JAIN on l’a découverte au Bus Palladium, à l’occasion du MaMA Event. Elle nous avait impressionnés. Seule sur scène, dans sa petite robe sage, elle avait enflammé la salle à coup de beat hip-hop et de samples aux sonorités africaines. Nous l’avons rencontrée quelques jours plus tard. Elle nous raconte comment Jeanne est devenue JAIN.
Quand t’es-tu dit pour la première fois : « je veux faire de la musique » ?
C’était après une première partie de Seal, il y a quatre ans. J’avais fait une première partie guitare-voix au Zénith de Rouen et j’étais toute seule sur scène et ça s’était hyper bien passé. J’étais rentrée dans les loges après, et je m’étais dit « waouh je veux refaire ça ! ». J’avais commencé la musique avant mais je faisais encore une prépa en Arts. C’était : si ça marche tant mieux, si ça ne marche pas tant pis. Mais avant ça je ne m’étais pas dit officiellement je veux faire ça comme métier.
Ce n’était donc pas ton premier concert ?
Non, j’avais fait presque tous les bars-concert de Paris, et c’était la fin de la tournée de Seal, donc j’avais déjà fait trois dates dans d’autres Zénith avec lui. Et c’est vraiment le dernier Zénith où j’me suis dis waoua. Avant ça, je me laissais de l’espace pour faire autre chose. Et aujourd’hui, l’art visuel ou le graphisme j’en fais vraiment avec la musique, j’essaie de mélanger les deux parce que c’est vraiment quelque chose qui m’intéresse.
D’où les télés sur scène ?
D’où les télés sur scène, le pupitre, la guitare et les chaussures !
Les premiers morceaux guitare-voix que tu as composés, ce sont ceux que l’on trouve sur l’album ?
Sur l’album, il y a Come que je faisais guitare-voix, il y a So Peaceful aussi, et City mais qui n’est pas sur l’album.
Comment s’est déroulé le passage du guitare-voix à ce que tu fais aujourd’hui ?
C’est parti d’un problème à la base. J’avais commencé les premières parties de la tournée de Yodelice en guitare-voix, comme je le faisais avec Seal, mais au fur et à mesure de la tournée j’étais de plus en plus frustrée. Frustrée de ne pas arriver à ce que je voulais avec le public, de ne pas les faire danser, de ne pas les faire participer. Il y avait une énergie qui me manquait, qu’on ne peut pas avoir guitare-voix. Et on avait un problème logistique avec mon tourneur. C’est que je n’avais pas fait de répét’ avec beaucoup de musiciens. On ne pouvait pas intégrer comme ça des musiciens en plein milieu de la tournée. Le seul moyen que j’avais c’était de m’orchestrer moi-même avec un looper, avec des machines. Donc, à la base, c’est parti d’un problème et finalement j’en ai fait mon jeu scénique.
Quelle est la première critique que tu as reçue, à l’époque où tu postais tes premiers morceaux sur Myspace ?
On m’avait dit que c’était trop le bordel, qu’on ne savait pas trop ce que c’était. Si c’était pop-machin-truc. C’était au Congo, j’avais une sorte de studio que je m’étais fait, donc j’avais déjà mis un peu de rythme derrière. Mais j’avais pris ça comme un compliment (rires). Je n’ai pas changé grand-chose et ça a marché !
Cette année est-ce qu’il y a eu un concert particulièrement marquant ?
Celui qui m’a vraiment marquée cette année, c’était aux Solidays où je suis beaucoup allée en tant que festivalière. Et là, me retrouver sur une grande scène, c’était plein d’émotions. Ça s’était hyper bien passé, donc c’est l’un de mes meilleurs souvenirs de scène cette année.
À quoi est-ce que tu penses lorsque tu montes sur scène ?
Ce qui me déstresse avant de monter sur scène, c’est d’être un peu énervée, je suis un peu comme une boxeuse. Je me dis qu’il faut que le public en prenne plein la tête.
Et en sortant de scène ?
Waaaah ça va mieux !
Ton premier album sort le 6 novembre, combien as-tu mis de temps pour le composer ?
Sept ans. Makeba, je l’ai composé l’année dernière, et Come il y a sept ans. Donc c’est vraiment un projet qui me suit depuis pas mal de temps, c’est vraiment un travail qui a été fait en amont.
Tu y as travaillé pendant sept ans en continu ou tu as eu des moments de creux ?
En composant Come, il y a sept ans je n’étais pas du tout dans l’idée de faire un album. C’était ma première composition. L’album, ça fait quatre ans que j’y pense. J’ai commencé à y réfléchir en entrant dans ma prépa d’Arts, que ce soit au niveau de l’image, de tout, j’ai essayé de faire quelque chose d’homogène.
Comment s’est passé ton premier clip, pour Come ?
En fait, j’avais fait la pochette de mon EP, avec plusieurs bras. Je suis venue avec l’idée de démultiplication, l’idée de plusieurs bras et surtout la volonté que ce soit très très graphique, et qu’il y ait une touche assez moderne. Et après j’ai rencontré Greg & Lio qui sont les réalisateurs. Je leur ai dit que je regardais pas mal de vidéos sur internet de tours de magie, d’optique… Ils ont trouvé plein d’idées, ils ont fait de grandes références à Magritte par exemple, le peintre surréaliste.
Le lien avec l’art c’est ce côté graphique dont tu parlais, mais aussi ta tenue de scène. Tu y as pensé dès le début ?
Non, elle est venue il y a à peu près deux ans. On m’a souvent comparée avec des chanteuses comme Selah Sue, surtout quand j’étais guitare-voix. Et je n’avais pas du tout envie de jouer cette carte-là, de chanteuse reggae-hippie-guitare-voix. Je voulais vraiment prendre le contre-pied et avoir une image graphique et réfléchie. Et du coup j’ai pris un truc qui n’a rien à voir avec ma musique, quelque chose d’assez strict. Et qui représente finalement assez bien l’album, qui est lui-même, par les chansons, assez contrasté. Cette robe, elle fait contrepoint avec l’album, tout en lui ressemblant.
Est-ce que cette robe est aussi une sorte de porte-bonheur ?
Quand je l’enfile, c’est vrai que je me sens plus sûre de moi. C’est un peu ma tenue de boxeuse !
Son premier album, Zanaka, sort le 6 novembre (Sony/Columbia).
Jain est lauréate du FAIR 2016.
http://www.jain-music.com
Propos recueillis par Jeanne Cochin