Patti Smith, la grande chamane du punk new-yorkais, était en concert la semaine dernière à l’Olympia pour célébrer trois soirs durant les 40 ans du mythique album Horses. La salle était pleine à craquer de fans émus, toutes générations confondues et parfois en famille, et c’est dans un grand éclat de joie que Patti et son groupe – chemises blanches et pantalons noirs et la simplicité classieuse et tranquille de qui n’a plus rien à prouver – sont apparus sur scène. Les notes de piano de l’introduction de Gloria retentissent. Il n’en faut pas plus pour lancer le concert. Sa voix puissante s’élève. « Vous m’avez ôté la peur de mourir » lâche-t-elle après avoir lu le texte de la pochette du vinyle qui la présentait au monde alors qu’elle n’avait que 29 ans. Et elle crache par terre. Indomptable.
C’est l’album en entier qui défile avec de nombreux moments de grâce : le Gloria propre à enflammer la salle, Birdland où la voix devient incantation et la guitare se charge d’accents quasi mystiques, Free Money, ode aux voleurs, et Break it up, le récit d’un rêve sur Jim Morrison, repris en chœur par la salle, un endiablé Horses, acmé de l’album et du concert, où l’on voit Patti Smith danser comme dans une transe, puis Elegie, moment de calme et de prières adressées aux disparus dont elle égrène les noms – Jim Morrison, Fred Sonic Smith, Jimi Hendrix, Tom Verlaine, Janis Joplin, Robert Mapplethorpe, Lou Reed, Amy Winehouse… Manière de convoquer sur scène les mannes des amis, amants et héros rock morts trop tôt. Et l’hommage ne s’arrête pas là puisque le groupe reprend un medley de quelques titres du Velvet alors que Patti Smith a quitté la scène.
Elle revient bientôt pour la dernière partie du concert qui se termine sur une tonalité plus politique avec les tubes People have the Power et My Generation, appel enflammé à une prise de conscience salvatrice (pour la planète, contre la guerre…). Finissant par casser une à une les cordes de sa guitare – la dame aux longs cheveux blanchis n’a rien perdu de sa rage – et par lancer à la salle un « You are fucking free ! » plein d’espoir, de révolte et de tendresse.
Caroline Pichon