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Combien coûtent les grèves à la France ?

Publié le 20 octobre 2015 par Edelit @TransacEDHEC

Si la France n’est pas la championne du monde de la grève, le Danemark nous devance en terme de jours de grèves rapportés au nombre de salariés, la grève est pour nous, français, un élément fort de notre culture et personnalité. Mais, comme l’abus de vin ou de la baguette, les grèves représentent aussi un fléau. Car une grève touche non seulement les grévistes et leur secteur d’activité, mais aussi l’économie du pays dans son entier.

En France, une situation à part

Le droit de grève n’est pas le même dans les autres pays européens. C’est même un concept quasi inconnu! Par exemple, en Allemagne, 35% des fonctionnaires qui travaillent depuis 1997 ne peuvent pas faire grève. En Autriche, la seule grève dont on se souvienne ces dix dernières années a duré 30 minutes et le service restait assuré à son minimum, à se demander à quoi leur sert ce droit. Sans parler de la Belgique, où les grévistes agissent de nuit… Enfin des travailleurs qui respectent leur population !

En fait, dans la plupart des pays européens, les grèves surprises et l’arrêt total de l’activité son interdits, limitant considérablement le nombre et l’impact des grèves, ce que ne prévoit pas le droit français dans le secteur privé.

Résultat, un mois sans grève en France relève du miracle !

En voici pour preuve un petit graphique relatant du nombre de grévistes par secteur et par année :

Combien coûtent les grèves à la France ?

Soutenons un peu les grévistes, avant de les détruire, car s’ils n’emmerdaient pas le monde, personne ne réagirait. C’est vrai qu’un chauffeur de bus agressé nous attriste. Mais après une journée de galère en région parisienne, à courir après le seul bus de la journée en pleine heure de pointe, pour être coincé, serré comme une sardine, dans les bouchons, on se met subitement à détester les agresseurs de chauffeurs.

Notre esprit patriotique est pourtant mis à rude épreuve. Les grèves ont des conséquences en cascade, allant de l’employé au pays dans son ensemble. On remarque ainsi que les pays les plus laxistes vis-à-vis du droit de grève se retrouvent avec les relations syndicat-patronat les plus tendues d’Europe. De plus, ces mauvaises relations ont un impact direct sur la santé de nos économies. Étudié par Olivier Blanchard et Thomas Philippon en 2004, ce phénomène a un dernier désavantage : «La mauvaise nouvelle, c’est que les relations sociales mettent très longtemps à s’améliorer, si jamais elles s’améliorent.» Quelle heureuse nouvelle !

Quand Radio France, Air-France ou la SNCF sont en grèves, le pays est en galère

Cette rentrée de 2015, Air-France s’en souviendra, et longtemps. Ce sont 700 millions d’euros de capitalisation boursière évaporés en un mois, et des investisseurs qui ne comptent pas revenir avant un bon bout de temps. Le prix de l’action a baissé, les investissements de l’entreprise se voient réduits de 15% pour 2015-2016 et la stratégie commerciale de l’entreprise est affectée. De plus, la facture est sévère pour les salariés d’Air-France : chaque gréviste a perdu 7 654 euros et les salariés qui n’ont pas participé à la grève, payés au nombre d’heures de vol, ont subit une chute brutale de leur revenu.

Finalement, tout ca pour rien ! Les pilotes n’ont rien obtenu, ils y réfléchiront certainement à deux fois pour la prochaine manifestation, Air-France y a perdu gros, et puis il y a nous, simples passagers qui n’avons rien demandé et qui nous retrouvons coincés dans ce pays de grévistes ! Mais, plus grave encore, la France est à terre…

Combien coûtent les grèves à la France ?
En effet, l’activité nationale a stagné, et la crédibilité du pays sur la scène internationale est fortement amoindrie !

Un peu plus tôt, c’était Radio France qui était dans l’embarras

Bien que seuls 8% des salariés de Radio France aient fait grève, les 92% autres ne peuvent plus travailler en raison du blocage des ondes. L’entreprise paie un travail non fait, en plus d’accuser 2 millions d’euros de pertes publicitaires et une chute brutale de leur audience.

L’État a promis une aide financière de 80 millions d’euros à Radio France, alors que chaque centime semble compter dans le budget public. Ce financement exceptionnel met à mal l’État. Mais le plus gros problème, c’est que les français ont du écouter skyrock pendant des semaines, et l’avenir intellectuel de la France est désormais en jeu. On devra alors compter sur la présence de nos profs de l’Éducation nationale pour les aider, … sauf s’ils font grève bien entendu.

Parlons maintenant de la grève la plus détestée par les français : celle de la SCNF

Combien coûtent les grèves à la France ?
Combien coûtent les grèves à la France ?

La dernière grève mémorable en date est celle de 2014 (une petite pensée pour les bacheliers de cette année).

Commençons par un chiffre : selon l’économiste Frédéric Gonand, celle-ci a coûté entre 1 et 2 milliards d’euro à la France et a affecté 500 à 3 000 entreprises nationales. Le pauvre Guillaume Pepy, PDG de l’entreprise, s’est plaint dans les colonnes du Parisien: « On a perdu 153 millions d’euros, ça fait 15 trains franciliens. Soit un tiers de notre résultat de l’année dernière ». Peanuts diront les grévistes! Car les pertes de la SNCF sont imputables à la France, mais le bilan des pertes pour le pays ne s’arrête pas là !

Comme notre cher Frédéric Gonand nous l’explique : « L’essentiel du coût vient du fait que pendant les grèves de transports, des gens arrivent plus tard et/ou partent plus tôt. Cela entraîne une diminution du nombre d’heures travaillées alors qu’elles sont payées par les entreprises. Ce qui se traduit par une perte de productivité. » Chaque heure de travail perdue multipliée par le prix du salaire moyen, ce n’est pas rien. Et pour cause, cela peut aller jusqu’à 300 millions d’euros par jour lorsqu’aucun train ne circule, toujours selon la même source. L’INSEE estime ainsi que la grève totale de la SNCF de 1995 a fait perdre 0,3% de son PIB à la France.

Et ce n’est pas fini ! Car à toutes ces pertes, il faut ajouter des facteurs moins directs. Ainsi selon certains experts, la crédibilité commerciale et financière de la France est affectée à moyen terme après un mouvement important. Même quand le gouvernement résiste, il en prend un coup.

Pour finir, notre petite préférée : la grève des profs

Combien coûtent les grèves à la France ?
Jusqu’ici, nous avons parlé des grandes grèves de travailleurs de différentes catégories socio-professionnelles, mais pas encore de celles des profs ! L’idée n’est évidemment pas de dénigrer leur expertise en la matière, bien au contraire ! Ces grévistes font exception. D’abord, quand les profs font grève, les enfants sont contents. Mais vous vous en doutez : ça, la France s’en fiche !

En fait, l’État aussi s’en réjouit. Selon le site Mediapart (et pas que) : « Une grève des profs rapporte des millions à l’Etat ». Pour un enseignant, un jour de grève vaut une retenue de salaire entre 50 et 100€. Lors d’une forte mobilisation, l’État empoche facilement le million d’euro en une journée. Pour Mediapart, l’État gagne à ce que ses fonctionnaires fassent grève. En effet, ils paient moins leurs employés, et un jour d’école de moins n’a aucune incidence sur la production nationale. Le site se révolte alors de l’injustice du droit de grève de nos fonctionnaires : « Faire grève revient donc à financer une partie de sa politique d’austérité, celle précisément qui doit être combattue. »

Après réflexion, les réformes scolaires du gouvernement prennent sens. Si elles sont si nombreuses et si agaçantes, c’est que le gouvernement le fait exprès : il faut bien remplir les caisses de l’État d’une manière ou d’une autre ! Ils sont plus malins qu’on ne le pense à l’Élysée.


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