D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds – certains sont mêmes allés jusqu’à qualifier ce titre ridicule de poétique – entrecroise trois générations des habitants du village de pêcheurs islandais de Kefkavik : les ancêtres du narrateur vivant au début du XXème siècle à l’époque de la seconde guerre mondiale, l’enfance du narrateur sous occupation américaine et sa vie actuelle. Soit un tiers sublime : j’ai retrouvé dans les récits des pêcheurs d’antan la magie d’Entre terre et ciel ; un tiers traînant en longueur : l’enfance du narrateur servant de prétexte à l’écrivain pour replacer ces énièmes magnifiques phrases philosophiques au goût de déjà trop vu ; un dernier tiers carrément mauvais : l’époque contemporaine avec des tentatives érotiques caricaturales et salaces – après la finesse littéraire d’Anaïs Nin en la matière, il aurait été prodigieux qu’un quelconque écrit du genre m’impressionne. De cet ensemble déséquilibré, il me reste une farouche impression que l’auteur s’est reposé sur ses acquis, et que l’éditeur était trop pressé de publier un best-seller. Bref, j’ai terminé le livre par une lecture en diagonale, perdant le fil de l’histoire d’Ari et du pourquoi du roman. A trop espérer, on en devient aigrie – et peut-être un peu de mauvaise foi. Cela dit, il faudra argumenter longtemps et précisément avant que je ne choisisse d’ouvrir à nouveau un livre de Jón Kalman Stefánsson !
D’ailleurs, les poissons n’ont pas de pieds – Jón Kalman Stefánsson, traduit par Eric Boury
Gallimard, 2015, 443 p.
Première publication en islandais : 2013
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