Les bénéfices de la transplantation du microbiote fécal qui consiste en l’introduction, souvent par coloscopie ou lavement, des selles d’un donneur sain dans le tube digestif d’un receveur souffrant d’une infection intestinale avec la bactérie Clostridium difficile, ont déjà été documentés par plusieurs études. La pratique est déjà courante aux Etats-Unis où plus de 500.000 transplantations fécales sont opérées chaque année, et, alors que 40% des patients souffrent de récidive après un traitement antibiotique standard, ce traitement permet la récupération complète de la fonction intestinale chez 90% des patients.
Une thérapie de plus en plus largement pratiquée : Aux Etats-Unis toujours, la Food and Drug Administration a accordé à la transplantation un statut de médicament expérimental et plus de 500 centres américains la proposent aujourd’hui, à partir de dons congelés d’une banque à Boston, OpenBiome. La transplantation fécale contre l’infection à C difficile a été approuvée par l’Académie américaine de gastroentérologie et la Société européenne de microbiologie et des maladies infectieuses. En Europe, la thérapie est maintenant recommandée par les directives européennes de traitement. En France, l’Agence nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) a encadré la pratique afin de garantir la sécurité des patients concernés. Enfin, l’Académie nationale de Pharmacie a récemment fait ses recommandations sur l’élaboration d’un guide des bonnes pratiques, allant des mesures de traçabilité nécessaires au suivi des effets secondaires possibles et aux explications à donner au patient pour un consentement éclairé. Car encore mal acceptée par le patient, la transplantation du microbiote fécal apparaît comme l‘un des moyens les plus efficaces pour traiter les infections à Clostridium difficile.
Manque de données mais essais diversifiés: Le manque de données sur les effets de la transplantation dans les infections précoces ou très résistantes, et l’efficacité comparée des différents modes de transplantation, est néanmoins souligné par les auteurs. La prudence est compréhensible, car il n’existe encore aucun registre à long terme de patients traités par transplantation du microbiote. Cependant, la littérature disponible suggère que les effets indésirables sont rares.
Les premiers résultats d’efficacité contre C difficile ont incité à des essais, déjà en cours pour le traitement du syndrome du côlon irritable, les maladies inflammatoires de l’intestin dont la rectocolite hémorragique, l’encéphalopathie hépatique, et l’autisme. La transplantation est également envisagée comme une aide, en cas de chimiothérapie. Y avoir recours pour lutter contre l’obésité est » tentant « , même si les premiers essais sont peu concluants sauf sur l’amélioration de la sensibilité à l’insuline dans le diabète ou pré-diabète.
Le microbiote, une piste de recherche majeure : Les microbes de l’intestin jouent un rôle important et de grande envergure dans nos systèmes immunitaire et notre santé. Une diversité réduite des communautés microbiennes est observée dans de nombreuses maladies chroniques courantes et le microbiome a été associé par de nombreuses études à des mécanismes spécifiques à l’allergie et l’infection.
Des risques évidents d’infection : Des effets indésirables de la transplantation du microbiote ont déjà été documentés : des patients infectés à C. difficile qui se sont rétablis de leur infection, mais ont pris un poids considérable jusqu’à l’obésité, d’autres ont développé l’anxiété et la dépression. Les auteurs suggèrent que la transplantation peut aussi induire la production de toute une gamme de substances neurochimiques, dont la dopamine, l’acide γ-aminobutyrique (GABA) et la sérotonine. Le transfert de microbes à un nouvel hôte pourrait ainsi favoriser un déséquilibre dans ces neurotransmetteurs.
Bref, toutes ces données suggèrent que la transplantation fécale doit être soigneusement surveillée sur le long terme, même si à court terme, elle » fait mieux » que les traitements médicamenteux traditionnels. » Si certains voient la transplantation fécale comme une panacée pour de nombreuses maladies, ces revendications sont probablement trop optimistes. Les données actuelles suggèrent que les greffes peuvent ne pas être en mesure de toujours corriger un écosystème bien adapté « .
Source: BMJ 2015; 351: h5149 20 Octobre 2015 Faecal transplants Still need good long term trials and monitoring
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