Cette nouvelle piste pour empêcher la croissance des cellules cancéreuses, en les affamant, a déjà été poursuivie par plusieurs équipes. Ici, c’est sur des cellules cancéreuses du poumon, que l’équipe de l’Université McGill poursuit la piste, en bloquant l’accès aux nutriments essentiels à leur croissance. Les chercheurs y parviennent après avoir identifié les processus métaboliques utilisés par les cellules cancéreuses. Il s’agit ici de les priver une première fois de glucose, puis d’une enzyme, PEPCK, qui les aide à survivre en situation de disette. Les conclusions, présentées dans la revue Molecular Cell, ouvrent une nouvelle voie de traitement du cancer du poumon, 2è cancer le plus fréquent et responsable de plus du quart du total des décès par cancer.
Les cellules cancéreuses pulmonaires ont une » alimentation préférée « , c’est le sucre et un métabolisme très différent de celui des cellules normales. Leur prolifération rapide nécessite un apport énergétique élevé qui repose donc sur le glucose et un taux d’utilisation 100 fois plus élevé que celui des cellules normales. Mais lorsque le glucose se fait rare, les cellules cancéreuses doivent utiliser d’autres sources de nutrition pour assurer leur croissance et leur survie.
Les chercheurs de McGill, de l’Université Washington, de l’Université ITMO (Saint-Pétersbourg) et de l’Université de Bristol (UK) ont évalué la réponse des cellules cancéreuses en cas de disponibilité réduite du glucose. Ils ont choisi l’un des types de cancer du poumon le plus répandu, le cancer du poumon non à petites cellules (85 à 90% des cancers du poumon). Ils constatent que
· certaines cellules cancéreuses se nourrissent alors de glutamine, un acide aminé,
· reprogramment alors leur métabolisme avec l’aide d’une enzyme, PEPCK,
· certaines cellules cancéreuses vont exprimer cette enzyme PEPCK, pour avoir cette capacité de transformer la glutamine en énergie et en différents nutriments nécessaires à leur croissance.
PEPCK permet aux cellules cancéreuses de survivre et de proliférer en période de famine ! La suite est logique : inhiber l’enzyme PEPCK dans les cellules cancéreuses pourrait ralentir la croissance tumorale. C’est ce que l’équipe montre chez la souris ; elle constate également des niveaux plus élevés de PEPCK dans les tissus de patients atteints de cancer du poumon.
Bref, cette étude montre, pour la première fois, que les cellules cancéreuses peuvent recourir à d’autres sources d’énergie pour alimenter leur croissance en présence de stress. L’étude décrypte aussi ce mécanisme de survie et, ce faisant, suggère PEPCK comme une cible prometteuse pour bloquer la croissance tumorale dans le cancer du poumon non à petites cellules.
Source: Molecular Cell 15 octobre 2015 DOI : 10.1016/j.molcel.2015.08.013Mitochondrial Phosphoenolpyruvate Carboxykinase Regulates Metabolic Adaptation and Enables Glucose-Independent Tumor Growth
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