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Le livre des Baltimore, roman de Joël Dicker

Par Mpbernet

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Voici le troisième roman d’un jeune auteur d’à peine trente ans, après le fulgurant succès de son second livre paru en 2012, « La Vérité sur Harry Quebert ». Joël Dicker met en scène, une nouvelle fois son double, Marcus Goldman, auréolé de son premier succès littéraire. Le roman s’écrit à la première personne, et nous le voyons se construire devant nous, entre les pages que nous lisons, avidement, évidemment.

Car la technique est imparable, même si le style est parfois empreint de maladresses, selon une construction parfaitement ordonnée. Faite d’allers et retours temporels, dans des lieux bien décrits, ceux que fréquente la classe bourgeoise aisée de la côte Est, du Connecticut à la Floride, en passant par le New-Jersey et les Hamptons, Nashville et Madison. Autant de « places to be », sauf le New-Jersey, et là est le problème !

Marcus entreprend d’écrire la saga de sa famille, avec ses bonheurs et ses malheurs, peu de temps après le Drame – avec un grand D – qui l’a décimée et dont on ne découvrira l’étendue qu’à la fin du roman. C’est l’histoire des fils et petits-fils de Max Goldman, excellent vendeur devenu entrepreneur rêvant de confier la conduite de son usine de matériel médical à ses deux fils, le père de Markus et son aîné d’une année, l’oncle Saul.

Au moment où le récit commence, la renommée de Saul est immense : c’est un avocat d’affaires très important, il a amassé une immense fortune grâce à des opérations de bourse particulièrement judicieuses, est très amoureux de sa femme, la belle tante Anita, médecin. Ils ont tout : plusieurs résidences plus somptueuses les unes que les autres, de belles voitures. Tout est magnifique chez les Goldman-de-Baltimore. La famille de Marcus, dont le père, ingénieur, est devenu le directeur de l’usine familiale, dispose d’un niveau de vie plus modéré. Ils sont les Goldman-de-Montclair. Chaque année, à Thanksgiving, les grands-parents réunissent les deux branches de la famille et leurs fils, nés pratiquement au même moment, Hillel et Marcus.

Hillel est un enfant surdoué mais chétif, il a le chic pour se mettre à dos ses condisciples et ses professeurs par des remarques aussi pertinentes qu’insupportables. Il se fait régulièrement tabasser par ses copains. L’oncle Saul sort de la rue un jeune garçon bagarreur à l’abandon, et va pratiquement l’adopter pour protéger son fils Hillel. Le gang des Goldman se compose alors des trois gamins : Hillel, Marcus et Woodrow (Woody) Finn, qui joue pleinement son rôle de garde du corps et voue à la famille Goldman une reconnaissance absolue. Sauf qu’apparaît bientôt Alexandra, la grande sœur de leur camarade Scott, atteint de mucoviscidose. Le gang s’agrandit.

Aux uns, il semble que tout réussit, quand les autres regardent passer les trains … ? Pas si évident. L’histoire se corse en effet avec la venue de l’adolescence. La fortune des Goldman-de-Baltimore n’est-elle bâtie que sur du sable ? Après la fraternité, les amours secrètes et les succès sportifs fulgurants viennent la jalousie, la frustration, l’envie, la surenchère puis le renoncement ultime. Le Drame dont l’auteur nous parle à chaque instant sans nous en dévoiler la teneur intervient de façon brutale, c’est une Shoah à l’échelle d’une famille.

Une saga un peu longuette à mon goût, avec nombre de redites, qui évoque les grands films américains comme La splendeur des Amberson d’Orson Welles (1942), avec des héros auxquels arrivent les pires malheurs, avant la rédemption. Toujours : le mythe de l’Amérique conquérante et bien-pensante. Hélas : la crise des subprimes qui met à bas les certitudes de ces jeunes gens si sympathiques, pour lesquels les « arbres monteraient jusqu’au ciel ». Marcus, le narrateur, se fait l’évangéliste de ce testament familial. Les Goldman-de-Baltimore et les Goldman-de-Montclair (New-Jersey), seront à nouveau réunis comme au soir de Tanksgiving, mais dans un cimetière.

Je reste tout de même un peu sur ma faim et aimerai que Joël Dicker nous épate avec une nouvelle histoire vraiment haletante, encore plus surprenante que l’affaire Harry Quebert dont je n’ai pas ici tout à fait retrouvé le souffle.

Le Livre des Baltimore, roman de Joël Dicker publié aux Editions de Fallois, 480 p., 22€.


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