Smart ma ville ? La ville futée au XXIème siècle

Publié le 22 octobre 2015 par Pnordey @latelier

[Tribune] A l’occasion de son intervention au cinéma de Châtillon samedi 24 octobre 2015 « Quelle intelligence pour la ville ? Parlons de la Smart City Humaine », Carlos Moreno revient pour nous sur la ville du futur.

La ville est un lieu d’agrégation des hommes autour d’un territoire où les besoins vitaux, d’épanouissement et de développement se croisent de multiples manières. La ville est complexe, au sens même étymologique du terme, du latin complexus, « entrelacé », car tout est lié dans la ville, hommes, infrastructures, usages et services et encore davantage dans ce XXIème siècle de grandes mutations urbaines. En effet, les individus, comme les multiples systèmes qui composent une ville, n’existent qu’en lien les uns avec les autres. Au niveau de la métropole, cette complexité est encore renforcée du fait du changement d’échelle.

Dans la ville, il existe ainsi une multiplicité des besoins, d’usages, des services, des flux : l’alimentation, l’habitat, l’environnement, l’éducation, la culture, les transports, la santé, la sécurité, la communication etc. Chaque ville évolue dans son propre contexte, à son rythme, qui varie également. D’une ville à une autre les contextes sont différents, de nature culturelle, géopolitique, historique, religieux… et ils façonnent ainsi les nombreuses caractéristiques de la ville et de ses habitants.

Mais la ville se doit d’offrir toute une gamme de services pour mettre en cohérence les habitants et leur environnement pour mieux vivre. Or, la planète a dépassé les 7 milliards d’habitants et, pour la première fois depuis l’histoire de l’humanité, plus de 50% d’entre eux habitent en ville, atteignant en Europe les 77%. En 2030, sur 8,3 milliards d’humains, près de 5 milliards seront des urbains. Des défis jamais rencontrés auparavant se posent ainsi aujourd’hui à l’ensemble de l’humanité, concernant sa survie elle-même. De nouveaux besoins s’imposent et demandent des réponses qui doivent se projeter face à ces environnements changeants, avec une nature menacée qui nous confronte, elle aussi, à des situations inédites.

Une ville est aussi un système vivant, qui se développe dans le temps.

Comme tous les organismes vivants, elle obéit donc à deux tendances, qui sont l’essence même de sa complexité. D’une part, elle cherche à satisfaire les besoins vitaux de ses habitants et leur quête de bien-être et d’autre part, elle est soumise à un certain nombre d’aléas qui la rende fragile : tempêtes, pannes, incendies, attentats, épidémies... La ville doit aussi être aussi résiliente, c’est-à-dire être capable de surmonter ces aléas.

Comprendre la fragilité de la ville, penser la ville comme un lieu de vie hautement sensible, se projeter dans sa fragilité, rendre la ville plus légère, la rendre plus accessible sont des enjeux essentiels pour les années à venir. C’est une ville futée avec la technologie au service de l’homme dont nous avons besoin !

La révolution numérique se caractérise par sa présence au cœur de toutes les activités humaines avec ce phénomène de maillage sans limites que l’on voit s’opérer. Cette transversalité est une source majeure d’opportunités de création de valeur dans tous les secteurs d’activité. Pour aller au bout de cette révolution et des profondes transformations qu’elle implique, il est cependant nécessaire de réinventer le numérique, en le pensant non plus à partir des objets technologiques, mais à partir des usages et services nouveaux qu’ils rendent possibles.

Il faut aujourd’hui changer de paradigme pour donner toute sa force à la notion de design des services.

Une véritable révolution culturelle est donc indispensable, qui placerait la compréhension des systèmes interdépendants par leurs interactions au cœur de notre action, nous permettant ainsi d’inventer et de réinventer, en amont, des usages et services qui transforment la vie et créent de la valeur, mais aussi des valeurs – au sens économique et au sens éthique du terme. Les plateformes de services, qui permettent d’agréger, d’enrichir, de récréer, de contextualiser des informations, sont ici un puissant levier de transformation. Véritables espaces de rencontres dans lesquels convergent les mondes physique, numérique et social, ces plateformes sont ainsi des lieux où l’on appréhende autrement les usages.

Quelles conséquences sur les villes ? Nous sommes avec l’utilisation de la technologie au service des usages citoyens au début d’une tendance profonde, qui va créer des services et des usages radicalement nouveaux, mais aussi bouleverser la façon dont les villes et les métropoles répondent aux besoins vitaux et de bien-être de leurs habitants et font face aux aléas.

Chacun pourra contribuer via les réseaux sociaux à l’élaboration des services publics, et l’on verra sans doute émerger de nouvelles façons de vivre. Nous sommes également en train d’assister à une révolution des modes d’organisation : les systèmes hiérarchisés et verticalisés sont progressivement remis en question, car aujourd’hui avec la diffusion massive et horizontale des informations, chacun peut s’approprier les compétences et prendre les décisions.

Nos villes devront ainsi devenir des écosystèmes transverses, ouverts, évolutifs, adaptatifs permettant à l’homme de s’épanouir.

Les défis énergétiques et l’émergence de la ville décarbonnée imposent de mettre le développement durable au cœur de la vie de la cité. La cité du futur, que nous bâtissons chaque jour, est guidée aussi par le besoin impératif de mutualiser et d’optimiser ses ressources. L’usage quotidien des nouvelles technologies, qui se banalisent partout dans le monde, est devenu incontournable dans l’adaptation de la ville et de ses habitants aux enjeux d’aujourd’hui et de demain. La ville devient interactive, communicante.

La ville de demain devient alors collaborative et transverse. Au delà de la ville intelligente, de la Smart City, c’est la ville du partage, la Sharing City qui se profile à l’avenir.