N’ayant pas eu l’opportunité de voir le film en salle, la faute à une absence pure et simple de sortie en Belgique, il était sur mes tablettes depuis son arrivée en vidéo il y a quelques semaines. Et c’est finalement dimanche dernier que je me suis décidé à le visionner. Résultat : une claque monumentale !
Sea Fog est un long-métrage qui navigue entre différents genres sans jamais toutefois perdre sa cohérence. Ainsi, après une première demi-heure convenue aux allures de drame social, le récit bifurque brièvement dans le cinéma d’aventure avant de s’engager dans un huis clos d’une intensité et d’une violence inouïe. Ajoutez à cela une romance atypique et une poésie palpable et vous obtenez une œuvre singulière, aussi puissante que bouleversante. Les transitions s’opèrent sans le moindre accroc et le ton évolue subtilement, passant avec brio du drame à l’horreur, de l’absurde au tragique. Plutôt attachants au départ, les personnages dévoilent progressivement leurs vices les plus cruels, jusqu’à un dernier acte crépusculaire des plus sanglant. Acculés par une situation qui les dépasse, ils s’abandonnent à leurs névroses et leurs obsessions, sans jamais cependant tomber dans le manichéisme primaire. Un véritable tour de force compte tenu des multiples genres exploités et des nombreux seconds rôles proposés.
Au milieu de cette effroyable traversée et de cet âpre brouillard subsiste un rayon de lumière : la rencontre entre Hong-Mae et Dong-Sik. Elle est clandestine à la recherche de son frère disparu. Lui est jeune marin désireux d’aider son prochain. Ensemble, ils vont nouer une relation extrêmement forte et affronter la barbarie d’un équipage poussé dans ses derniers retranchements. Formidablement interprétés par Han Ye-Ri et Park Yu-Chun, le duo offre d’intenses moments d’émotion et de poésie, qui apparaissent comme des respirations salutaires dans l’enchaînement tragique des événements. Face à eux, Yun-Seok Kim délivre également une excellente prestation dans la peau d’un capitaine dont l’ambiguïté n’a d’égale que la fureur. Enfin, comment ne pas évoquer la beauté étourdissante de la photographie qui, à l’image de la superbe affiche, nous gratifie de plans somptueux pendant 2 heures. De la chaleur de la salle des machines au froid brumeux du pont, en passant par la noirceur de la cale, tous les environnements bénéficient d’un rendu à l’écran sensationnel.En définitive, Sung-Bo Shim signe donc avec Sea Fog – Les Clandestins une première réalisation magistrale. D’une beauté terrifiante, le film met en lumière les vices de l’homme et sa bonté dans une virée cauchemardesque aussi brutale que poétique. Puissant !