L’éclatant Zach Condon et sa bande qui constituent la réjouissante fanfare de Beirut reviennent avec un nouvel album No No No. Alors, au Limo, on dit trois fois oui (vous la sentiez venir celle-là, n’est-ce pas ?). Oui à l’esthétique Wes Andersonienne ! Oui aux orchestrations bricolées et insolites ! Oui à la voix charmante et aux paroles inarticulées du frontman !
Après Cherbourg, Nantes ou Santa Fe, Beirut nous donne cette fois rendez-vous à « Gibraltar » pour ouvrir ce dernier opus avec des percussions tribales qui flirtent avec une mélodie ludique agrémentée de handclap au refrain dont le phrasé si particulier fait l’identité de Beirut. S’enchaine la chanson éponyme au disque dont l’intro renvoie à ce qu’on connaît le mieux du groupe : des onomatopées inarticulées qui tiennent lieu de refrain. On retrouve des mélodies efficaces comme des invitations au voyage : « If we don’t go now, we won’t get very far » nous prévient Zach Condon.
Mais au départ enlevé de l’album se substitue un peu plus de gravité avec le piano et les percussions plus lentes de « At Once » qui introduisent les cuivres et les doutes chers au chanteur. « How do you know, at once, at last, at all ? » semble-t-il nous demander avant de nous présenter « August Holland », titre plus lisse, dont les motifs ne se détachent pas vraiment, ce qui rend le morceau moins accrocheur. Vient ensuite un instrumental, « As Needed », qui donne la part belle aux cordes, aux cuivres, aux mélodies ciselées qui s’appuient sur quelques notes de ukulélé et des percussions un peu jazzy. Dans cette langueur sans parole, on retrouve un peu la trace de la thérapie musicale qui a donné naissance à cet album.
Notre chemin nous mène à « Perth » où l’on retrouve l’énergie qu’on dirait puisée dans un magasin de jouets, simple et enjouée. Toutefois, notre visite australienne se trouve être un peu répétitive et se perd dans un final choral qui a du mal à émouvoir. Vient ensuite l’intro d’accords plaqués au clavier de « Pacheco », qui ne nous raccroche pas vraiment. Le rythme plus lent, dilaté et les voix nonchalantes – presque apathiques – ne nous aident pas non plus à nous immerger dans cette fin de disque.
Même problème avec « Fener », et on commence à se dire que tous les titres se ressemblent dans leur certaine mollesse, puis vient la drôle de rupture rythmique au milieu du morceau. No No No se clôt avec la tendre « So Allowed » et son piano tout simple qui accompagne la si jolie voix de Zach Condon à laquelle viendront s’ajouter des cordes. Ces dernières remplaceront pour un temps le clavier avant de laisser leur place aux cuivres qui viendront refermer le nouveau périple musical de Beirut.
Le mélange des genres est toujours bien présent chez l’alchimiste américain dans ce quatrième effort. La world music tout en folk et en finesse de ce garçon original, inventif et lumineux réanime la mythologie du voyage et le lyrisme qu’on lui connaît et qu’on aime. Si ce dernier n’est pas une révolution stylistique majeure dans la carrière de Beirut, c’est le premier album composé par le groupe et pas seulement par Zach Condon. Il reste et demeure un bon disque de Beirut mais si la longue attente, due à des anicroches personnelles, a peut-être un peu terni l’esprit des fans de la première heure.
Certains regrettent l’inaboutissement de No No No mais on apprécie aussi bien le vagabondage qu’il propose que les séjours organisés, aux Balkans par exemple, que le groupe a pu offrir auparavant. Le grand déballage de la vie personnelle du chanteur n’a pas altéré la qualité musicale du nouvel album de Beirut et c’est avec plaisir qu’on l’a retrouvé le 22 septembre en concert au Zénith de Paris.
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As Needed, At Once, August Holland, Beirut, Fener, Gibraltar, No No No, Pacheco, Perth, So Allowed, Zénith de Paris