Après une série d’images stupéfiantes de la surface de Pluton, New Horizons a transmis le 21 septembre des clichés en haute résolution de Charon. Ce monde deux fois plus petit que la planète naine qu’il accompagne apparait bosselé et crevassé de grands canyons. Autant de plaies et de cicatrices qui racontent une histoire violente et aussi complexe que celle de son voisin.
Le 14 juillet 2015, New Horizons qui après avoir traversé une partie du Système solaire jusqu’à la ceinture de Kuiper, à environ 5 milliards de km de la Terre (9 ans et demi de voyage), n’a pas seulement photographié Pluton à l’occasion de sa visite historique. La sonde en a bien sûr profité pour tirer le portrait de Charon, grand compagnon de cette dernière et aussi les autres petites lunes. Deux fois plus petit (1.214 km) que la célèbre planète naine, il détient le titre du plus gros satellite naturel relativement au corps qu’il accompagne. D’ailleurs, l’ensemble est considéré comme un système binaire.
On a déjà vu quelques images de Charon, prises quelques heures avant et après le rendez-vous du 14 juillet, mais celles transmises le 21 septembre par la sonde spatiale — actuellement distante de près de 100 millions de km de Pluton (New Horizons est en route vers sa prochaine cible qu’elle devrait atteindre en 2019) — dévoilent un monde aussi surprenant que son voisin avec plus de détails qu’auparavant. D’autres photos, en plus haute résolution, seront téléchargées au cours des prochaines semaines.
Charon photographiée par New Horizons le 14 juillet, juste avant le survol de Pluton. Les images prises à travers les filtres infrarouge, rouge et bleu de l’instrument Ralph/MVIC révèlent les différentes compositions des terrains. La région du pôle nord nommée Mordor Macula se distingue du reste de ce corps céleste, deux fois plus petit que son compagnon Pluton. La résolution est de 2,9 km par pixel. Téléchargez l’image en haute résolution ici (1,2 Mo)
Un monde cabossé
Ceux qui s’attendaient à voir un astre monotone, découvrent a contrario une corps tout cabossé dont la surface témoigne d’un histoire géologique complexe et relativement récente. L’une des premières choses qui frappe en devisant ce sphéroïde synchronisé avec Pluton, est ce long, large et profond canyon qui semble en faire le tour juste au-dessus de son équateur. Nommé Serinity Chasma, il se prolonge avec Macross Chasma (à gauche). Le réseau long de quelque 1.800 km est quatre fois plus important que notre Grand Canyon terrestre et rappelle aux géophysiciens de la mission, la grande balafre de Mars : Valles Marineris. C’est une énorme fracture qui semble diviser en deux la croûte de Charon.
Autres caractéristiques qui intriguent l’équipe scientifique, une certaine dichotomie entre la moitié nord séparée par le canyon et celle au sud. Cette dernière baptisée Vulcain Planum (les noms des reliefs de Charon ont été inspirés par des œuvres de science-fiction) présente davantage de petits cratères d’impact que celle au-dessus. Son apparence plus douce et lisse suggère un resurfaçage relativement récent. Certains chercheurs songent à l’œuvre d’un cryovolcanisme. « L’équipe discute de la possibilité qu’un océan interne ait pu gelé il y a longtemps, confie Paul Schenk de la Lunar and Planetary Institute et membre de la mission, le changement de volume qui en a résulté a pu conduire Charon à se fissurer, et permis à une lave à base d’eau d’atteindre la surface à ce moment-là ».
Ces deux mondes des confins du Système solaire ont vraiment beaucoup de choses à nous dire. Merci à cette mission qui nous ouvre de « nouveaux horizons ».