CJUE, Troisième chambre, 6 octobre 2015, Affaire C‑489/14 : A contre B,
La décision de la CJUE a pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Family Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division de la famille, Royaume-Uni dans ces termes:
La question préjudicielle posée à la CJUE
«1) Aux fins de l’article 19, paragraphes 1 et 3, du règlement n° 2201/2003, comment faut-il entendre le terme ‘établie’ dans une situation où:
a) dans la procédure devant la juridiction saisie en premier lieu (‘la première procédure’), la partie demanderesse ne prend pratiquement aucune initiative après la première audience et en particulier ne lance pas d’assignation dans le délai de caducité de la requête, de telle sorte que la première procédure s’achève sans qu’une décision ait été prise, par écoulement du délai imparti, conformément au droit (français) local applicable à la première procédure, à savoir 30 mois après l’audience de conciliation;
b) la première procédure s’éteint, comme indiqué ci-dessus, très peu de temps (trois jours) après que la procédure devant la juridiction saisie en second lieu (‘la seconde procédure’) est lancée en Angleterre, de telle sorte qu’il n’y a pas de jugement prononcé en France ni aucun danger de décisions inconciliables entre la première procédure et la seconde procédure;
c) le fuseau horaire du Royaume-Uni fait que la partie demanderesse dans la première procédure pourrait toujours, après l’extinction de celle-ci, lancer une procédure de divorce en France avant que la partie demanderesse (dans la seconde procédure) ne puisse lancer une procédure de divorce en Angleterre?
2) En particulier, le terme ‘établie’ signifie-t-il que la partie demanderesse dans la première procédure doive agir pour faire avancer la première procédure avec diligence et célérité vers un règlement (judiciaire ou conventionnel) ou est-ce que, après avoir établi la compétence de la juridiction de son choix au titre des articles 3 et 19, paragraphe 1, [du règlement n° 2201/2003], cette partie est libre de s’abstenir de toute initiative concrète pour régler le litige dans la première procédure, se satisfaisant d’avoir paralysé la seconde procédure et créé une situation sans issue dans l’ensemble du litige?»La qualification opérée par la Cour : « la juridiction de renvoi demande, en substance, s’agissant de procédures de séparation de corps et de divorce engagées entre les mêmes parties devant des juridictions de deux États membres, si l’article 19, paragraphes 1 et 3, du règlement n° 2201/2003 doit être interprété en ce sens que, dans une situation, telle que celle en cause au principal, où la procédure devant la juridiction première saisie dans le premier État membre s’est éteinte après la saisine de la seconde juridiction dans le second État membre, la compétence de la juridiction première saisie doit être considérée comme n’étant pas établie. La juridiction de renvoi demande en particulier si, afin de répondre à cette question, la circonstance que ladite extinction soit intervenue très peu de temps avant l’introduction d’une troisième procédure devant une juridiction du premier État membre, le comportement de la partie demanderesse dans la première procédure, notamment son absence de diligence, et l’existence d’un décalage horaire entre les États membres concernés, lequel permettrait la saisine des juridictions du premier État membre avant la saisine de celles du second État membre, sont pertinents »(§ 26) La décision de la Cour :
"S’agissant de procédures de séparation de corps et de divorce engagées entre les mêmes parties devant des juridictions de deux États membres, l’article 19, paragraphes 1 et 3, du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil, du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000, doit être interprété en ce sens que, dans une situation, telle que celle en cause au principal, où la procédure devant la juridiction première saisie dans le premier État membre s’est éteinte après la saisine de la seconde juridiction dans le second État membre, les critères de la litispendance ne sont plus remplis et, par conséquent, la compétence de la juridiction première saisie doit être considérée comme n’étant pas établie"
Pour aller plus loin : L'arrêt CJUE A contre B +Viganotti Elisa
Avocat de la famille internationale