Le documentaire d'Aurine Cremieu est un bel hommage à l'aventure de la création du Service Photographique des Armées, mis en place en 1915 en faisant revivre les pionniers du reportage de guerre dans les tranchées de 14-18.
Ce conflit aura été le premier à être photographié. Etre photographe de guerre n'était pas encore un métier en 1914. On commence à recruter en 1915 alors que l'Allemagne a déjà organisé la propagande.
Ce qu'il rapporte est alors plutôt sur le registre de l'objectivité (du fait des temps de pose) que de la subjectivité à laquelle le numérique a donné accès. Quand les gens posent, ils prennent le photographe à témoin.
La grande différence avec le monde contemporain c'est aussi que tout le monde peut s'improviser photographe avec son téléphone portable. Cela change la donne. Mais, comme le souligne Patrick Chauvel "il faut que la photo soit belle, sinon ça ne passera pas".
Ce qui est original dans le documentaire présenté cette fois-ci est de faire le lien entre le passé et le présent. En sollicitant de grands reporters contemporains pour recueillir leur analyse la réalisatrice a réussi de ce fait à démontrer que la photographie avait toute sa place à la télévision.
Ces premiers reporters de guerre ont témoigné avec énormément de talent. Ils sont nombreux à "avoir fait une plaque", comme on dit encore aujourd'hui d'une photographie qui sort du lot.
Patrick Chauvel, Marie Dorigny, Éric Bouvet, Baptiste Giroudon, Alain Mingam, Samuel Bollendorff, Adjudant-chef Janick décryptent ces images en explorant les motivations de leurs "précurseurs". Ils en profitent pour nous parler de leur métier, de leur passion et de la nécessité d’aller sur le Front.
Du coup c'est davantage un film d'action qui nous est donné à regarder qu'une série d'images fixes. On comprend que dès le début du conflit la représentation de la Guerre état déjà pensée de diverses manières pour donner le point de vue des soldats, celui de l'arrière, celui des femmes, des civils ou encore celui du Patrimoine.
La sélection fut, on s'en doute, difficile parmi les 92 000 plaques répertoriées à l'Agence photo de la Défense. Elle semble couvrir toutes les situations. Certaines photos nous semblent familières et donnent envie d'aller fouiller dans les tiroirs de nos grands-parents.
On pourra quand même s'agacer que ce sont les dates des guerres que les enfants apprennent à l'école plutôt que celles des grandes découvertes... même s'il ne faut pas oublier que cette guerre a mobilisé plus de 8 millions d'hommes et fait plus de 9 millions de victimes, laissant ainsi une blessure indélébile dans les mémoires.
Sources iconographiques : ECPAD – Agence d’Images de la Défense, Magnum, Getty