~~Nuits d'amour avec un bourreau d'enfant
D'après LE MAL D'ANDRÉ (24 juillet 1883)
François de Chaumont, jeune et beau capitaine, courtisait depuis deux mois Mathilde, la femme du notaire de Sotteville-lès-Rouen.
Un dimanche, ce notaire annonça à sa femme : " Je prendrai ce soir l'express de 20 heures 10 pour Paris. L'affaire d'héritage dont je t'ai parlé est plus compliquée que prévu. Le fils aîné veut me voir d'urgence demain matin à son bureau des Champs-Elysées et me demande de fixer des rendez-vous à différents membres de sa famille. Je serai donc absent une bonne partie de la semaine. Prends bien soin de toi et de notre bébé. "
À peine le notaire était-il parti que Mathilde fit venir son amant chez elle. Une demi-heure après, elle cédait à sa prévenance. Toutefois, elle lui recommanda :
-" Chéri, ne fais surtout pas de bruit car mon bébé, André, dort derrière cette cloison et il a le sommeil léger. "
Mais, trop empressé, le capitaine laissa son baudrier tomber par terre. Aussitôt réveillé, André se mit à brailler.
-" Quand André pleure ainsi, mon mari le prend dans notre lit. Et là, il se calme rapidement. Je vais le chercher, si tu permets "
Coincé entre sa mère et le soldat, André se rendormit rapidement. Mathilde se leva et alla le recoucher.
La nuit suivante, les soubresauts amoureux des deux amants firent grincer le lit. Aussitôt, l'importun bébé se mit à hurler. Mathilde s'élança, prit le nourrisson dans ses bras et le coucha entre elle et Chaumont qui, furieux, s'écria :
-" Va-t-il enfin se taire ! "
Discrètement, entre deux doigts, le capitaine pinça la cuisse du rabat-joie. Lâchant cette première prise, il saisit un bourrelet du ventre, le serra, tordit un quart de tour et fit de même avec un autre morceau de chair. Puis il répéta encore plusieurs fois son geste de torture. André poussait des cris aigus, semblables à ceux du porcelet placé sous le couteau d'un égorgeur. Il devint violet et vibrait de mille secousses. La mère tenta de l'apaiser. Et, d'une voix douce, le capitaine conseilla à Mathilde :
-" Maintenant, remets André dans son berceau. Je suis certain qu'il va retrouver son calme. " André s'apaisa en effet très vite, et les amants purent s'aimer le restant de la nuit.
Le lendemain, au moment de rejoindre Mathilde déjà couchée, François, inattentif à la consigne, entama d'une voix de stentor le refrain d'une chanson gaillarde. André se réveilla aussitôt et se mit à crier. Mathilde alla le chercher, et le sadique capitaine le tortura de nouveau. Il le pinça si vivement que le bébé suffoquait, s'étranglait, écumait. Puis, à la demande de son amant, Mathilde le recoucha. L'instant suivant, André s'était calmé et ne réclamait plus, mais plus du tout, le lit maternel.
Les deux nuits suivantes, le capitaine put aimer sa belle, ...sans être importuné.
Le jeudi soir, sitôt rentré, le notaire remplit son devoir conjugal puis demanda à voir son fils :
-" Ma chérie, sois gentille, installe André dans notre lit, comme d'habitude. Je suis si heureux quand il est entre nous deux. " Dès qu'il fut blotti entre Mathilde et son mari, André se mit à trembler et pleurer à grosses et chaudes larmes. Voulant le consoler, le notaire le prit dans ses bras et s'aperçut aussitôt que son petit corps était marbré de taches bleues :
-" Mais, qu'est-ce qu'il a ? Mathilde, regarde ! Il est sûrement malade. Fais venir le docteur Clausade. "
Assez crispée, Mathilde laissa échapper :
-" Oh ! Le misérable !... "
-" Quel misérable ? De qui parles-tu ? " -" Rien. C'est...vois-tu..."
-" Je devine, c'est Mlle Dulac. André a du faire une colère et cette misérable nourrice l'a mis au supplice. "
Le notaire la convoqua. Elle nia. Il la congédia.