Après l’excellent « Portugal », Cyril Pedrosa signe un nouveau récit au sein de la collection Aire Libre des Editions Dupuis.
L’auteur de « Trois ombres » invite à suivre le quotidien de plusieurs protagonistes qui cherchent à donner un sens à leur vie. Il y a Camille, une trentenaire sans boulot et sans attaches, qui ne se lie aux autres gens qu’à travers l’objectif de son appareil photo. Puis il y a Vincent, orthodontiste divorcé qui a du mal à comprendre Pauline, sa fille de 14 ans, dont il partage la garde avec son ex-femme. Il y a également Louis, un ex-militant septuagénaire fatigué, qui vit entouré de livres et avec la mémoire de ce fils qu’il a perdu à l’âge de onze ans…
Ce récit choral dresse le portrait de personnages qui se cherchent et s’interrogent sur leur place dans ce monde qui semble avancer sans eux. Souffrant d’une même forme de solitude, ils sont également confrontés à la peur de ne pas avoir existé pleinement. Des destins insignifiants, faits d’incertitude, d’inquiétude et de déceptions, qui finissent par se croiser au fil des pages…
«Je pense à toutes ses vies qui auraient été possibles et j’ai l’impression de ne pas en avoir vécu une seule. Au moins une.»
Cette histoire de portraits croisés, qui défilent sur près de 330 pages, est chapitré en quatre saisons, de l’automne à l’été. Malgré la tristesse et le désespoir qui entoure initialement ses vies au début du récit, au fil des saisons, l’ombre fait progressivement place à la lumière… Les équinoxes étant le moment où l’ombre et la lumière s’équilibrent parfaitement. L’album peut alors se refermer sur une lueur d’espoir et avec la conviction que chaque individu, aussi insignifiant soit-il, peut finalement laisser une trace de son passage sur Terre…
Chaque saison démarre d’ailleurs par un interlude qui transporte le lecteur en pleine préhistoire, en compagnie d’un jeune garçon du néolithique, qui cherche également sa voie et qui finira par laisser une trace. Les différents chapitres sont également régulièrement entrecoupés par des textes qui apportent un éclairage sur certains personnages. Des tranches de vies qui sont saisies par l’objectif de la jeune photographe, invitant à découvrir leurs pensées les plus profondes… Des portraits qui s’intègrent aux autres pour finalement former un tout et rendre palpable toutes ces émotions qui font le sel de la vie…
Visuellement, Cyril Pedrosa accompagne d’ailleurs les humeurs de ses personnages avec brio. Le style change également au fil des saisons, les couleurs foncées et froides, liées à l’époque hivernale, faisant progressivement place aux pastels à l’arrivée du printemps. Splendide !
Un très gros coup de cœur, que vous retrouverez bien évidemment dans mon Top BD de l’année !