Au printemps 2014, des familles de réfugiés syriens se sont posées à Saint-Ouen, dans une petite rue à quelques encablures du périphérique, d'où le maire William Delannoy s'est empressé de les chasser. Voilà comment elles se sont déplacées sous le pont du périphérique côté Paris.
Et voilà où depuis plus d'un an environ 200 personnes - dont une quarantaine d'enfants - survivent dans des conditions lamentables, abandonnées à leur sort par la ville de Paris et l'État. Comme dans tout groupe soumis à la plus grande précarité, des altercations entre différents groupes éclatent parfois entre les réfugiés et des personnes non syriennes mêlées à leur groupe autour des dons en vêtements, nourriture et argent que des personnes distribuent par solidarité. L'association Revivre qui les soutient depuis le début avait poussé à " une prise en charge avec les différentes institutions (OFPRA, France Terre d'Asile, Ministère de l'Intérieur) et alerté par courrier les différents acteurs de la nécessité d'anticiper une situation qui ne manquerait pas, compte tenu de la situation dramatique en Syrie, de se reproduire ".
Mais personne ne bouge. Sauf les forces de l'ordre qui viennent de temps à autre jeter les tentes inoccupées en l'absence de ceux qui sont parvenus à passer une nuit à l'hôtel grâce à la générosité citoyenne comme en témoigne le Collectif des réfugiés syriens de la Porte de Saint-Ouen : " Hier mardi 29 septembre 2015, les réfugiés qui avaient pu profiter d'une nuit ou deux en hôtel, sont revenus sur le camps. Or, la police et les services de voiries en ont profité pour venir arracher et jeter toutes leurs tentes avec toutes leurs affaires dedans. Il ne leur restait plus rien. Policiers et employés de la mairie étaient largement prévenus de ces absences via des membres du collectifs, veillant toujours à une bonne communication. Conséquence : hier soir, sur 90 réfugies laissé sur le carreau, 30 logeaient dans des hôtels, financés par des bénévoles ; 60 se sont retrouvés dehors, sans rien, avec interdiction formelle de reposer des tentes. A force de négociation, il a été possible enfin de remonter un bout de camp. Quoi qu'il en soit, le recensement est toujours en cours, sans aucune prise en charge du camp par les autorités. Une évacuation avec hébergement d'urgence promis est toujours en attente. "
Sur le camp, ni toilettes, ni douches. 20 Minutes constate que la sanisette la plus proche est hors-service. L'infirmier bénévole prodigue des soins. Galle, herpès, angines, diarrhées, et autres infections pullulent. " On reste suspendu à des décisions sanitaires imminentes et urgentes pour les plus vulnérables ", écrit le Dr. Patrick Bouffard, médecin à l'hôpital Bichat qui passe régulièrement sur le camp." Nous avons demandé qu'un bloc sanitaire soit installé, sans succès ", maugrée Olivier. Les réfugiés ont reçu des dons en grosse quantité, sans avoir de quoi les stocker [voir notre article Le don efficace est le fruit d'une générosité bien ordonnée]. " La situation sanitaire provient de là, des tas de vêtements et de restes alimentaires qui se sont entassés avec la pluie ", explique Olivier. Ces mêmes dons suscitent aussi des convoitises autour du camp.
Le collectif tente de réguler l'afflux en redirigeant vers les associations telles que le Secours populaire de Saint-Ouen. " Il faut passer évaluer les besoins et distribuer sur place au compte-gouttes ", estime Salima, membre du collectif.
Des collectes d'argent sont aussi en cours organisées par plusieurs soutien, sans réelles coordination : chacun tente de pallier aux défaillances des pouvoirs publics mais personne n'en a réellement les moyens.
Comment assurer à Paris et dans de bonnes conditions un hébergement d'urgence pour toutes les personnes en difficulté ? Anne Hidalgo, la maire socialiste de la capitale confrontée à un " afflux " de réfugiés, a décrit dimanche 27, un dispositif " saturé " dans la ville : " Nous sommes dans une saturation du dispositif d'hébergement à Paris. Tous les jours à Paris, ce sont 30 000 personnes qui sont hébergées dont environ 16 000 enfants. "
Invitée du " Grand Rendez-vous " Europe1- Le Monde-i-Télé, M me Hidalgo a expliqué qu'ont été " hébergés à Paris et en Ile-de-France plus de 2 000 personnes " depuis le début de l'année. " Nous avons poussé les murs, nous avons identifié des lieux, cherché de nouvelles adresses, tout le monde s'y est mis, la ville, l'Etat, les hôpitaux de Paris pour chercher ces places pour qu'il n'y ait pas de confrontation de public ", alors que l'hiver approche et que certaines associations craignent que les sans-abri pâtissent des efforts déployés pour accueillir des réfugiés. Face à ces inquiétudes, l'élue se veut rassurante et déterminée " Je le dis vraiment avec beaucoup de fermeté, je n'accepterai pas que les moyens que nous avons mis (...) ne soient pas mis à même hauteur pour le plan grand froid qui s'annonce et notamment pour l'hébergement des familles et des SDF. "Le préfet de la région Ile-de-France a annoncé jeudi que les sans-abri d'Ile-de-France bénéficieront de 2 500 places d'hébergement supplémentaires pour la période hivernale, qui vont s'ajouter aux 75 000 places ouvertes toute l'année. Parmi ces 2 500 places, au moins 1 100 sont à Paris. Bref, bien en deçà des places qui seraient nécessaires puisque 355.000 demandes d'hébergement pour SDF ont été formulées durant l'hiver 2013-2014 selon le baromètre du 115 - qui ne compte que les appels auxquels il a répondu - mais seulement 140.000 places ont été attribuées. Il va falloir les pousser beaucoup plus énergiquement, les murs !
Plusieurs campements ont été évacués ces derniers mois dans la capitale mais plus d'une centaine de migrants dont notamment des Syriens, campent encore porte de Saint-Ouen, au lycée de la Place des fêtes et ailleurs... Et puis des centaines de roms ont été expulsés au cours de l'été à Bobigny, Saint-Ouen, La Courneuve, bientôt Saint-Denis...
Alors, quand nos élus sortiront-ils de la politique du thermomètre et de cette illogique politique de la mise à l'abri dans des hôtels coûteux pour envisager de créer de petites structures permettant l'insertion des personnes qui vivent ici une misère épouvantable mais... moindre que celle qu'elles ont fuit ?
France 24 - 15 09 2015 La porte de Saint-Ouen est devenue depuis plus de 18 mois un point de ralliement pour les exilés syriens. Arrivés clandestinement dans l'Hexagone, certains fuyant la guerre qui ravage leur pays se retrouvent dans cette zone en bordure du périphérique, avant d'entamer des démarches de demande d'asile en France ou de tenter de gagner un autre pays européen. " Tout le monde sait que les Syriens se retrouvent porte de Saint-Ouen, c'est notre endroit" , raconte Dounia, qui a préparé son voyage en se renseignant sur Facebook. La jeune femme de 19 ans, au sourire franc, veut faire contre mauvaise fortune bon cœur. " On vit comme on peut ici pour l'instant, et un jour notre situation va s'améliorer " , assure-t-elle.Pour arriver en France, la route a été longue. Comme la plupart de leurs compatriotes du campement, Khadra et Dounia n'ont pas emprunté la fameuse route des Balkans. Avec leurs enfants, elles sont arrivées via l'enclave espagnole de Mellila, en ayant d'abord gagné l'Algérie par avion, depuis le Liban ou la Turquie. Sur la route de l'exil, la vie continue, Dounia a accouché de son fils Mohammed, aujourd'hui âgé de deux ans, en Algérie, et la petite fille de Khadra est née en Belgique il y a trois semaines. " Mon père et ma sœur ont demandé l'asile à Bruxelles, je suis allée leur rendre visite, et j'ai accouché pendant mon séjour là-bas " , raconte la jeune femme.
" Beaucoup de personnes viennent nous aider, nous apporter des vêtements, et à manger" , racontent les jeunes femmes. Avec les images des drames de l'immigration clandestine de l'été et surtout après la publication de la photo du petit Aylan noyé sur une plage turque, de nombreuses personnes ont voulu aider les réfugiés syriens. De l'aide spontanée, parfois non organisée par les associations. Mais au campement de la porte de Saint-Ouen, on ne sait plus quoi faire de tous ces vêtements reçus. " Regardez ce qui se passe !" , s'exclame Leila, montrant du doigt un tas de sac poubelles. La jeune femme de 24 ans explique que faute de moyen pour trier et ranger, ils entassent les vêtements dont ils n'ont pas besoin là-bas. " Nous n'avons pas besoin de ces choses, nous avons besoin d'aide" , pleure cette mère de quatre enfants. " J'ai laissé mes petits en Syrie avec leur père qui n'a pas osé quitter le territoire car il se cache, il est appelé à rejoindre l'armée. Je dois absolument régulariser ma situation pour qu'ils me rejoignent " , explique-t-elle.On regrette d'avoir choisi la France
Les démarches administratives sont un véritable obstacle pour eux. Difficile de constituer le dossier de demander d'asile, quand on ne connaît que quelques mots de français. Plusieurs associations et des anonymes viennent aider les réfugiés à remplir leurs papiers. Mais à ces sans-abri, il manque une adresse pour recevoir le courrier. " Il y a des personnes qui acceptent de domicilier le courrier chez eux" , raconte Ahmad, " mais ils nous demandent de l'argent en échange " , ajoute-t-il en baissant la voix." En Syrie on avait une situation et là on est obligé de mendier pour manger et se payer une nuit d'hôtel" , déplore Bilal, qui montre tristement sa carte de membre de la Chambre de commerce de Banias, ville du littoral syrien. " Je vendais des pièces de rechange pour voitures et j'ai aussi un permis poids-lourd " , explique-t-il. Il a fait sa demande d'asile et attend depuis huit mois la réponse de l'Office français pour les réfugiés et les apatrides (Ofpra). " C'est long et, en attendant, on est dans la misère, sans-abri et on ne peut pas travailler. Pourquoi ? "
" On a choisi la France, parce qu'elle s'est toujours dite amie de la révolution syrienne, mais nous regrettons tous d'être venus ici, où on nous traite pire que des animaux" , se désole Bilal, qui insiste sur le fait qu'il ne demande qu'à pouvoir travailler. " Personne ne nous entend " , s'indigne-t-il. Avec sa famille, ils sont une vingtaine de personnes de la même parenté, ils réfléchissent sérieusement à aller demander l'asile en Belgique. Dans le campement, se murmure en effet, qu'à Bruxelles, on accueille mieux les réfugiés syriens.
François Hollande a annoncé il y a une semaine que 24 000 réfugiés seraient accueillis en France au cours des deux prochaines années. Or, au campement de la porte de Saint-Ouen on s'étonne des facilités promises aux futurs arrivants, notamment les Syriens en provenance d'Allemagne et notamment accueillis dans un centre à Cergy, quand eux attendent un toit, malgré des demandes d'asile déposées il y a des semaines voire des mois. Au ministère de l'Intérieur, on assure toutefois que tous les demandeurs d'asile déjà présents sur le territoire seront inclus dans le dispositif qui se dessine, le seul préalable étant qu'une demande d'asile ait été déposée en France. " Il n'y a pas deux dispositifs ", affirme-t-on. " On va aussi chercher ceux qui sont déjà là. " Le dispositif d'accueil des demandeurs d'asile était jusque-là " notoirement sous-calibré ", reconnaît-on à l'Intérieur, où l'on rappelle que 4 000 places supplémentaires ont été ouvertes en 2013 et 2014 en centres d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada) et que 4 200 autres sont programmées pour 2015.
Libération 25 09 2015"Bienvenue à l'hôpital de campagne" : Patrick Bouffard, cardiologue à la ville, s'est reconverti depuis deux semaines en médecin d'urgence. Dans le campement de réfugiés de la porte de Saint-Ouen, dans le nord de Paris, il s'efforce de "sauver les corps". "C'est de la gestion désespérée, explique l'homme de 51 ans. On essaie de repérer les cas les plus préoccupants et d'éviter un drame." Le danger est partout sur le site, qui compte une soixantaine de tentes et abrite près de 150 personnes en majorité syriennes, dont plusieurs dizaines d'enfants en bas âge.
Sur place, contrairement aux autres campements de migrants qui ont poussé dans la capitale, la situation est électrique, chaotique. Dans les vapeurs des pots d'échappement, des gamins courent dans tous les sens. Un petit vient de faire tomber une babiole sur la route. Il regarde son jouet d'un air inquiet, semble hésiter à se lancer sur la chaussée pour le récupérer. Un bus finit par rouler dessus et le faire disparaître.
Entre les adultes, les embrouilles sont récurrentes. Le ton monte régulièrement, notamment au moment des distributions de nourriture et de vêtements. L'endroit voit les pauvretés se rencontrer. Des Roms et des sans-abri s'y rendent pour récupérer quelques dons. Parfois, les Syriens louent des voitures aux premiers pour y stocker leurs effets personnels.
" On ne peut pas soigner les gens dans cette fange "
Les biens de première nécessité ne manquent pas. Des fringues pourrissent même dans une poubelle, des aliments prennent l'eau dans le caniveau. Depuis une semaine, les riverains et membres d'associations se sont mobilisés pour venir en aide aux habitants de ce camp de fortune, dont les effectifs ont subitement grossi après l'expulsion d'un square dans la ville voisine de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). Mais l'organisation manque. Une bénévole, habitante du quartier, soupire : "Ici, c'est la loi du chacun pour soi. Il n'y a pas beaucoup d'entraide."
Une précarité entretenue par les conditions déplorables dans lesquelles les Syriens tentent de survivre. Installé sur d'un terre-plein central réservé aux bus de la RATP et le long du périphérique, le campement est soumis à trois dangers : le ballet incessant des véhicules, l'humidité piquante d'un mois de septembre pluvieux et une hygiène inexistante. Sur place, pas de toilettes, encore moins de douches. "On ne peut pas soigner les gens dans cette fange", pointe Patrick Bouffard. Tant bien que mal, il tente, avec deux autres toubibs bénévoles et une équipe mobile de Médecins du monde, d'orienter les cas les plus préoccupants vers les hôpitaux.
" Formule 1 "
La gale a déjà été diagnostiquée. Les plus âgés ont besoin de traitements pour des pathologies cardiaques ou diabétiques, comme Mahdi, Syrien âgé de 78 ans. Venu de Banias, une ville côtière située entre Tartous et Lattaquié, il attend sa prescription. Mais c'est surtout pour les bébés que le médecin s'inquiète : "En quatre heures, une gastro peut emporter un nourrisson." Il y a un mois, Radhia a donné naissance à une petite fille à l'hôpital d'Argenteuil (Val-d'Oise). Ce jeudi soir, elle est revenue s'abriter quelques minutes sous sa tente, tenant son bébé emmitouflé dans une couverture. La jeune Syrienne glisse un mot : "Formule 1." Heureusement, tous les soirs, une bonne âme lui paye une nuit à l'abri, à l'hôtel.
L'autre grand défi de Patrick Bouffard, c'est de repérer les femmes enceintes. Ce jeudi, raconte-t-il, "on a cherché toute la journée une dame qui en est à huit mois de grossesse". Elle a eu un écoulement. Par chance, "on l'a finalement retrouvée, elle est partie à l'hôpital". Il se félicite des bonnes relations avec les équipes des urgences de Bichat, situées à deux pas de là. Les victoires sont parfois modestes : "Lundi, on mettra en place une chaîne de décontamination de la gale. Les gens iront à l'hôpital, ils auront une douche, un traitement, des vêtements propres." Le médecin marque un temps d'arrêt : "Bon, s'ils reviennent ici et que les matelas sont toujours infestés..."
Impasse juridique
Confrontés à cette misère criante, les habitants du campement semblent déboussolés. Nisar, un Syrien de 30 ans, a fui Homs quelques mois après le début de l'insurrection contre Bachar al-Assad. Comme beaucoup de ses compagnons, il a d'abord connu les camps du Haut Commissariat aux réfugiés en Turquie, avant de rejoindre l'Europe. Avion pour Alger, puis trajet jusqu'à Ceuta, où il est parvenu à entrer en Espagne. Lui a demandé l'asile à Lille. Cela fait maintenant un an qu'il attend une réponse. "Ça dure trop longtemps", déplore-t-il.
D'autres sont victimes du règlement de Dublin, qui impose aux migrants de déposer leur demande d'asile dans le pays de première entrée. Porte de Saint-Ouen, ils sont nombreux à avoir été enregistrés en Espagne et à se retrouver, pour l'instant, dans une impasse juridique. Moustapha, la vingtaine, a eu plus de chance. Ce Syrien de Lattaquié est en France depuis un mois. Jeudi, il est parvenu à déposer sa demande d'asile à la préfecture. Il espère s'extirper au plus vite de la rue et reconstruire sa vie ici.
État des lieux
Du côté de la mairie de Paris, on dit avoir conscience de l'urgence de la situation. La porte de Saint-Ouen est connue comme un point de ralliement pour de nombreuses familles syriennes depuis deux ans, mais jusqu'à il y a dix jours, trop peu de gens y vivaient pour entraîner une réponse rapide. D'autant que les autorités, dans le même temps, étaient mobilisées sur les évacuations d'Austerlitz et de la mairie du XVIIIe arrondissement.
Les choses ont changé, assure désormais la municipalité. "Nous sommes en train d'effectuer un état des lieux. Mais il y a beaucoup de cas administratifs compliqués." Un bénévole râle : "Les migrants ne sont même pas au courant de ce travail de recensement. Il ne suffit pas de se poser au milieu du camp et d'attendre que les gens viennent vous voir." Autre défi : trouver des places d'hébergement disponibles. Il y a urgence, selon Patrick Bouffard. "C'est de la non-assistance à personnes en danger. On ne tiendra plus longtemps comme ça."
France 24 - 29 09 2015Que se passe-t-il au campement de migrants de la porte de Saint-Ouen ? Dans le XVIIIe arrondissement, dans le nord de Paris, des migrants syriens ont depuis plusieurs mois posé leurs tentes, faute d'hébergement. Alors qu'il ne comptait que 80 personnes environ, de nouvelles arrivées, la semaine dernière, ont grossi le camp de fortune, suscitant un regain d'intérêt médiatique.
La situation est unique en son genre, notamment après le démantèlement des campements situés quai d'Austerlitz et face la mairie du XVIIIe arrondissement, où vivaient près d'un millier de personnes. Plusieurs voix se sont élevées, notamment dans les milieux associatifs, pour interpeller les autorités et demander pourquoi des migrants syriens restaient dans la rue.
Un afflux ponctuel au moment de l'Aïd Évoquant " un nombre impressionnant de personnes" , la mairie de Paris a affirmé à France 24 en avoir recensé 160 sur place, jeudi 24 septembre. Il s'agit, selon elle, d'un " campement atypique fait d'une population de Roms originaires de Syrie, des personnes itinérantes" . " C'est un phénomène qu'on a déjà rencontré à Paris, ils viennent au moment de la fête musulmane de l'Aïd [qui avait lieu jeudi, NDLR] ", poursuit le responsable à la ville de Paris. Selon lui, ils ne souhaitaient pas être hébergés car ils repartaient quelques jours plus tard. Et de souligner que l'État avait déjà pris en charge 2 200 personnes depuis début juin. " Il n'y a environ qu'une trentaine de personnes à la porte de Saint-Ouen qui souhaitent réellement être prises en charge, donc hébergées " . Pour l'heure, les autorités attendent que le nombre de personnes se stabilise.Des évolutions que confirme à France 24 Fadi, bénévole de l'Association franco-syrienne, qui vient en aide aux migrants et réfugiés syriens dans la région parisienne. Ces dernières semaines, il s'est rendu très régulièrement porte de Saint-Ouen, et a lui aussi constaté " un nombre immense de personnes au moment de l'Aïd " . Sur place, mardi, il n'en a vu qu'une trentaine à peine. " Les personnes encore là-bas étaient déjà là il y a plusieurs semaines. Les autres sont parties. Certaines étaient là uniquement pour quelques jours, les autres étaient là depuis longtemps mais ont décidé de partir car les choses n'avançaient pas pour elles " , raconte-t-il. Il affirme en outre avoir vu des forces de l'ordre retirer les tentes inoccupées.
Il n'en reste pas moins que la situation dramatique de ce campement est antérieure à cette période particulière de l'Aïd. Apparu pour la première fois en mars 2014, puis démantelé après une régularisation exceptionnelle des migrants syriens présents alors, il est réapparu début 2015. La porte de Saint-Ouen est devenue depuis plus de 18 mois un point de ralliement pour les exilés syriens. Arrivés clandestinement dans l'Hexagone, ils se retrouvent dans cette zone, avant d'entamer des démarches de demande d'asile en France ou de tenter de gagner un autre pays européen.
Le manque d'encadrement des migrants génère une situation confuse" C'est vrai que ces dernières semaines, il y avait tout et n'importe quoi là-bas" , explique Fadi. " Dans la rue, et après la médiatisation dont ils ont fait l'objet, beaucoup de monde leur a apporté de l'aide, tant et si bien qu'ils avaient trop de vêtements et de produits. Des personnes sont même venues sous mes yeux distribuer de l'argent dans des enveloppes" , raconte-t-il. " Normal que cela attire des gens qui veulent en profiter aussi" , sourit le jeune homme, soulignant que les vêtements apportés en surplus et qui ont fini sous la pluie avec les ordures auraient pu servir à d'autres qu'eux, si l'aide avait pu être canalisée " par une ou deux associations " .
Mais pour Fadi, ce " flou " est la conséquence " d'un manque criant d'encadrement de la part de l'État, notamment au niveau de l'accueil. [...] S'il y avait un endroit précis pour accueillir les migrants qui souhaitent demander l'asile en France, ils ne seraient pas devenus des sans-abri et on n'aurait pas connu cette confusion. S'ils ne connaissent personne ici, ils ont besoin d'être orientés et accompagnés dans leurs démarches administratives. Or, en France, on n'a pas ce genre de structure ou d'endroit, contrairement aux pays nordiques " , regrette le jeune homme. Sceptique, il estime que sans action de l'État dans l'accueil des migrants, même si le camp de la porte de Saint-Ouen disparaît d'ici quelques jours, une situation similaire va nécessairement se répéter.
La capitale est en effet confrontée depuis plusieurs mois à un afflux inhabituel de migrants, en majorité des Syriens fuyant la guerre qui ravage leur pays depuis plus de quatre ans et demi. Nombre d'entre eux sont hébergés par des proches, ou logés à leurs frais. D'autres ont trouvé refuge dans des centres d'hébergements d'urgence en attendant de déposer une demande d'asile. Cette démarche faite, ils peuvent en théorie obtenir une place en Centre d'hébergement pour demandeur d'asile (CADA). Près de 500 autres encore squattent le lycée désaffecté Jean-Quarré dans le XIXe arrondissement, mais le tribunal administratif leur a ordonné vendredi de quitter les lieux dans un délai maximum d'un mois.
Des paroles et des actes - 25 09 2015