Quatrième de couverture :
Frank Money est Noir, brisé par la guerre de Corée, en proie à une rage folle. À Atlanta, il doit retrouver sa jeune soeur Cee, cobaye d’un médecin blanc, pour regagner Lotus en Géorgie, la ville de son enfance – «le pire endroit du monde». S’engage pour lui un périple dans l’Amérique ségrégationniste des années 1950 ou dansent toutes sortes de démons. Avant de trouver, peut-être, l’apaisement. Parabole épurée, violemment poétique, Home conte avec une grâce authentique la mémoire marquée au fer d’un peuple et l’épiphanie d’un homme.
C’est drôle, les liens inattendus qui se tissent d’un livre à l’autre… Après Un pied au paradis, j’ai ouvert « naturellement » Home et voilà de nouveau un roman dont les différents personnages parlent ou sont mis en scène tour à tour, éclairant chacun l’histoire, l’enfance, les traumatismes des uns et des autres. Certes la progression du drame n’est pas du tout la même mais ici aussi, le lien familial (ici entre frère et soeur, là entre mari et femme, père et fils) est un peu la colonne vertébrale du roman.
Ceci dit, en refermant le livre, je me suis demandé ce que je pouvais ajouter à l’intensité des mots de Toni Morrison… Plongée dès le début dans la tête de Frank Money, dans ses délires traumatiques liés à la guerre de Corée et à l’alcool, j’ai été happée dans les émotions à fleur de peau, dans les bleus à l’âme de l’enfance sur lesquels on n’a pas jeté de mots intelligents, dans la pauvreté morale et physique qu’ont vécue Frank et Cee. On découvre tout cela petit à petit, avec la cruauté des uns et le bon sens des autres. Par un voyage plus ou moins long (la Corée pour Frank, de Lotus à Atlanta pour Cee), un voyage à la fois physique et intérieur, on passe de la violence du début au récit d’un apaisement, d’une résilience. Je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite tant la lecture était prenante mais je crois que j’ai vibré du début à la fin… C’est le signe d’une lecture marquante, non ?
« Quant aux parents, ils étaient tellement épuisés à l’heure où ils rentraient que tout témoignage d’affection était comme un rasoir : coupant, mince et bref. Lenore était la méchante sorcière.Frank et Cee, tels des Hansel et Gretel oubliés, se tenaient fermement la main et naviguaient à travers ce silence en tentant de s’imaginer un avenir. » (p. 55-56)
Toni MORRISON, Home, traduit de l’anglais(Etats-Unis) par Christine Laferrière, Christian Bourgois, 2012 et 10/18, 2013
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