"Est-ce que l'on a toujours ce que l'on mérite ? Personnellement, je n'ai rien fait de mal qui puisse me justifier. Je ne suis pas comme toi. Toi, tu as un destin. Personne n'empruntera ta voie. Tandis que moi, j'ai l'impression qu'ils sont plusieurs."
D'Albert Einstein, on connaît bien souvent cette formule E=mc2 et puis cette photo, la langue sortie, impertinente. L'histoire intime du savant, et de sa famille, est assez méconnue du grand public. Dans Le cas Eduard Einstein, on apprend donc qu'il avait deux fils d'un premier mariage, et que le cadet a été diagnostiqué schizophrène. A l'époque, Albert Einstein vit déjà avec sa deuxième épouse Elsa, plus conforme aux souhaits de sa famille, il est resté à Berlin, tandis que Mileva est revenue en Suisse. Montée du nazisme oblige, Albert Einstein finit par quitter le vieux continent pour l'Amérique, non sans dire un dernier adieu à son ex-épouse, et à son fils, Eduard (la photographie en couverture du poche), ils ne se reverront plus.
Laurent Seksik instaure dans ce livre un dialogue sourd entre un fils prisonnier de sa maladie mentale, une mère, délaissée par l'amour de sa vie mais fière, et un père qu'une découverte fabuleuse a propulsé au firmament mais qui est rongé par la culpabilité et le découragement. Comment communiquer ? Comment parler de ce qui embarrasse au plus haut point ? Alors, l'Histoire s'en mêle, elle ruine le savant nobélisé, elle sépare les êtres, permet la fuite au loin, arrange les choses à sa manière. Laurent Seksik sait dans ce livre raconter les émotions et le passage du temps, l'infinie solitude, l'accablement et l'impuissance. Et j'ai aimé sa manière fine et subtile de nous en apprendre beaucoup tout en accordant tellement d'importance à la psychologie humaine. Un très beau livre, qui m'a rappelé une autre lecture, L'idée ridicule de ne plus jamais te revoir de Rosa Montero [clic ici], mais aussi son Les derniers jours de Stefan Zweig dont je n'ai lu que la version BD [clic ici].
Editions J'ai Lu - 7.60€ - Janvier 2015