Last but not least, Rock en Seine 2015 touche à sa fin, et l’on espère que ce troisième et dernier jour va nous offrir un final grandiose. Malgré le luxe, le calme et la volupté de notre couche, force est de constater que l’ankylose gagne progressivement l’intégralité de nos membres. Qu’à cela ne tienne, le soleil au zénith et la programmation alléchante dissipe en un clin d’œil notre morosité passagère. Dimanche oblige, le festival ouvre ses portes dès 14h et se termine à 23h30 dernier carat. Afin de couvrir intégralement l’événement on sacrifie notre pause déjeuner pour ne pas perdre une miette du premier concert.
L’oréal attitude!
A l’instar de nos corps usés, le domaine de Saint Cloud s’est transformé en véritable champ de bataille labouré méticuleusement par les hordes de festivalier. Une atmosphère de fin du monde qui sied à ravir à Kadavar. Pilosité abondante, tignasses soyeuses, les berlinois balancent du bon vieux rock bien rétro. Musicalement les hommes de Cro-Magnon ne réinventent pas la roue mais envoient des riffs touffus et solos de batterie made in 70’s. La performance la plus rock’n’roll du festival, assurément.
Le cagnard tape allègrement, et on se dirige vers la scène pression live en espérant trouver un peu d’accalmie avec le rock psychédélique de Pond. Annoncé sur le site, on constate sur le terrain que cette journée est « sold out ». On regrette le faible nombre de point d’eau en décalage complet avec le magma de festivaliers. Technique infaillible testée et approuvée par Toute Ouïe : simuler la pause pipi afin de squeezer la « queue point d’eau » et pouvoir se diriger directement vers les lavabos des toilettes !
Arrivé à notre point de chute, on est surpris par la popularité du groupe. La plus petite scène du festival est archi-comble et il est extrêmement difficile de se frayer un chemin parmi la foule. On se résigne à vivre ce moment à l’ombre d’un chêne. Les australiens livrent une expérience sensorielle de haute volée. Une pop psyché avec des envolées instrumentales « pinkfloydiennes » stratosphériques ne sombrant jamais dans le masturbatoire. On apprendra par la suite que le jeu de scène n’était pas en reste, avec un Nick Allbrook perché et communicatif qui a emmené son public au nirvana.
I Love Rock n’Roll
On se laisse convaincre d’aller voir le phénomène rock made in France de ces derniers mois, on a nommé Last Train. Les gars débarquent sur scène en toute humilité accompagnés par les chœurs d’Ennio Morricone… Les mulhousiens semble connaitre leur guide du parfait petit rockeur sur le bout des doigts. Enveloppés de leurs cuirs noirs cintrés, mèches nonchalantes virevoltantes, on a affaire des poseurs professionnels. Il ne faut cependant pas se fier qu’aux apparences et il s’avère que les gamins envoient du bois et pas qu’un peu. Les membres dépensent sans compter, une rage communicative, à fleur de peau, sublimée par la voix rocailleuse du chanteur. On reste pantois devant tant de maturité et on en oublierait presque la moyenne d’âge du groupe qui n’excède pas la vingtaine. A n’en pas douter, un grand groupe en devenir !
La pause bière s’impose et nous permet de déambuler dans des lieux jusqu’à lors inconnus. On parle ici de de la scène Ile de France. Petite pépinière à talents francophones, le chapiteau a vu passer des artistes significatifs qui explosent aujourd’hui (Jeanne Added, Feu! Chatterton, Housse de Racket…). Sous un soleil de plomb, la configuration fermée n’est pas des plus propices et transforme le lieu en véritable sauna. C’est de l’extérieur qu’on profite du son rafraichissant de Maestro. En dignes héritiers de LCD Soundsystem, la formation distille une électro pop soignée, taillée pour le dance floor. Un amuse-bouche des plus appréciables en attendant le plat de résistance Hot Chip.
Ready for the Floor
C’est le pied assuré et le bassin prêt à déhancher que l’on s’impatiente de l’arrivée de nos « puces chaudes ». Sapés comme des clodos, le groupe débarque et l’on est conquis dès la première note de Huarache Lights. Alchimie improbable, on est littéralement envouté par cet indescriptible spleen dansant sublimé par le non charisme et la voix lancinante d’Alexis Taylor. Qui plus est, c’est l’anniversaire de la (ravissante) nouvelle batteuse. C’est en mode « vocodé » que le groupe lui fait honneur en guise de préambule à leur tubesque Ready for the floor. Le soleil se couche paisiblement, la fête est déjà sur le point de se terminer. Las, on se délecte de l’orgasmique final jusqu’à la lie !
Le psychédélisme australien est à l’honneur aujourd’hui, après Pond il est temps de retrouver les « stars » de ce festival : Tame Impala. Placardé à tout bout de champ dans le métro parisien, récente couverture des Inrocks, le groupe a le vent en poupe, c’est indéniable. Couronnes serties de fleurs et accoutrements hippies chic semblent être le dress code du public présent en masse. Kevin Parker arrive sur scène petons à l’air et cheveux aux vents. On passe un agréable moment sans plus. La faute peut être au jeu de scène minimaliste du groupe ou à la redondance de l’ensemble. Malgré la communion avec le public, scandant la quasi intégralité de leurs tubes, la sauce ne prend pas et on en vient même à regarder sa montre pour le prochain concert…
Tame Impala
Consommation, consumation, on ne résiste pas à l’envie de claquer quelques deniers dans des goodies du festival. Déception du public, les stands de « merch » sont peu nombreux et avec un choix très limité. La thématique « jungle » était pourtant l’occasion de proposer des objets atypiques, on se contentera d’un T-shirt peu inspiré…
On se fait happer par les bonnes vibes qu’envoient Jungle depuis la scène de la cascade. La formation anglaise de nu-funk dégage une joie de vivre l’instant communicative. La voix soul du chanteur est au diapason et les choristes/musiciens ne sont pas en reste pour notre plus grand plaisir. Un super moment !
Réaction épidermique instantanée, frisson qui parcourt l’échine, il est déjà trop tard on vient d’attraper le virus Alt-J. Subjugué par leur prestation aux Eurocks en 2013, la magie opère à nouveau. Les ténèbres leur siéent à ravir, un halo rouge mystique enveloppe le quatuor et on l’on vit une nouvelle fois un instant de grâce. La voix nasillarde du chanteur ne plaira pas à tout le monde mais elle fait partie intégrante de l’identité du groupe. Joe Newman pourrait d’ailleurs s’enfermer dans sa tour d’ivoire, tel un gourou au milieu de ses fidèles. Bien au contraire, le garçon va, avec un français approximatif, interagir régulièrement avec la foule. En synthèse: « une immense espérance a traversé la Terre ».
Chemical Brothers
Rebelote, on décide pour finir en transe de se reprendre un rail de Chemical Brothers. La précédente prestation aux Eurocks 2015 nous avait laissé sur un bon trip malgré un son excessivement puissant et quelques baisses de rythme sur l’intégralité du set. Pestacle son et lumières calibré au bip près, on a joué au jeu des 7 différences et on a assisté à la copie carbone du précédent show.
Bilan comptable, pour cette 13ème édition, de Rock en Seine 2015 : près de 120 000 festivaliers sur 3 jours. Un succès incontestable pour un festival qui le mérite.
On reviendra, c’est promis !
Mots et photos de Lazy Pete