"La littérature, vous devez le savoir, est un mensonge qui raconte la vérité."
Zoé Valdès s'intéresse ici à Dora Maar, photographe et peintre surréaliste connue surtout pour avoir été la maîtresse de Picasso, celle qu'il a peinte sous les traits de "la femme qui pleure"
La femme qui pleure Picasso
Zoé Valdés met l'accent sur une période bien précise de la vie cette "femme qui pleure" : quelques années après sa rupture avec Picasso, Dora Maar décide de passer quelques jours à Venise aux côtés de ses amis James Lord et Bernard Minoret deux écrivains homosexuels. Au retour de ce voyage, elle se retirera du monde pour vivre mystique et recluse dans son appartement parisien. Ce voyage intéresse l'auteure car il fut le dernier moment de bonheur de Dora.
Après neuf années de passion destructrice, neuf ans ponctués de dépression, d'enfermement en asile psychatrique, Dora sort profondément marquée par cette relation qu'elle ne pourra jamais effacer de son esprit :
"Elle l'avait conquis et lui, il l'avait soumise, pour la peindre, l'illuminer sur la toile et l'étouffer dans la vie." p. 189
"Ce que Picasso demandait aux femmes, ce qu'il réclamait de nous, c'était justement de renoncer au conventionnel, de renverser les barrières, de cesser d'être des femmes pour devenir des oeuvres d'art. Pour lui, nous devions danser pieds nus sur des rochers pointus, nous entaillant, saignant sauvagement." p. 234
Picasso apparaît comme un être tyrannique sans coeur, adepte des orgies sadiennes, et Dora semble être une victime prise dans les rets de cet homme qu'elle admire et aime profondément. Des aspects encore plus sombres du célèbre peintre apparaissent au fil des pages comme sa réaction quand Max Jacob, enfermé dans les camps lui demandera de l'aide en vain : "il tarda et ne fit rien".
C'est ainsi un portrait controversé de l'artiste que présente Zoé Valdès en contrepointe, même si son sujet était avant tout Dora Maar. Une fois encore Dora est résumée à sa relation avec Picasso, présentée comme une femme larmoyante qui ne peut se détacher de son puissant amour. Ces partis pris peuvent déranger le lecteur, qui ressent les hésitations de l'auteure naviguant dans le flou de témoignages divers et variés. De plus, la mise en scène de l'auteur en train d'écrire et de faire ses recherches brouille les pistes, apportant davantage de flou au roman. En résulte l'impression que Zoé Valdès n'a pas grand chose à dire de neuf ou mieux sur le sujet, elle tourne en rond et n'a finalement pas percé le "mystère" de Dora et de ce voyage à Venise...
Dora Maar par Man Ray
Présentation de l'éditeur : Arthaud
Vous aimerez aussi : Moi, Dora Maar de Nicole Avril
La femme qui pleure, Zoé Valdès, traduit de l'espagnol par Albert Bensoussan, Arthaud, septembre 2015, 414 p., 22.50 euros
Reçu dans le cadre d'une opération Masse Critique organisée par Babélio