Le Crédit Mutuel et l'évasion fiscale

Publié le 08 octobre 2015 par Raphael57

L'évasion fiscale est depuis longtemps le poison de la démocratie, puisqu'elle conduit à déliter le consentement à l'impôt et augmente la charge fiscale de ceux qui ne peuvent s’y soustraire. J'avais déjà évoqué ce sujet dans le cadre de plusieurs conférences et bien entendu dans des billets, notamment après les révélations sur la créativité fiscale du Luxembourg...

Aujourd'hui, j'y reviens suite à la diffusion sur France 3 d'un excellent numéro de Pièces à conviction consacré au Crédit Mutuel. Il y est question de banques suisses, de pots-de-vin, d'argent qui disparaît, de porteurs de valises, etc. L'enquête est bien ficelée et construite sur le témoignage de trois anciens banquiers, spécialistes de la gestion de fortune.


Pieces Enquete sur le credit mutuel

Rappelons que cette enquête sur des faits d'évasion fiscale au sein du groupe bancaire a failli ne jamais sortir des cartons, puisque l'ami de l'information libre, Vincent Bolloré, était personnellement intervenu pour empêcher sa diffusion sur Canal +. Vous noterez qu'en sa qualité de patron de Vivendi, Bolloré fait déjà bien pire que le célèbre Jean-Marie Messier, pourtant honni lorsqu'il occupait le même poste au tournant des années 2000...

Heureusement que le service public a fait preuve de courage en décidant de diffuser ce document ! Alors n'hésitez pas à le voir en replay si d'aventure vous l'aviez manqué ; il est disponible gratuitement pendant six jours encore à cette adresse.

Depuis, le Crédit Mutuel, qui a toujours nié ces allégations d'évasion fiscale, a justement vendu la banque Pasche à une banque luxembourgeoise, Havilland. Pour mémoire, voici l'organisation du groupe CM11-CIC et BFCM en 2013 (j'ai entouré la banque Pasche en rouge) :

[ Source : rapport financier annuel BFCM 2013 ]

Il est à noter qu'avec la diffusion programmée de cette enquête et les investigations complémentaires menées par Mediapart, le parquet national financier a été contraint d'ouvrir une information judiciaire pour soupçons de blanchiment de fraude fiscale.

Question fatidique : que font les autorités de contrôle des banques ? Sur ce point, dormez tranquilles, puisque le gouvernement s'est senti obligé de choisir François Villeroy de Galhau, ancien directeur général délégué de BNP Paribas, pour le poste de gouverneur de la Banque de France : un banquier pour surveiller les banquiers !

Au demeurant, si cette question des conflits d'intérêts vous intéresse, n'oubliez pas qu'Eva Sas, Députée de l’Essonne, Vice-présidente de la Commission des finances, Marie-Noëlle Lienemann, ancienne ministre et Sénatrice de Paris, et plusieurs de leurs collègues ont déposé une proposition de loi à ce sujet.

Or, à ce stade le texte n'a aucune chance d'être voté, sauf si chacun se mobilise, en demandant par exemple directement au député de sa circonscription s'il compte voter pour ce texte (liste des adresses courriels des députés disponible ici).