De l'air, que diable !

 

La rentrée, les enfants, c’est fini! Ouf ! Parce qu’il faut bien le dire, c’est pénible. Tout le monde a repris le chemin de l’école, d’une manière ou d’une autre, les pieds en dedans, pensant aux prochaines vacances et remisant sous une pile de papiers et factures, le welcome back du percepteur. L’humeur est mi-figue, mi-raisin.  

Quelques nouvelles nous bercent. La reine d’Angleterre nous sourit, imperturbable, depuis bientôt 63 ans, coiffée d’ invraisemblables chapeaux et vêtue de couleurs acidulées que seules les anglaises osent et peut-être même, inventent. La reine Claire, qui nous délivrait l’information au JT depuis presque un quart de siècle, tire sa révérence. D’aucuns versent une petite larme, d’autres s’en foutent "royalement", bercés des bulletins d’actualité qu’ils reçoivent sur leur smartphone.

Comme vous, je me suis tapée la rentrée et pour fêter cet instant, ô combien désagréable, je suis allée à la rencontre d’autres roi et reine. La société Gaumont m’a ainsi offert le privilège de me vautrer dans des fauteuils de cinoche confortables pour le prix modique, par rapport au tarif normal, de 6 euros. Et croyez-moi, j’en ai bien profité. 

J’ai débuté avec la reine Meryl qui dans "Riki and the Flash" campe une rockeuse sur le retour. Coiffée : on se demande comment on a pu créer un tel machin, un pétard lâché dans sa chevelure n’aurait pas fait pire. Lestée de kilos de fards à paupières gris foncés, couvertes de bracelets et colifichets en tout genre, elle gratouille  la guitare électrique en chantant des tubes du Boss et des Rolling Stones, entourée de son invraisemblable  bande de musiciens. Le tout planté au fin fond d’un troquet minable à Los Angeles. 

Les intellos trouvent que c’est nul, bourré de clichés et qu’on n’accroche pas. Eh bien pour moi, qui ne suis pas intello,  ce film est jubilatoire. Mamie Meryl s'éclate,  loin du diable habillé en Prada. Quand elle se pointe chez son ex-mari pour remonter le moral de sa fille, en plein désastre conjugal, qu’elle n’a pas vu en gros depuis 20 ans, on comprend pourquoi elle a préféré tirer sa révérence. La vue de la grosse maison bien bourgeoise où rien ne dépasse  a de quoi coller le bourdon,  même quand ce n’est pas la rentrée!  

Ensuite j’ai enchainé avec un roi, Dieu en fait, dont la fille a décidé d'écrire sa version du nouveau testament. Et si le diable s’habille en Prada, alors Dieu porte un informe tee-shirt sur une robe de chambre qui a connu des jours meilleurs, un short qui n’a pas vu la couleur d’une lessive depuis le début de l’humanité, et est chaussé de claquettes de piscine. Le tout joint à un tempérament irascible, à tout le moins, car pourrir la vie du monde est son occupation favorite.

Vous dire si le film est excellent, je ne sais pas. Original et décalé, sûrement. J’en suis sortie avec un sentiment indéfinissable. La vision proposée est plutôt noire, bien qu'adoucie d'  instants frais et rigolos. Mais, et j’en arrive à mon propos, la question fondamentale posée est : que faire du reste de sa vie ? Si on s’autorisait cette réflexion, qu’irions-nous imaginer spontanément ? Nous qui nous sentons engoncés dans une vie dont nous avons l’impression qu’elle nous échappe totalement, que nous ne maîtrisons rien et par dessus le marché, que nous évoluons dans un environnement de plus en plus aseptisé. 

Comment se dégager, respirer, trouver le temps, rêver, rigoler. Après tout, nous n’avons qu’une vie. Evidemment nous ne sommes pas Meryl Streep et la vie n'est pas un film, c'est vrai. Mais on peut trouver pour soi des petits coins de ciel bleu. Un sorte de botox de l'âme. 

Voilà, mes souhaits pour ce début, bientôt d’automne, "le printemps de l’hiver" comme disait Toulouse-Lautrec. 

De l’air, "que diable", puisqu’il semblerait qu’on ne puisse dire "que dieu".