Les taux de cancer sont-ils liés à la taille du corps ou à la durée de vie ? Probablement pas si l’on en croit ces travaux qui décryptent le mécanisme cellulaire de résistance au cancer chez plusieurs animaux, dont…l’éléphant. Alors que l’éléphant a bien plus de cellules que l’Homme, seul un sur 20 décèdera d’un cancer vs un humain sur 5. En cause, leurs défenses naturelles contre la formation de tumeurs. Elles pourraient bien servir de modèles à des traitements pour l’Homme.
Les chercheurs des universités d’Utah, de Pennsylvanie, d’Arizona, de Californie et du Barnum & Bailey Center for Elephant Conservation ont d’abord recueilli 14 années de données provenant d’animaux du Zoo de San Diego afin d’évaluer si le taux de cancer est lié à la taille du corps ou à la durée de vie. Des données de » Elephant Encyclopaedia » ont également été analysées pour mieux comprendre la cause des décès chez les éléphants d’Afrique et d’Asie. Ensuite, les chercheurs ont recueilli des échantillons de sang et de globules blancs de 8 éléphants africains et asiatiques, de 10 patients atteints du syndrome de Li Fraumeni (LFS : prédisposition à diverses tumeurs) et de 11 personnes sans antécédents familiaux de cancer (témoins sains). Les chercheurs ont regardé le nombre de copies du gène TP53, un gène protecteur, produisant une protéine suppresseur de tumeur.
ØLes chercheurs constatent que les éléphants ont au moins 20 copies actives d’un gène appelé TP53 connu pour encourager le suicide cellulaire en cas de dommages à l’ADN. Ainsi, chez l’éléphant, TP53 bloque toute croissance ou presque de cancer. En revanche, chez les humains il n’y a qu’une seule copie du gène TP53.
Par ailleurs,
· le risque de cancer ne varie pas en fonction de la taille ou de la durée de vie des animaux
· parmi les 644 éléphants de l’Encyclopédie, seuls 3% ont développé un cancer dans leur vie
· la réponse cellulaire aux dommages de l’ADN s’avère significativement plus élevée chez les éléphants vs les humains et a fortiori vs les patients atteints de LFS.
A partir de ces données, l’idée serait bien sûr de pouvoir stimuler l’activité TP53 chez les humains afin d’induire un même effet protecteur contre le cancer. Un défi pour la science, car si l’on connaît l’existence de TP53 depuis plus de 30 ans, on ne sait encore exploiter ses effets. Enfin, l’étude n’a porté que sur 1 seul gène, alors que beaucoup de gènes pourraient être impliqués dans le développement du cancer et ciblés par de nouveaux traitements.
Source: JAMA October 8 2015 doi:10.1001/jama.2015.13134 Potential Mechanisms for Cancer Resistance in Elephants and Comparative Cellular Response to DNA Damage in Humans