A l’obésité morbide, sont associées des comorbidités en santé mentale dont on parle peu. Mauvaise image de soi, déficit d’estime de soi et de confiance en soi, discrimination, entraînent troubles anxieux et symptômes de dépression fréquemment ancrés chez ces patients souffrant d’obésité morbide et bien avant la chirurgie bariatrique. Ainsi, l’automutilation, les pensées suicidaires et les tentatives de suicide sont fréquentes chez les candidats à la chirurgie de l’obésité. Ces études suggèrent que ces comportements pourraient être aggravés par l’intervention.
La première étude menée sur un groupe de 8.815 patients ayant subi une chirurgie bariatrique, à 80% des femmes, estime que le risque de tentative de suicide et (de se faire du mal, comme par auto-mutilation, surdose de médicaments, d’alcool, ou de produits chimiques toxiques) a augmenté après la chirurgie. Ces patients ont été suivis durant 6 ans, 3 ans avant et 3 ans après l’intervention.
111 patients ont donné lieu à 158 admissions aux urgences pour automutilation durant le suivi de l’étude. L’analyse montre que,
ØL’incidence des urgences pour automutilation augmente considérablement après la chirurgie : elle s’élève à 3,63 pour 1.000 patients-années après vs 2,33 pour 1.000 patients-années avant,
Øcela correspond à une augmentation du risque de 54%.
Øcette augmentation du risque touche plus particulièrement les patients âgés de 35 ans et plus, à faible revenu et vivant en zone rurale.
ØLe mode de tentative de suicide le plus fréquent était un surdosage intentionnel de médicaments.
Cependant, presque tous ces événements se sont produits chez des patients ayant déjà des antécédents de trouble de la santé mentale.
Comment expliquer le risque ultérieur d’automutilation ? Les chercheurs évoquent des changements dans le métabolisme de l’alcool après la chirurgie, le besoin de substituer à la nourriture une autre substance, l’augmentation du stress et de l’anxiété post-opératoires, les effet de la chirurgie sur les niveaux de neurohormones, des médiateurs possibles de la dépression et des comportements suicidaires.
Mieux identifier les patients à risque d’automutilation et de TS : Un commentaire publié dans la même édition, analyse ces résultats :
L’obésité morbide, initialement associée au risque: l’incidence préopératoire des admissions en urgences pour les différentes formes d’automutilation chez les patients subissant une chirurgie bariatrique est le double de la moyenne en population générale,
Les tentatives préopératoires annoncent le risque de tentatives post-opératoires : de 50% vs l’absence de tentative d’automutilation pré-opératoire.
enfin, la plupart des urgences pour automutilation surviennent dans les 2è et 3è années postopératoires. Les implications sont donc évidentes pour le suivi psychologique de ces patients.
En conclusion, ces données soulignent l’extrême vulnérabilité mentale des patients éligibles à la chirurgie bariatrique avec des taux de suicide plus de 4 fois plus élevés qu’en population générale. La chirurgie bariatrique n’est pas une simple intervention de perte de poids. Ces événements indésirables compromettent ses bénéfices globaux et incitent à repenser les critères d’éligibilité et à renforcer le suivi postopératoire.
Sources : JAMA Surgery October 7, 2015
doi:10.1001/jamasurg.2015.3414 Self-harm Emergencies After Bariatric SurgeryA Population-Based Cohort Study
doi:10.1001/jamasurg.2015.3396 Bariatric Surgery—More Than Just an Operation