J’ai deux scénario pour l’article que je souhaite produire cet après-midi. Disons, que mon propos pourrait prendre sa source dans ma chambre d’adolescent, il y a 25 ans quelque part à Brazzaville, au moment où l’album Straight Outta Compton secouait les Etats Unis au tout début des années 90. Mais, l’histoire pourrait aussi démarrer par une photo un peu spéciale que Serena Williams a posté sur son compte Instagram, pendant l’été quelques semaines avant l’US Open. Straight Outta Compton. Tel était le slogan de la championne de tennis. Celles et ceux qui suivent la carrière de Serena Williams avec attention connaissent l’histoire assez étonnante que Richard Williams, homme d’affaire africain américain accompli et vivant dans les quartiers résidentiels de Los Angeles, a imposé à sa famille. Alors qu’il avait formulé le voeu de faire de ses deux dernières filles des championnes de tennis, l’homme décida de déménager son clan à Compton, le fameux ghetto en plein coeur de la Cité des Anges. A la dure, Richard Williams a formé lui-même ses filles dans ce quartier, pour bien leur faire comprendre d’où elles venaient. Il est impossible de comprendre comment Serena Williams et sa soeur ont pu faire si souvent face à l’animosité de certains publics en Occident, si on ne comprend pas qu’elles sortent de Compton.
Un quartier qui leur a pris une de leurs soeurs aînées.
Donc la photo de Serena Williams, qui m’étonne toujours par cette forme d’impassibilité et de professionnalisme qui la caractérise à chacune de ses interventions publiques, a eu quelque chose d’intéressant et un message très fort. Ce qui va être intéressant, avec la viralité qui caractérise Instagram qui demeure à ce jour le réseau social le plus engageant, c’est de constater que le Straight Outta Compton n’était pas une émanation de Serena Williams, mais qu’elle n’a été un excellent vecteur de diffusion. Plusieurs centaines de milliers de personnes ont vu le fameux slogan. Pendant le mois de juillet sur Instagram, tout le monde venait de quelque part. En cliquant sur le hashtag #StraightOuttaCompton, je suis donc allé à la rencontre de l’épicentre de ce phénomène : Une vaste campagne marketing menée par les équipes de Dr Dre autour du film NWA : Straight Outta Compton. Pour moi qui me colle ces jours-ci aux pratiques du marketing digital, il n'y a pas meilleure illustration de ce qu’est une véritable campagne de content marketing avec les clés essentielles qui la caractérise : le storytelling porté par des influenceurs, l’engagement et la fidélisation du public. Car, on vient tous de quelque part comme dit le morceau de NWA, et l’histoire de ces cinq rappeurs est aussi intéressante que celle des Beatles de Liverpool. Le content marketing n’est jamais aussi efficace que lorsque le consommateur se fait ambassadeur de la marque. Aussi quand j’ai vu des facebookeurs réservés se mettre en scène avec un virulent Straight Outta Poto-Poto alors j’ai mesuré l’efficacité de la campagne et j’ai espéré que le film soit à la hauteur de cette stratégie digitale. Le produit était vendu.
Quelques chiffres sur les réseaux sociaux : 1,8 millions de likes sur Facebook, 25 millions de vidéos vues sur You Tube, 188 tweets. Mais je pense que ces chiffres ne sont pas significatifs puisque le film compte plus d’ un million pour sa page en français avec des niveaux d’engagement très bons. Un résultat en salle (US) de près de 150 millions de dollars.L’occasion m’était donnée par les plateformes numériques comme Deezer de me replonger dans l’album de NWA. Il faut dire que l’année où je passais mon bac, j’étais particulièrement fan du morceau chanté par Eazy-E, Express yourself! Avec sa tonalité si différente du rap New-yorkais qui dominait les débats à l’époque avec LL Cool J, Public Enemy, Run D MC et bien d’autres. Vous me direz, comment le son Hip-Hop circulait si facilement depuis Los Angeles, le SouthSide, South Central ou Brooklyn jusqu’à la chambre d’un adolescent congolais? On pourrait prendre une nuit sur les systèmes D des jeunes issus des classes moyennes africaines à vouloir se démarquer des productions musicales locales pour se connecter à un monde occidental qu’ils aspiraient rejoindre tôt ou tard. Le trafic de cassettes audio N-fois copiés était le moyen d'avoir le Son puisque je peux vous garantir qu’il n’y avait pas 10 albums de NWA sur tout le territoire congolais. Au-delà d’ « Express yourself », le côté savoureux de cette période était d’avoir la rareté, le morceau qui faisait la différence. Naturellement, ces sessions Deezer m’ont replongées dans une époque de ma vie où tout était en formation, où les livres prenaient autant de place que le rap et la soul music. Une époque qui précédera les temps douloureux que le Congo va traverser dans les années 90. C’est sûrement pour cela que d’une certaine manière mon horloge musical s’arrête véritablement en 1993.
Le parcours que je décris est d’une certaine manière ce qu’on appelle celui d’une relation client. Je ne divague pas. Alpaguer de la sorte, il me fallait connaître les dates de sortie du film sur Paris. Pour replonger dans cette époque mais surtout avoir une version de l’histoire de ce groupe précurseur dans le champ du rap américain. La boucle était donc bouclée. Les marqueteurs de Dre ayant fait leur job m’ont vendu une histoire à laquelle j’ai adhéré pour les raisons déjà évoquées. Il restait le film à voir...