La rumeur courait cet après-midi. Alber Elbaz aurait fait ses cartons et quitté les bureaux du Faubourg Saint-Honoré. Après le départ de Ralf Simons de chez Dior, personne n'osait croire à un autre bouleversement dans la ronde des créateurs. Pourtant la nouvelle est confirmée dans l'après-midi. Une phrase simple et plate, on ne peut plus claire : Alber Elbaz quitte Lanvin.
Une déclaration officielle tombe plus tard, de la part du groupe détenant Lanvin : une déclaration évasive qui tente de pallier, tant bien que mal ,les bruits qui courent concernant les relations houleuses entre Albert Elbaz , Shaw-Lan Wang ( la propriétaire de la maison Lanvin), et la CEO Michèle Huiban . Désaccords, point de vues divergents, tout le monde attend les mots d'Elbaz et spécule sur les raisons et reconversions possibles pour le créateur. Evidemment , Dior est une hypothèse privilégiée.
A la tête de la maison de couture depuis 2001 , Elbaz avait remonté la marque et lui a insufflé une nouvelle popularité. Un homme discret, un homme de l'ombre, timide et attachant. Il confiait récemment ne pas posséder d'adresse e-mail, et ressentir un malaise face aux utilisations actuelles des nouvelles technologies, qui s'accompagnent d'un culte nouveau de la vitesse dans notre société. Un monde où tout va trop vite, et où les collections doivent s'enchaîner de plus en plus rapidement...Peut être trop pour Elbaz...
La mode reste pour lui une chose sacrée qui doit faire rêver, appeler le fantasme : pas un produit de consommation ou un divertissement. Alors qu'il inaugurait l'exposition Alber Elbaz/Lanvin manifeste, en septembre dernier, il avait fait part de ses inquiétudes et impressions quant au tournant que la mode prenait à l'heure actuelle.
S'imaginant comme " un concierge dans un bel hôtel ", il arrive aux reines de Lanvin alors que la maison s'essouffle. Se laissant guider par ses sensibilités et émotions , il crée des accessoires et des robes devenues cultes et habille les plus grandes actrices (de Natalie Portman à Demi Moore). Il aimait le réconfort ou la confiance que pouvaient procurer ses créations aux femmes. Des vêtements qui ne sont pas de simples beaux assemblages de tissus ; mais des objets animés d'une âme dans une société de moins en moins onirique.
Plutôt que de spéculer sur son successeur chez Lanvin, tout le monde s'inquiète de savoir ou Elbaz va embarquer, ou ce conteur féerique va- t-il désormais exercer sa magie ?