie vie".
Le pourcentage de personnes préférant dormir avec une personne rencontrée sur un site après un rapport sexuel est de 71% des hommes et 56% des femmes.

Après tous ces chiffres, il est possible de se demander ce que pensent certains utilisateurs de site ou d’application de rencontre. Philippe (les identités ont été modifiées) est un vieux routard. Les sites de rencontre sont ses amis. Malgré une vie bien rangée, il apprécie de mener sa barque vers de nouveaux horizons. Pour lui, un site est un facilitateur de rencontre et les applications de véritables catalyseurs. Sa quête est plus sexuelle que sentimentale, "sa vie de couple: c’est autre chose". Mais Philippe est à l’ancienne, il apprécie la conquête, le doute et les émotions qui s’entremêlent. "Une sexualité mécanique ne m’intéresse pas, je cloisonne mais je veux des sensations". Philippe a 47 ans, il s’est structuré à l’ère pré-numérique. Son plaisir et son excitation sont variés.

Marc a 23 ans, c’est un jeune célibataire décidé à profiter. Il a "son petit succès", soirées entre amis, clubs sont autant d’occasion de rencontrer. Habitant une métropole, il s’est inscrit sur une application de rencontre par jeu, il y est resté par facilité explique-t-il. "Avec les applications de rencontre, c’est simple et codifié. On sait pourquoi on est là. Un verre un repas, moins parfois, pas besoin d’y passer des heures. J’y vais quand je veux un coup vite fait, après on ne sait jamais. Une fois j’ai discuté avec une fille, on s’est revu. Ce n’est pas allé très loin. Au moins, l’appli ça n’engage pas".

Valérie a 35 ans, elle utilise certains sites ou des applications de rencontre lorsqu’elle veut une relation sexuelle sans lendemain. "Mon travail est prenant. J’ai des périodes de célibat et des envies. Parfois je vais sur un site, une appli. Mon but c’est juste de passer un moment, un soir agréable. Si on discute un peu avant que le courant passe, le rapport est plus satisfaisant. Il faut un peu de feeling". Il existe des différences dans les taux de rapports déclarés le premier soir entre homme (55%) et femmes (34%). Plusieurs facteurs explicatifs peuvent entrer en jeu tels qu'un biais lié à la désirabilité sociale poussant les hommes à surévaluer leur "performance", et les femmes à sous coter un acte qui peut les discréditer au plan social. Cette tendance est limitée par l’anonymat et diminue dans la génération des moins de 25 ans.

On relève une moindre satisfaction féminine lors de rapports sexuels inauguraux après une rencontre via le web chez les femmes. Il est vraisemblable que la limitation des rapports verbaux par ce mode ne facilite pas l’instauration d’un climat de confiance facilitant une sexualité épanouie chez la femme. De manière plus pragmatique, les canaux d’excitation masculins sont préférentiellement visuels chez l’homme (films, écrits) alors que les femmes seront plus excitables par la voie auditive et réactives à certains timbres de voix.

Il est plus fréquent, selon l’étude, que les hommes s’endorment ou souhaitent s'endormir auprès de leur partenaire sexuelle (que l'inverse). Ce résultat s'explique de manière biologique puisque les hommes à contrario des femmes sont programmés pour s'endormir après l’orgasme. Deux zones cérébrales, le cortex cingulaire et l'amygdale, sont à l'origine de ce phénomène par une libération de neurotransmetteurs (sérotonine et opioïdes). Cet élément récemment mis en lumière par des chercheurs de l'Inserm (équipe du Dr Stoléru) coïncide avec la période réfractaire masculine décrite dès 1966 par les sexologues Masters et Johnson dans le livre "Human Sexual Response".

Au-delà des données et statistiques, on constate une évacuation de la problématique sexuelle par le passage à l’acte et une attitude consumériste plutôt que d’affronter les angoisses liées à l’attente et aux questionnements liés à une véritable rencontre. On relève également un sursaut individualiste, avec un refus de l’engagement et de la prise en compte de l’autre. Le sexe est alors vécu comme pulsionnel et la finalité devient la réponse à divers besoins par une consommation immédiate et éphémère. La rencontre humaine, elle, attendra à demain…

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