Comment faire évoluer les habitudes de consommation ? Pour Alain Renaudin, directeur général adjoint de l'Ifop, les entreprises auraient intérêt à parler davantage de leurs actions dans ce domaine et à veiller à la compétitivité de leur offre.
" L’enjeu environnemental est devenu ces dernières années une préoccupation importante et partagée par un très grand nombre de Français et de manière générale de citoyens à travers le monde. La prise de conscience a eu lieu, des comportements citoyens, à l’exemple du tri sélectif, se sont mis en place.
En termes de consommation, et surtout d’habitude d’achat, les changements de comportements sont toutefois plus lents ou plus difficiles, sauf pour les produits fortement énergivores pour lesquels le critère environnemental traduit en économie d’énergie trouve désormais une place importante dans les critères de choix.
Si de plus en plus de publicités mettent en avant des bénéfices environnementaux, il n’en demeure pas moins que les Français savent peu ce que les entreprises mettent en œuvre en matière de développement durable. De nombreuses études Ifop sur le sujet depuis plusieurs années démontrent que la « part de voix » en matière de développement durable est davantage publique que privée.
Quant à la présence à l’esprit des entreprises ou marques sur le sujet, elles est très faible : 71%* des Français, interrogés en mai 2008, répondent par la négative à la question qui consiste à leur demander s’ils ont vu, lu ou en tendu parler récemment d'une marque ou d'une entreprise qui leur a plu en matière de respect de l'environnement.
Quand ils en entendent parler (29%* donc), ils citent spontanément un peu plus Edf (11%*) et Veolia (11%*), et ensuite Areva (4%*), Toyota (4%*), Carrefour (4%*), Leclerc (4%*), ou encore Gaz de France, Renault, etc. Autrement dit, des taux très faibles d’évocations spontanées.
Comparativement à l’ensemble des programmes, actions, R&D mis en œuvre par beaucoup d’entreprises, il faut donc constater que celles-ci sont sous-estimées par l’opinion publique en tant que partie prenant agissante et impliquée sur cette thématique. S’il est à leur honneur de faire preuve de modestie et de discrétion sur ces programmes, et si l’opinion est majoritairement convaincue (74%*) que les entreprises mettront demain au point des produits et services davantage respectueux de l’environnement, il n’en demeure pas moins que ce « silence » est souvent perçu comme de l’inaction par un consommateur qui, lui, a le sentiment de modifier ses comportements et de faire des efforts, notamment en réponse à de fréquents messages incitatifs, moralisateurs et de temps en temps culpabilisants. Si donc « il n’y a pas de petit geste utile lorsque nous sommes 60 millions à les faire », sans doute n’y en a-t-il pas non plus lorsque 2 500 000 entreprises les mettent en œuvre chacune à son niveau !
L’autre enjeu majeur, déterminant de l’essor de la consommation responsable, en ces temps de revendications et de contraintes sur le pouvoir d’achat, c’est tout simplement la compétitivité prix de l’offre. Aujourd’hui la grande majorité des Français (79%*) est convaincue que les produits davantage respectueux de l’environnement sont plus chers que les autres produits et 58%* s’estiment mal informés sur ce qu’il faut prendre en compte pour savoir si un produit est respectueux de l’environnement.
Le bénéfice environnemental est souhaité par les consommateurs, mais la première condition aux modifications massives de comportements d’achat reste l’accessibilité en termes de prix, sans remise en cause des bénéfices antérieurs, dans une logique de « marketing géologique », où le respect de l’environnement est un plus."
Alain Renaudin.
* : Etudes Ifop Planet Care - 2008 - bases nationales représentatives
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