Raisonnons par l’absurde : existe-t-il des langues plus faciles à traduire que d’autres, et si oui, lesquelles ? A priori, les langues les moins riches en vocabulaire, les plus simples à apprendre et à assimiler.
Poussons le raisonnement jusqu’au bout et prenons le cas du toki pona. C’est une langue, la plus concise au monde, qui ne comporte que 120 mots, pas un de plus. Elle s’apprend en 30 heures, l’équivalent d’une petite semaine de cours.
Le toki pona a été construit en 2001 par Sonja Lang, une linguiste et traductrice canadienne. Cette « micro-langue » suscite l’intérêt grandissant de nombreux experts dans le monde qui, tous, louent son efficacité et la créativité qu’elle génère.
Avec ses 120 mots, elle nécessite un effort mental quasi ludique, calqué sur le principe des boîtes que l’on empile.
Certains, sur les forums, des Japonais, des Belges, des Argentins, expriment même le plaisir que procure sa pratique car, expliquent-ils, elle bouscule nos codes habituels de communication. Elle nécessite un effort mental quasi ludique, calqué sur le principe des boîtes que l’on empile.
Comme les mots sont rares, il faut en utiliser plusieurs pour en construire un autre. Cela vous oblige à être créatif et à emprunter des chemins de pensée alternatifs.
Prenons un exemple : le toki pona ne compte que cinq couleurs, loje (rouge), laso (bleu), jelo (jaune), pimeja (noir) et walo (blanc). Rose se dit donc loje walo (rouge blanc), tandis que vert devient laso jelo (bleu jaune). Cet assemblage de mots ne peut être compréhensible que dans l’instant, adapté à une situation que vous partagez avec votre interlocuteur. Ainsi, à l’écrit, le toki pona devient plus elliptique, sujet à interprétation, on verse même dans une sorte de poésie qui reste à l’appréciation du lecteur.
Alors non, une langue « facile » n’est pas moins compliquée à traduire. C’est même le contraire.