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La guerre des roses

Publié le 08 octobre 2015 par Cathcerisey @cathcerisey

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Octobre démarre sur les chapeaux de roue et les anti-dépistages sortent du bois probablement de peur de se faire couper l’herbe sous le pied par leurs adversaires qu’ils pensent  aveuglés par de faux arguments étayés par de non moins fausses études pseudo-scientifiques ! Une guéguerre ridicule démarre, les anti mammo excédés par l’overdose de rose auquel on assiste immanquablement en ce début d’automne et outrés par les discours qui vantent les bienfaits du programme et enjoignent les femmes à courir faire leur mammographie.

Soit, le problème du dépistage fait couler beaucoup d’encre durant octobre rose – un peu trop à mon avis – et il faut avouer qu’il n’est pas simple pour les femmes de se faire une idée précise de l‘intérêt ou pas d’adhérer au programme mis en place depuis une dizaine d’années. Devant cette cacophonie, il est en effet difficile de comprendre les enjeux, des chiffres contradictoires d’études « très sérieuses » étant avancés par les deux camps. On assiste à des batailles du type pro ou anti-vaccin, stériles et contre-productives, et les femmes en perdent leur latin.

Il est vrai que pendant de nombreuses années, les campagnes de dépistage ont minimisé les risques inhérents à tout acte médical, pour mettre en avant les bénéfices d’une mammographie tous les 2 ans. Mais les choses tendent à changer depuis quelques années.

Et voilà donc les no-mammo qui lancent le site cancer-rose affichant l’ambition de donner la « vraie » information afin de « déculpabiliser » les femmes et « les rendre actrices de leur santé ». Chiffres et explications se succèdent dans le but de faire comprendre pourquoi  il ne faut pas aller  faire une mammographie. Pour être plus clairs encore, il tente de nous expliquer les pourcentages en défaveur de cet examen, en utilisant le test très scientifique des perles, qui prend exemple sur un dépistage à partir de 40 ans -ce qui je le rappelle n’est pas préconisé en France- de quoi penser qu’ils nous prennent vraiment pour des…. perles billes! Et bien entendu, aucune trace d’allusion à de quelconques bénéfices. Un site sensé « nous donner le choix », imaginé par des médecins incapables de nous présenter un panorama complet prenant en compte la fameuse balance bénéfices/risques quitte à nous prouver que cette balance penche du côté du non. Bref une « vraie information » qui ne dévoile qu’un pan de la réalité, un site uniquement à charge.

Le plus drôle est que ce site est à l’initiative du Docteur Cécile Bour, radiologue de son état qui officie en Moselle et participe notamment à … devinez quoi ? Le dépistage organisé du cancer du sein, en tant que 1er lecteur ! Sur son site professionnel, j’ai eu beau chercher, point de discours mettant en garde sur les dangers du dépistage pourtant largement développés sur cancer-rose. Soyons sérieux, le Dr Bour alerte sur les dangers du dépistage organisé alors qu’elle y participe et en perçoit des honoraires? Paradoxal non ?

Je ne commenterais pas les chiffres d’expert de l’un et l’autre camp et j’ai déjà parlé ici de mon sentiment sur le dépistage organisé. Pour résumer, je pense que le sujet est éminemment compliqué et que les femmes méritent une information claire et juste afin de prendre une décision éclairée. Ce n’est pas plus le cas de cancer-rose que de certaines campagnes de dépistage d’il y a quelques années qui nous montraient les seins de mannequins ou actrices et qui donc avaient sauvé leur vie.

Conscient des enjeux sur un sujet compliqué, l’INCa vient de lancer une concertation citoyenne qui permet aux femmes et aux hommes, usagers, patientes ou professionnels de santé de donner leur avis.

Le dispositif se décompose en 6 phases :

  • Un site ouvert jusqu’au 15 mars 2016, qui va récolter les contributions de tous. Les pros et les antis, les pours et les sceptiques, les indécis et les curieux vont pouvoir s’exprimer sur le sujet sans censure. Il ne s’agit pas seulement d’échanger sur l’intérêt ou les limites du dépistage organisé mais aussi de proposer des pistes pour améliorer son organisation, le développer ou (pourquoi pas) le restreindre , débattre sur ses objectifs …. Bref contributions ouvertes ou réponses à des questions proposées, vous avez la parole !
  • Parallèlement entre janvier et mars 2016, une conférence va être organisée réunissant un panel de 20 citoyennes représentantes de la diversité des femmes françaises qui, après une formation aux enjeux, rendront un avis final.
  • Dans le même temps, 15 professionnels vont débattre et délibérer pour formuler des propositions.
  • Une grande réunion publique nationale de clôture se tiendra au printemps 2016 où seront présentés et débattus la synthèse des contributions et les premières pistes du comité d’orientation.
  • Un rapport sera rendu durant l’été 2016
  • Un plan d’action national sera élaboré par le ministère en charge de la santé, l’INCa et l’assurance maladie.

Il me semble que cette initiative va dans le bon sens. Celui de la démocratie participative, si rare en santé, qui permet à chacun de s’exprimer.

Alors plutôt que de se battre en niant et démontant bêtement les arguments de l’autre, venez débattre sur le site de concertation-dépistage afin de faire avancer les choses. Espérons seulement que les décisions prises démocratiquement satisferont les deux parties et que cessera enfin la guerre des roses !


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