Max | Le Roi de Coeur

Publié le 30 octobre 2015 par Aragon

Sorti dans l'indifférence générale en France, il paraît qu'il n'a eu du succès qu'aux États-Unis ce film. Qu'il y est devenu un "film culte étranger".

Ce merveilleux film de Philippe de Broca qui m'avait bouleversé à sa sortie, fin années soixante : "Le Roi de Coeur".

Je me sens (bien modestement) le double éponyme du soldat Plumpick, Roi de Cœur, héros de ce film.

Je suis entré dans du nouveau au pavillon des A. que je fréquente "assidument" depuis plusieurs mois en visitant mon tonton qui y est pensionnaire définitif.

Pour la première fois je suis passé de l'autre côté du miroir, je m'explique. À chaque visite, je suis, je "fais" le visiteur. cette fois-ci je n'ai pas "fait" le visiteur, je n'ai pas fait le malade non plus, la maladie, celle-là ou d'autres vous tombent dessus assez tôt, sans que l'on demande son compte, ça suffit bien comme ça. Je n'aurais pas non plus l'impudence, le grossièreté d'âme de jouer à ce jeu-là. Mais je suis passé de l'autre côté en parlant avec eux, en étant un peu comme eux le temps de ma visite.

Deux heures après je suis revenu dans l'autre monde, "le nôtre", mais pendant le temps de ma visite j'étais comme eux, avec eux. C'est à dire que j'ai tenu des mains, fait des bises, parcouru des promenades dans le seul couloir qui étaient de "vraies" marches dans la nature et que surtout avec trois d'entre eux j'ai parlé comme eux. Je suis allé en Amérique à la nage, j'ai mangé du caviar et de la langouste, j'ai côtoyé des tigres, des chats et des éléphants roses et verts, on était en avion ensemble, j'ai parlé pas mal "yaourt" comme on dit au théâtre, j'ai chanté des chansons de Joë Dassin, d'Aznavour et de Piaf .

Mimi, Fernande, Robert, Lucie, tonton, étaient ravis, enfin, ravis je ne sais pas si c'est le mot, mais ces après-midi qui jusqu'à lors étaient très souvent éprouvantes, douloureuses, par le "non-sens" de la situation, par l'incapacité que je ressentais à communiquer, par cette relation enfuie, morte, et bien tout ça a pris un nouveau sens, une nouvelle folie, un nouveau rêve, une nouvelle réalité. Un nouveau départ.

Comme le soldat Plumpick entrant dans l'asile et réveillant les fous à la vie, à leur vie vraie, je suis entré dans une autre vie, la leur. Vraie ou pas, ça je ne sais pas, mais je m'en fous. J'étais hier le Roi de Coeur de Mimi, Fernande, Robert, Lucie, tonton et ça m'a fait un bien fou et mon esprit s'est ramassé, lui qui croyait qu'il n'y avait qu'une seule réalité, il sait à présent que derrière les hauts murs des asiles, derrière ceux de ces corps aux esprits "partis", derrière ces cervelles "abandonnées", il y a autre chose.

Un autre univers, une autre vie, d'autres esprits et d'autres cervelles, libérés de TOUT et n'ayant plus désormais aucune contraintes spirituelles, matérielles, physiques et sociétales. Libres. Malades, "perdus" pour nous définitivement, mais totalement libres !