UN PEU D’HISTOIRE… ET FOCUS SUR LEUR SAISON 2015
L’ex Castrais Kees Lensing, ancien taulier des Welwitschias
La Namibie est depuis plus de 15 ans la seconde nation rugby en Afrique derrières les intouchables Springboks. Les deux pays sont bien entendu très liés, la Namibie ayant obtenu son indépendance de l’Afrique du Sud il y a seulement 25 ans après avoir s’être appelée South-West Africa à la fin de la colonisation Allemande en 1915. Longtemps simple province de Currie Cup (aucun titre au compteur, leur meilleur résultat étant une 3e place), la sélection Namibienne a fait sa première apparition en Coupe du Monde en 1999 et n’a depuis manqué aucun tournoi. On se souvient surtout des Welwitschias suite à leur défaite record en 2003 à Adelaide face aux Wallabies sur le score de 142 à 0… Quatre ans plus tard, après une défaite d’entrée face à l’Argentine à Saint Denis, le XV de France écrase les Namibiens sur le score 87 à 10 à Toulouse, permettant ainsi à Sébastien Chabal de rajouter quelques secondes à ses tributes YouTube. Outre ces faits marquants, le bilan est faible avec 15 défaites en autant de rencontres, 144 points marqués pour 974 encaissés. Kees Lensing (passé par Castres, Leeds, les Bulls et les Sharks), Piet van Zyl (passé par Bourgoin et les Cheetahs) ou Jacques Nieuwenhuis (qui signera à Aurillac en 2008) sont les quelques joueurs aujourd’hui retraités ayant percé professionnellement les années précédentes. La génération actuelle profite cependant plus de la globalisation du rugby ce qui tire vers le haut la sélection nationale.
Les Namibiens étaient déjà présents lors du Mondial 2007 en France
L’ancien Briviste et Racingman Johannes Coetzee a débuté avec la Namibie en 2015
Pourtant, avec l’aide de World Rugby et de son voisin Sud Africain, la Namibie a progressé ces deux dernières années. Reléguée en seconde division Africaine en 2012, risquant ainsi de manquer sa qualification pour le Mondial actuel, empêtrée dans des soucis financiers par manque de sponsors, la Namibie revient de loin. Mais elle a prouvé qu’en présence de ses meilleurs éléments, elle reste la nation Africaine numéro 1 (hors Boks) avec ses titres en Africa Cup 2014 et 2015. Les voyants semblent d’ailleurs au vert pour la suite avec une participation d’ores et déjà annoncée d’une province nationale à la prochaine Currie Cup (format étendu mixant Vodacom Cup et actuelle Currie Cup). Leur saison 2015 a toutefois été difficile car, hormis trois victoires probantes en Africa Cup face à la Tunisie (22-14), au Kenya (46-13) ainsi qu’au Zimbabwe (80-6), la Namibie a complètement manqué sa Nations Cup 2015 avec des défaites face aux Jaguars Argentins (30-10), à la Roumanie (43-3) et surtout l’Espagne (20-3). Les deux victoires à domicile face à la Russie (39-12 et 45-5) restent anecdotiques. Difficile de savoir quel visage va nous proposer la Namibie dès ce soir. Des progrès semblent toutefois visibles depuis le départ (ou l’éviction) de Danie Vermeulen à la fin de la Nations Cup remplacé depuis par un staff plus expérimenté.
LE STAFF TECHNIQUE
La Namibie était, il y a encore quelques semaines, entraînée par l’ancien Dacquois Danie Vermeulen. Ce dernier a démissionné (ou a été poussé vers la sortie) après les mauvais résultats obtenus en Roumanie lors de la Nations Cup. Après un échange d’amabilité avec le président de sa fédération, on ne sait toujours pas qui est “responsable” de cette mini crise. Son adjoint en charge des arrières Walter Don a également démissionné. Nommé conseiller technique pour superviser l’équipe nationale ainsi que la franchise des Welwitschias en Vodacom Cup, le Gallois Phil Davies a hérité du poste de sélectionneur national. Un choix qui semble toutefois prémédité! L’ancien deuxième ligne du XV du Poireau (46 sélections entre 1985 et 1995) a auparavant entraîné son club de toujours, Llanelli puis les Cardiff Blues. Pas le plus gros CV de technicien sur le marché!
Phil Davies et Pieter Roussouw (à gauche) accompagnés d’autres membres du staff devant le Millenium Stadium de Cardiff
Ce qui n’est pas le cas de l’entraîneur des arrières qui a été retenu pour accompagner l’équipe en Europe! Pieter Rossouw, ancien ailier des Springboks (43 sélections entre 1997 et 2003), a débuté sa carrière de coach au seins de l’académie de la Western Province avant de se voir nommer au poste de backline coach des Bulls en 2008. Il a quitté la franchise de Pretoria à la fin du dernier Super Rugby pour retourner vivre à Cape Town (et potentiellement rejoindre les Stormers). Un des meilleurs à son poste en Afrique du Sud. Henry Kemp, ancien talonneur passé par les Bulls en Super Rugby et les Pumas en Currie Cup s’occupe des avants alors que Wayne Proctor, ex international Gallois (39 sélections entre 1992 et 2001) s’est occupé de la préparation physique des joueurs.
LES CADRES DE L’EQUIPE
Rassurez-vous, je ne vais pas vous faire l’affront de présenter des joueurs que je ne connais pas évoluant dans les clubs locaux de Windhoek. Cependant, si ces joueurs constituaient la majorité des squads Namibiens lors des précédents tournois, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Honneur au capitaine, la star de l’équipe, qui est bien entendu Jacques Burger, incontestable meneur d’homme et brillant flanker qui ferait le bonheur de nombreuses nations plus huppées. Troisième ligne rugueux et agressif, plaqueur infatigable, il n’a rien à envier à son homonyme Schalk. Peu épargné par les blessures comme en atteste son visage très marqué, il souhaite conclure sa carrière internationale sur une belle performance quasiment à domicile pour celui qui évolue à Londres depuis 2010. Rappelez vous qu’il a terminé dans la liste IRB des 5 meilleurs joueurs de l’édition 2011!
Jacques Burger, un des 5 meilleurs joueurs du dernier Mondial
Renaldo Bothma est l’une des révélations du dernier Super Rugby
Mais d’autres joueurs, certes plus discrets, sont aussi titulaires au sein de franchises de l’hémisphère Sud. Je pense en premier lieu au talonneur Torsten van Jaarsveld, vice capitaine des Cheetahs, qui nous avons élu comme second talonneur du Super Rugby 2015, l’une des rares satisfactions à Bloemfontein grâce à sa grosse défense et ses nombreux placages. Capable de dépanner en 3e ligne, il est omniprésent dans les regroupements où ses qualités de gratteur son reconnues. Prêté par les Pumas (de Nelspruit dans le Mpumalanga) aux Sharks, Renaldo Bothma est le second Welwitschia à évoluer en Super Rugby. Utilisé comme impact player en équipe nationale cette saison, aussi bien en troisième qu’en seconde ligne, il a été titularisé à 13 reprises cette année avec la franchise de Durban, ou il a été une des rares satisfactions entant qu’openside flanker. Ses skills et son explosivité ont frappé les esprits lors des belles performances des Pumas dirigés à l’époque par Jimmy Stonehouse.
Joueur discret, Torsten van Jaarsveld est pourtant l’un des meilleurs talonneurs d’Afrique du Sud
Titulaire avec les Lions en 2013 et 2014, Chrysander Botha évolue désormais à Exeter
Nous retrouvons également plusieurs joueurs en Europe et en particulier en France. Burger ne se rendant pas fréquemment disponible en équipe nationale, Pieter-Jan van Lill est l’autre capitaine de la Namibie. Ce dentiste passé par la University of Stellenbosch et ses prestigieux Maties a posé ses valises à Dax en début de saison dernière après une arrivée ratée à Aurillac à la suite du Mondial 2011. Polyvalent au sein du backrow, Davies semble également compter sur lui en seconde ligne, un poste où il n’a jamais évolué! Il rejoindra l’Aviron Bayonnais dès la fin du tournoi Mondial. Bien que ne faisant plus partie de l’effectif 2015-16, le pilier Aranos Coetzee et le 2e ligne Tjiuee Uanivi ont porté les couleurs du CA Brive ces trois dernières saisons. Si Coetzee a régulièrement foulé le pré, les apparitions de Uanivi ont été plus rares. Les deux joueurs se sont toutefois directement installés dans le XV de départ en équipe nationale. Après des débuts avec la Western Province et les Pumas en 2010, Conrad Marais a rejoint l’Hérault au début de la saison 2011. Après un an avec les espoirs de Montpellier, il devient dès 2012 titulaire avec l’AS Béziers avant de connaitre une saison quasi blanche en 2014-15 à cause d’une grave blessure. Utilisé comme ailier, il est également polyvalent au centre et réputé puissant avec un bon jeu au pied. Régulièrement aligné en Fédérale 1 avec Aix en Provence puis Bourge en Bresse, Theuns Kotze a connu plusieurs provinces en Afrique du Sud. C’est l’unique ouvreur et seul buteur régulier de la sélection. Enfin l’arrière Chrysander Botha a rejoint l’Angleterre et les Exeter Chiefs l’an passé après une saison pleine avec les Lions en Super Rugby et Currie Cup. Éclosion express entre 2012 et 2014 en Afrique du Sud pour ce joueur très rapide, excellent ball runner mais également solide défensivement. Malheureusement sa saison dernière a été handicapée par une fracture de la jambe et une luxation de la cheville en novembre 2014 et il n’a pu porter qu’à 6 reprises le maillot du club du Devon.
Le futur Bayonnais PJ van Lill est le vice capitaine de l’équipe. Derrière lui l’ex Briviste Tjiuee Uanivi.
Bien qu’amateur aujourd’hui, Jaco Engels possède un gros palmarès
Et le reste des joueurs? Jaco Engels joue désormais pour United en Namibie mais les connaisseurs du rugby sudiste se souviennent surement de lui comme l’ancien pilier des Bulls (en concurrence avec Gurthro Steenkamp à l’époque) qui a tout de même trois Super Rugby à son palmarès (2007, 2009 et 2010). Courtisé par la Namibie dès 2006, il a longtemps attendu (en vain) une sélection avec les Springboks. Désormais de retour au pays après un passage chez les Eastern Province Kings, il faudra se méfier de ce pilier gauche très expérimenté et solide en mêlée. Aguerri au jeu de fédérale 1 et au championnat espoirs (passé par Agen, Cahors, St Junien puis St Nazaire), le pilier polyvalent Casper Viviers est également une option en première ligne. Peu présent en dehors des Coupes du Monde, le droitier Raoul Larson (passé par le Stade Montois et Lourdes) est un des cadres des SWD Eagles en Currie Cup et Vodacom Cup. Bien qu’ayant toujours évolué au sein du championnat Namibien (il possède son entreprise), Johnny Redelinghuys en est à son 3e Mondial et demeure le joueur le plus capé de la sélection.
Ne pas sous estimer Rohan Kitshoff, longtemps titulaire avec la Western Province
Une nouvelle Coupe du Monde réussie pour Tinus du Plessis?
En plus de Burger, Bothma et van Lill, Phil Davies pourra compter sur deux autres joueurs expérimentés au sein de son backrow. S’ils n’évoluent plus à un niveau professionnel, Rohan Kitshoff et Tinus du Plessis peuvent être considérés comme des cadres de la sélection, toujours présents pour représenter leur pays que ce soit face aux All Blacks ou bien face à l’Allemagne, le Portugal ou Madagascar. Pour son 3e Mondial, du Plessis, rentré au pays en 2013 après plusieurs saisons en Angleterre (Cornish Pirates, Rotherham Titans puis London Wasps) est un gros plaqueur et bon porteur de ballon. Il avait été élu homme du match en 2011 malgré une lourde défaite face au Pays de Galles. Deuxième Coupe du Monde pour Kitshoff, vainqueur la Community Cup 2015 (tournoi des clubs en Afrique du Sud) avec Durbanville-Bellville et auparavant sous contrat avec la Western Province dont il a porté le brassard de capitaine. Une carrière bien remplie en Afrique du Sud avec les Griquas puis la province de Cape Town et quelques apparitions en Super Rugby avec les Stormers. Il a également effectué une pige à Bordeaux en 2012. Un profil de plaqueur gratteur comme l’Afrique du Sud en produit à la chaîne mais des qualités offensives à ne pas sous estimer!
Le centre Johan Deysel possède une bonne expérience de la Currie Cup avec les Leopards
Troisième Mondial pour le demi de mêlée Eugene Jantjies
Enfin derrière, Eugene Jantjies fait son retour après quasiment 4 ans d’absence pour son 3e tournoi Mondial. Installé en Roumanie depuis 2008, jouant tout d’abord avec le Farul Constanta puis aujourd’hui au sein du Dinamo Bucarest, c’est l’incontestable premier choix à la mêlée Namibienne. Davies compte sur ses qualités de leader mais aussi sur son expérience. Le centre Darryl de la Harpe, seul membre de la fratrie présent en Angleterre, a lui aussi évolué à Constanta en Roumanie avant de rentrer au pays alors que l’autre centre JC Greyling a lui chaussé ses crampons sur les terrains Irlandais de Dublin. Le polyvalent ailier/arrière David Philander n’a jamais joué en ITM Cup avec Taranaki mais fait partie des divers groupes élargis grâce à de bons matchs avec Spotswood United. Formé aux Pumas, l’arrière Johan Tromp est plutôt performant cette saison en équipe nationale. Cependant seul Johan Deysel, centre régulier des Leopards en Vodacom et Currie Cup, est un atout majeur de l’attaque Namibienne. Les joueurs non cités évoluent en Premier League Namibienne voire au sein d’université Sud Africaine leur permettant de participer à la Varsity Cup. Ils ont eu l’opportunité de se frotter au haut niveau dès le début de l’année 2015 en participant à la Vodacom Cup avec la province des Weltwitschias.
LES ABSENTS
Danie Dames manque le Mondial sur blessure
Compte tenu du faible réservoir, on ne peut pas considérer que des joueurs importants ont manqué l’avion pour l’Angleterre. La seule absence importante est celle de l’ailier Daniel Dames, malheureusement blessé assez régulièrement ces deux dernières saisons et hors de forme pour cette Coupe du Monde. Pourtant la qualité et l’expérience du joueur des Cheetahs et des Griquas aurait été un plus. Licenciés en Roumanie, Renaud van Neel et McGrath van Wyk n’entrent pas dans les plans des coachs. Les jeunes Neil Rautenbach (Western Province), Alcino Izaacs (Natal Sharks) et Keanan van Wyk (Blue Bulls) sont encore jugés trop tendres mais constituent l’avenir. Le 2e ligne d’Edimbourg Anton Bresler doit certainement attendre d’être éligible avec l’Ecosse car il n’a toujours pas fait allégeance à la Namibie. Il aurait pu retrouver son cousin Tinus du Plessis. Idem pour le son coéquipier le pilier Wicus Blaauw. Ces deux joueurs auraient constitué des renforts non négligeables.
EQUIPE TYPE
Ne bénéficiant pas de la continuité des autres équipes internationales, difficile de nommer une équipe type pour ce tournoi. Celle ci est purement subjective en fonction du niveau des joueurs et des derniers matchs.
1. Jaco ENGELS – 2. Torsten VAN JAARSVELD – 3. Johannes COETZEE – 4. Tjiuee UANIVI – 5. Janco VENTER – 6. Jacques BURGER (cap) – 7. Renaldo BOTHMA – 8. Tinus DU PLESSIS – 9. Eugene JANTJIES – 10. Theuns KOTZE – 11. Conrad MARAIS – 12. Johan DEYSEL – 13. JC GREYLING – 14. David PHILANDER – 15. Chrysander BOTHA
NOTRE PRONOSTIC
La Namibie a déjà affronté trois nations qui composent ce groupe C, à savoir l’Argentine (deux larges défaites), la Géorgie (un succès pour trois défaites) ainsi que les Tonga (une défaite). Ils n’ont en revanche jamais affronté les All Blacks ce qui constitue en soi un évènement pour les joueurs. Les Néo Zélandais se sont toutefois rendus en South-West Africa à deux reprises lors des tournées de 1960 (capitaine Wilson Whineray) et 1970 (capitaine Brian Lochore). Jacques Burger espère ainsi que l’exposition générée par une telle rencontre permettra à plusieurs joueurs de signer des contrats pro en Europe voire en Afrique du Sud comme ce fut le cas de Tinus du Plessis ou Heinz Koll après la dernière Coupe du Monde.
N’ayant jamais remporté la moindre rencontre en quatre participations, la Namibie ne pourra pas faire pire. Cependant le groupe sélectionné semble plus qualitatif que lors des précédentes éditions. Avant de voir la victoire de la Géorgie sur les Tonga, j’espérais les Weltwitschias capables de l’exploit contre les Lelos. Je suis maintenant beaucoup moins optimiste pour eux. Réussir à gratter un point de bonus défensif contre ces deux nations serait déjà une belle performance.