Titre : Le temps n’est rien
Auteur : Audrey Niffenegger
Plaisir de lecture : Livre avec entrée au Panthéon
Henry est atteint d’une maladie génétique, la chrono déficience. Alors que certains rêveraient de voyager dans le temps, il la voit comme une malédiction. Il voyage contre son gré et sans moyen de contrôler ses sauts. Claire va voir Henry plusieurs fois, à un âge différent. Elle a 6 ans, quand elle rencontre Henry pour la première fois ; lui en a 36. Leur « vraie » rencontre a lieu à 20 ans pour elle, 28 pour lui. Les rôles s’inversent alors : elle va lui expliquer ce qu’elle a appris en côtoyant son futur lui et en l’aimant. Mais vivre ensemble est difficile.
Claire : C’est difficile d’être abandonnée ainsi. J’attends Henry sans savoir où il est, en me demandant s’il va bien. C’est difficile d’être celle qui reste.
Je m’occupe. Le temps passe plus vite de cette façon.
Je me couche seule et me réveille seule aussi. Je me balade. Je travaille et ne m’arrête pas avant d’être fatiguée. Je regarde le vent jouer avec les détritus qui ont été ensevelis sous la neige tout l’hiver. Les choses paraissent simples jusqu’à ce qu’on commence à les analyser. Pourquoi l’amour est-il magnifié par l’absence ?
Autrefois, les hommes partaient en mer et les femmes les attendaient, debout sur la jetée, guettant à l’horizon l’apparition de leur minuscule bateau. À présent, j’attends Henry. Il se volatilise malgré lui, sans jamais prévenir. Je l’attends. L’attente, chaque fois, semble durer une année, une éternité. Chaque instant s’écoule lentement, transparent comme du verre. À travers chacun de ses instants, j’entrevois une infinité de moments identiques, prêts à se succéder. Pourquoi est-il parti là où je ne peux le suivre ?
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L’année dernière, je discutais avec Magali et lui stipulais que je commençais un challenge littéraire sur le voyage temporel. Elle m’a alors juste soufflé ce titre dont je n’avais pas entendu parler (ni même l’adaptation cinématographique sous le titre ‘Hors du temps’). Des lectrices ont déjà succombé par les seuls mots que j’avais laissés sur un bilan mensuel de lectures. Si le titre français prend tout son sens au fil de la lecture, j’aime aussi beaucoup l’original : the time traveler’s wife.
Henry effectue sans cesse des sauts dans le temps : il arrive tout nu, généralement nauséeux dans un lieu et une époque inconnus voir même incertains. Henry ne peut modifier ni la trame du temps, ni l’histoire et encore moins son futur.
À travers le prisme de l’amour, on découvre le quotidien de deux personnes. Mais ce n’est qu’une histoire d’A. : il y a toute la vie là derrière. Atypique certes, emplie de moments délicats, de situations dangereuses, d’absences et de construction « sans l’autre ».
La construction du roman nous rend les personnages plus réalistes que jamais. En début de chaque chapitre sont indiqués l’année, l’âge des deux protagonistes et le prénom du narrateur.
Ce roman met en avant les espoirs et les soucis du quotidien d’une personne extraordinaire. L’intrigue se focalise sur les problèmes humains d’Henry et de Claire. L’auteure nous délivre une véritable interrogation du saut temporel vécu par les proches. On voit évoluer les personnages, dans toute leur imperfection.
Ce roman de Science-fiction est aussi touchant que fascinant. J’ai accroché car je l’ai trouvé très réaliste. Mais aussi juste, percutant et plein d’émotions. Il n’y a pas d’excès de pathos, ni de niaiseries, ni de mélodrame. La trame n’est pas fleur bleue mais renferme quelques scènes poignantes, de détresse et d’amour.
Ce récit singulier a particulièrement fonctionné avec moi car je suis arrivée à la question fatidique : et moi, qu’est-ce que je ferai, à leur place ? Ma lecture a été intense, j’ai souri, j’ai pleuré, j’ai eu la gorge nouée à la fin et il m’est resté longtemps en tête après avoir refermé le livre. Le simple fait d’écrire ma chronique me rappelle beaucoup de passages « vivants » et mémorable. Je sais d’ores et déjà que c’est un livre que je vais relire. (N’est-ce pas une preuve ultime que ce livre est vraiment à découvrir ?)
Vous pouvez considérer « Le temps n’est rien » d’Audrey Niffenegger « seulement » comme une bouleversante histoire d’Amour. Vous pourriez alors passer d’une histoire fantastique qui repose sur le quotidien de deux personnes, dont l’une est atteinte d’une maladie : les sauts temporels. On entre dans leur vie et dans la problématique de ne pas s’oublier, de se construire malgré les grands croisés dus à une chrono-déficience incontrôlable.
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Souvenir de lecture : L’attente.
L’adaptation cinématographique, titrée Hors du temps (The time traveler’s wife toujours en anglais), ne propose pas la même profondeur d’histoire mais s’en tire plutôt bien même si les personnages me semblent plus caricaturaux.
Évidemment, le film paraitra extrêmement court aux lecteurs. Ceci dit, Eric Bana et Rachel McAdams fonctionnent plutôt bien ensemble. Le film fait tout de même pleurer les gâteaux secs.
Une autre vision du voyage temporel et de son poids dans le quotidien et pour les proches.
Dans ma bibliothèque (Rose), Just one more page (Felinana), Les escapades culturelles de Frankie, Marque-ta-page (Valeriane), Mes imaginaires (Sandrine) , Pages après pages (Petit_Speculoos), se sont aussi demandé si un jour Henry ne reviendrait pas.
Illustrations : #01 couverture de l’édition Vintage modern classics ; #02 Citation par Theredwritinghood ; #03 photomontage par Blackmamba08 ; #04-#05-#06 citations, sources inconnues.
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