En entrant dans le Centre d’Art contemporain La Traverse d’Alfortville, ce qui me frappe d’abord, c’est le blanc. Blanc des murs, blanc de la plupart des oeuvres présentées, comme si on avait effacé toutes les traces de ce qui a précédé. Pourtant des papillons tentent d’imposer leur bleu sur le mur à droite de l’entrée, de ces papillons qui reviennent quand on les chasse. Et, dans l’angle de l’escalier, plus terrible, un pendu, intitulé Armenian Portrait 1915, ce qui marque un tournant de l’histoire.
Il n’empêche, le blanc domine, non plus alors pour effacer, mais pour y écrire ou y projeter des images. C’est la première fois que, dans ce lieu, sont montrées des vidéos. On va jusqu’au fond, attiré par une voix enfantine chantant en français. La fillette est dans l’encadrement d’une porte, et répète « Je suis malade ». Quelque chose m’intrigue, le texte accompagnant la vidéo précise que l’enfant ne comprend pas le français… Ainsi, la répétition devient lancinante, « Comme quand ma mère sortait le soir… », renvoyant à la mémoire de l’enfance d’un autre que je ne peux comprendre ne l’ayant éprouvée.
Et cet air dans la tête me raccompagne dans la première salle. Le texte du dernier article de Hrant Dink, paru le jour de son assassinat, est ici désarticulé : il sort d’une presse, mais les lettres ont été regroupées selon leur nature et non plus formées en mots. Comment rétablirons-nous ce texte ? Saurons-nous le recomposer ? Il y a tous les éléments pour y parvenir mais qui se mettra à cette tâche si brutalement interrompue ?