Interview de Gabriel ARLYS

Par Revesetimagines @Reveset

Je vous propose de découvrir un auteur talentueux, Gabriel ARLYS, dont l'ouvrage, La Dictature Aléatoire, est publié aux éditions Boz'Dodor. Un très grand merci à cet auteur chaleureux d'avoir répondu à cet interview et je lui souhaite un bel accueil avec son recueil de nouvelles qui paraîtra en fin d'année.

1 – Bonjour, pourriez-vous vous présenter afin de faire un peu plus connaissance ?

Bonjour et merci beaucoup pour la sollicitation. Alors je me présente dans les grandes lignes : J’ai 29 ans, je suis originaire du Vaucluse, mais je vis depuis 7 ans en Suisse, dans le canton de Vaud, sur les bords du lac Léman. Une région pour laquelle j’ai eu un réel coup de foudre et que je ne souhaite plus quitter. J’ai une formation de scientifique et plus précisément d’écologue. Je tiens à ce terme qui diffère de celui d’écologiste ou simplement « écolo ». Pour moi un écologiste est un militant de la cause environnementale, qu’il soit politicien ou simple citoyen, tout le monde peut-être écologiste. Un écologue est un scientifique qui est censé comprendre le fonctionnement des écosystèmes et, le cas échéant, anticiper les problèmes liés aux activités humaines dans la dégradation de l’environnement. D’après moi, s’il y avait plus d’écologues au sein des partis politiques « verts », cela changerait pas mal de choses. Voilà pour le premier pavé dans la marre !

2 – Comment ce désir d’écrire est-il apparu ?

Autour d’une bière (plusieurs en fait) avec un ami proche. Je lui raconté un de mes rêves, celui où m’est apparu le fonctionnement de la fameuse puce que vous retrouvez dans la dictature aléatoire. Là, il m’a tout de suite dit : « C’est marrant, on dirait du Barjavel ». René Barjavel est un auteur très influant pour moi. Alors comme on était tous les deux en thèse, qu’on avait du temps, et que j’avais trop bu, je lui ai répondu : « Chiche, je t’en fais un roman ». Et comme je suis têtu, j’ai fini par tenir ma parole.

3 – Avez-vous d’autres activités ou passions à votre actif ?

Je me considère vraiment comme un touche à tout. C’est-à-dire que tout m’intéresse, surtout ce qui est nouveau. Donc j’ai toujours plusieurs activités en parallèle mais je ne suis pas un perfectionniste, donc je n’excelle nulle part. Pour vous donner une petite liste des activités dans lesquelles je me suis investi au cours de ma vie / jeunesse, il y aurait évidemment le sport avec en priorité les arts martiaux et le judo (ceinture noire depuis que j’ai 19 ans mais ensuite je n’ai plus progressé). Il y a la musique : je joue un peu de guitare et j’aime chanter, mais je ne connais pas le solfège par exemple. Et puis il y a la cuisine, ça c’est un héritage familial : Mon frère est un excellent chef, mon père a tenu plusieurs restaurants et moi-même j’ai énormément travaillé en restauration, depuis l’âge de quinze ans et tout au long de mes études. Aujourd’hui, je me passionne de plus en plus pour la politique. La politique agricole surtout, puisque c’est le domaine que je côtoie tous les jours avec mon métier, mais la politique globale également, surtout avec les comparaisons que je peux tout le temps établir entre le système suisse et le système français.

4 – Si vous ne deviez citer qu’un seul ouvrage, lequel vous passe par l’esprit ?

Alors ça va peut-être paraitre étrange, mais je citerai Candide de Voltaire. Ce n’est absolument pas le genre de livre que je lis habituellement et d’aucun diront que Voltaire était un infâme bourgeois méprisant le peuple (sans doute ont-ils raison). Mais la morale finale de ce petit conte s’applique tellement à ma vie, tous les jours. Le bonheur dans la simplicité. Décider qu’on est heureux avec ce que l’on a.

5 – Avez-vous été inspiré par quelqu’un ou quelque chose pour écrire La Dictature Aléatoire ?

On est toujours inspiré par quelque chose. Après faut-il encore identifier les sources d’inspirations. Quand mon ami m’a dit que mes rêves ressemblaient à des scénarios Barjavelien, ça a été une révélation pour moi et je me suis rendu compte à quel point cet auteur m’influençait. J’ai aimé tous ses livres, surtout « Colomb de la Lune » et « Le diable l’emporte ». Ensuite le reste de l’influence vient des grands classiques dystopiques : « 1984 », « Le meilleur des mondes », « Fareinheit 451 »… que je lisais ou relisais pour certains à cette époque.

6 – Petit portrait chinois :

. Si vous étiez un personnage fictif
Sans doute Peter Pan. Je pense d’ailleurs souffrir de son syndrome, l’enfant qui ne souhaite pas grandir. Mais je pense que cettea priori immaturité peut être une forme de sagesse. Certes je ne me comporte pas toujours comme un adulte devrait le faire, car je cultive certaines facettes adolescentes. Mais je suis convaincu que pour le moment, cela est nécessaire à mon bonheur et mon épanouissement.

. Si vous étiez une culture
Je dirais la culture aborigène. Simple et proche de la nature. Mais je pourrais aussi prendre la question du côté agronomique et dire, si j’étais une culture, je serais un colza d’automne, qui se développe lentement puis laisse passer le gel avant de fleurir au printemps. Je suis d’une qualité nutritionnelle et gustative excellente, je suis une très bonne alternative à l’huile de palme !


.Si vous étiez un écrivain

Si j’étais un écrivain, j’aurais l’intelligence et la passion de Boris Vian, la clairvoyance de René Barjavel, le style décomplexé de Bret Easton Ellis (qui maltraite presque ses lecteurs par moments) et la maitrise de la langue française d’Alain Damasio (à lire et relire absolument le passage des joutes verbales de sa « Horde du contrevent »).

. Si vous étiez un dessert
La recette se trouve dans la dictature aléatoire : une déclinaison de verrines aux fruits rouges, de l’acidité vers la douceur. Je laisse les curieux aller voir les détails des recettes directement dans le roman…

7 – Comment avez-vous eu l’idée d’écrire une dystopie ?

Parce que je suis un fan de dystopie. Mais pour tout avouer, au départ, je voulais écrire une véritable utopie. Je croyais vraiment qu’en m’affranchissant des règles de notre monde actuel (grâce à la disparition de la quasi-totalité de l’humanité), je serai en mesure de reconstruire une société parfaite, où chacun trouverait sa place et où l’Homme vivrait en harmonie avec son environnement. La seule contrainte que j’ai voulu conserver est celle de la diversité. Je devais construire cette société avec des humains qui avaient des cultures, des histoires, des physiques et des gènes différents. J’ai donc fait mon possible pour créer un équilibre, basé sur le respect de l’environnement et la gestion des phénomènes aléatoires. Mais pour véritablement tester mon système, il fallait l’éprouver à un désordre. Voir si l’équilibre s’installait à nouveau ou si les choses allaient basculer dans le chaos. J’aurais voulu que l’équilibre revienne, pour pouvoir dire que j’étais capable de créer un véritable monde utopique. Mais il a fallu que je me rende à l’évidence, en respectant les différences de mes personnages, il était impossible de respecter les attentes de chacun au sein d’une seule et même société. Et mon utopie s’est muée en dystopie !

8 –En lisant votre roman, j’ai eu la sensation que vous faisiez passer un message sur la nature humaine, ai-je raison ?

Absolument ! D’ailleurs ça me fait plaisir que vous le releviez. La plupart des classiques dystopiques sont en fait des critiques d’un système politique, souvent du communisme (climax atteint avec le meilleur des mondes d’Aldous Huxley, qui donnent à ses personnages des noms comme Lenina…). Mon but n’était absolument pas de critiquer un système politique existant, mais de montrer que la nature humaine est souvent responsable de la détérioration des plus belles causes et des plus beaux idéaux.
Dans mon roman, selon moi, il n’y a pas vraiment de méchants ou de gentils. Il y a seulement des humains qui vont prendre position pour une cause ou pour une autre. Ensuite, la passion qui les anime les poussera à dépasser certaines limites. Après tout, si vous êtes certains que vous allez sauver l’humanité d’une catastrophe, que représente la mort de quelques personnes pour y arriver ? C’est bien pour cela que je pense que les certitudes sont sans doute les vecteurs des pires fléaux que l’humanité a connu et connaîtra.

9 – Pourriez-vous, à présent, nous parler de votre parcours : écriture, propositions aux maisons d’éditions, Edition, etc…

Volontiers ! L’écriture de La dictature aléatoire m’a pris deux années depuis la première ligne jusqu’à la fin du premier jet. Dans ma tête, l’ensemble de l’histoire s’est créé presque instantanément après avoir décidé d’en faire un roman. J’ai donc procédé de la sorte : J’ai fait un plan des chapitres, il y en avait une trentaine au départ, avec une phrase clef pour chacun d’eux. Ensuite, lorsque j’avais envie d’écrire, je relisais ce plan et je choisissais le chapitre que je voulais écrire en fonction de mon humeur du jour. Evidemment, il y a eu un gros travail ensuite pour faire le lien entre tous ces chapitres écrits dans le désordre et avec parfois de longs mois entre deux chapitres qui se suivent.
Une fois que j’ai eu fini ce premier jet, je l’ai fait lire à quelques amis et le retour que j’en ai eu était plutôt positif, dans le sens « on est déçu en bien » comme on dit ici !
Alors je me suis dit pourquoi ne pas demander un avis à des professionnels. J’ai envoyé mon manuscrit à de nombreuses maisons d’éditions, grandes et petites, par mail, par courrier… J’ai eu très vite les retours positifs des maisons d’éditions à compte d’auteur qui voulait absolument publier mon roman, moyennant une avance de ma part d’environ 3000€. En gros, il fallait vendre 800 exemplaires pour rembourser cet investissement, sachant que certains Galimard se vendent à 300 exemplaires… Donc j’ai attendu. Je me suis inscrit sur le forum des jeunes écrivains et cela m’a permis d’en apprendre énormément sur le monde de l’édition. Ça m’a aussi permis de rencontrer des personnes géniales et de suivre leurs aventures (je pense notamment à Régis Goddyn, le désormais célèbre auteur de la saga « Le sang des 7 rois »).
Les grosses maisons d’éditions ne m’auront soit pas répondu soit envoyé un refus préenregistré. La seule aventure que je regrette un petit peu et celle avec les éditions Mnémos, qui, je trouve, m’ont gardé en haleine pendant 9 mois, m’ont vraiment fait croire à un miracle pour finalement même pas m’envoyé une fiche de lecture…
C’est aussi sur ce forum que j’ai rencontré ma future éditrice, Virginie Didier, des éditions Boz’dodor. Elle se lançait dans l’aventure, j’ai été un de ses premiers romans et j’en suis très fier et très heureux de voir qu’elle continue à se développer encore aujourd’hui.

10 – Avez-vous d’autres projets d’écriture ? Pouvez-vous nous en toucher un mot ?

Oui, les idées et les envies foisonnent dans ma tête depuis la dictature aléatoire. Mon éditrice m’a proposé d’écrire un recueil de nouvelles. Je l’ai fait sur le thème de l’immortalité, mais en mélangeant plusieurs genres littéraires à l’intérieur d’une base« science-fiction ». Il est composé de quatre nouvelles : une sous forme de carnet de voyage, une sous forme d’un huit clos dans un hôpital, une pseudo-pièce de théâtre qui est en fait une satyre des émissions de télé-réalité et, pour finir, des paragraphes uchroniques. Si tout se passe bien, ce recueil intitulé « Immortalité en papier » pourrait sortir en fin d’année.
J’ai également le projet d’écrire une fable satyrique du système politique français. Le titre retenu pour l’instant est « La révolution des acariens ». Il est un peu tôt pour en dire plus sur ce roman, mais ce qui est sûr c’est qu’il s’écrit à quatre mains. Gros challenge.
J’ai deux autres projets qui sont des romans noirs, écrit à la première personne. Comme je l’ai dit je suis un touche à tout, je veux m’essayer à différents genres littéraires. Je rêverais d’écrire un roman dans la lignée de « J’irais cracher sur vos tombes » de Boris Vian, mais il y a là aussi de gros gros efforts à fournir.
Et puis je pense que je retournerais quand même à la science-fiction. Une idée a germé il y a plusieurs années. Un monde peuplé uniquement de femmes, des phénomènes climatiques qui engendrent des croyances très profondes, des personnages qui doivent retrouver une place dans des sociétés et des clans désorganisés, à la recherche d’un moyen pour pouvoir à nouveau se reproduire et entrevoir enfin un avenir : « Gamétopénurie ».

11 – Faites-vous des Salons Littéraires ? Dans lesquels aurons-nous la chance de vous croiser ?

Malheureusement je n’ai pas eu l’occasion de participer à des salons littéraires. Ici en Suisse je suis soutenu par les Magasins Manor (la version pauvre des galeries Lafayette françaises ^^) qui m’ont proposé des séances de dédicaces pour la sortie de la dictature aléatoire et qui attendent la suite selon leurs dires. Mais j’aimerais vraiment faire des salons, notamment le très plaisant « Livres sur les quais » de Morges.

12 – Merci beaucoup d’avoir répondu à ces quelques questions, je vous laisse la parole…

Encore une fois merci à vous pour l’invitation ! Je ne suis pas forcément de blog de lecture mais je trouve cette approche très positive. Si cela avait existé lorsque j’ai vraiment commencé la lecture pour mon plaisir, je pense que j’en serais devenu un adepte. On peut aller voir les critiques des classiques sur différents blogs, ça nous permet d’identifier ceux avec qui on partage les mêmes goûts et on peut suivre leurs progressions et les nouveautés qu’ils dénichent. Par votre passion et votre travail, vous donnez aussi la possibilité à de petits et modestes auteurs comme moi d’être découvert par de nouveaux lecteurs. Vous êtes un peu à la littérature ce que la vente directe chez le producteur est à l’agriculture et je vous en félicite !
Merci encore et comme on dit ici : Tout de bon !

Si vous désirez découvrir un peu Gabriel, n'hésitez pas à jeter un oeil sur FB ICI

Vous pouvez retrouver La Dictature Aléatoire sur Amazon ICI,  sur la FNAC ICI, ou encore mieux directement sur le site des éditions Boz'Dodor ICI