Les Grecs restent debout. Ils nous appellent à la lutte. Car cette victoire, essentielle, devrait résonner comme celle de toutes les forces progressistes du continent.
L’ampleur de la victoire de Syriza, aussi surprenante soit-elle aux yeux de certains, nous pousse dans le dos. Si les Grecs n’en finissent pas de donner des leçons de maturité démocratique au reste de l’Europe, avec une intelligence des situations que nous pouvons leur envier, ils viennent, avant tout, d’infliger une gifle à l’ensemble des gouvernements européens qui se sont acharnés avec une violence inouïe à déstabiliser le premier gouvernement Tsipras et à imposer de nouvelles mesures d’austérité, des privatisations et des confiscations de souveraineté. Alors qu’ils voulaient sa tête, tous les dirigeants s’empressent de féliciter Alexis Tsipras. Mieux, les sociaux- libéraux – ces vrais faux amis – tentent de s’accaparer cette victoire… On croit rêver! Les Grecs restent debout. Ils nous appellent à la lutte. Car cette victoire, essentielle, devrait résonner comme celle de toutes les forces progressistes du continent.
Les Grecs viennent de nous aider. Mais ils nous invitent, encore une fois, à les aider et à prendre le relais. Nous n’écrirons pas, ici, qu’Alexis Tsipras a tout réussi et qu’il ne doit pas faire face à des contradictions majeures. Comment gérera-t-il avec les créanciers l’accord de juillet, imposé tel un coup d’État financier ayant pour but de montrer qu’une politique alternative à l’austérité est incompatible à l’appartenance à l’UE? Et comment se comportera-t-il pour renégocier la dette? Nous savons que les idées transformatrices, devant un ordre établi, deviennent force matérielle irrésistible dès lors que les masses s’en emparent. L’Europe vit des moments historiques et rien, pour l’instant, ne présage de l’avenir ni ne nous prémunit du pire. Les peuples européens qui se revendiquent des gauches antilibérales ont un destin commun, dans leur diversité et dans leurs réalités. Les pressions et humiliations subies par le peuple grec durant des mois soulèvent, pour nous tous, de lourdes questions politiques et philosophiques. L’avenir de la coopération en Europe ne dépend pas que des Grecs, mais beaucoup de nous. Pour espérer entamer une reconquête de pouvoir sur la finance [EDITORIAL publié dans l’Humanité du 22 septembre 2015.]