La cartographie des sites archéologiques en cours de fouille prend beaucoup de temps et demande beaucoup de mesures, de photographies, de dessins et de prises de notes.
Aujourd'hui, tout ce travail peut être réalisé grâce à la photogrammétrie. Il s'agit d'une méthode qui utilise des images en deux dimensions d'une découverte archéologique pour construire un modèle 3D.
Modèle 3D d'un umbo d'un bouclier trouvé dans une tombe Viking à Skaun. Credit: NTNU University Museum
Il n'y a pas besoin de lunettes spéciales ou d'équipement avancé pour utiliser cette technique. Avec les mesures précises du site, la photogrammétrie permet de créer une carte complète et détaillée d'un site archéologique en cours de fouille.
"C'est encore une toute nouvelle technique" rapporte les archéologues Raymond Sauvage et Fredrik Skoglund du NTNU University Museum. La photogrammétrie est en de nombreux points plus précise que les anciennes méthodes qui de plus prennent beaucoup de temps.
Elle déjà mise à profit par les archéologues, comme on a pu le voir dans un article que j'ai publié récemment: Une nouvelle méthode pour documenter les épaves.
Lorsqu'une tombe supposée Viking a été trouvée en 2014 à Skaun dans le comté de Sør-Trøndelag, en Norvège, le site en cours de fouille a été cartographié à l'aide de la photogrammétrie.
La façon dont les artéfacts sont trouvés, à la profondeur à laquelle ils sont enterrés et où ils ont été placés les uns par rapport aux autres peut apporter de nombreuses informations aux archéologues étudiant le site.
La photogrammétrie rend aussi plus facile le partage des découvertes avec d'autres spécialistes: les modèles 3D qui sont produits peuvent être enregistrés en format PDF, et donc peuvent être facilement envoyés aux collègues.
Si vous avez un ordinateur suffisamment puissant, vous pouvez télécharger ce document PDF concernant le site archéologique Viking pour vous avoir un aperçu: https://ntnu.box.com/shared/static/51nxbf6fi269suwklzi574za62j3eric.pdf
C'est une version en basse résolution, mais vous pouvez déjà vous faire une bonne idée de ce que cela peut donner. Il est possible de zoomer, changer d'angle de vue, etc...
Du temps gagné grâce à cette technique
Une société russe a développé le programme qu'utilisent ces deux archéologues au musée. Il est facile à utiliser et donne de bons résultats.
Le développement et l'utilisation de la photogrammétrie ont explosé ces dernières années. Cela apporte le genre de détail et de qualité que l'on pouvait seulement rêver il y a quelques années.
Même si la méthode demande du travail, elle fait gagner beaucoup de temps. "En un jour, on peut obtenir 3 millions de points de mesure. Avant, on était satisfait avec 3000" précise Skoglund ... et ces 3000 points pouvaient demander beaucoup de temps.
Du coup, cela libère beaucoup de temps, et l'on peut passer plus de temps sur la recherche par exemple..
Des résultats similaires ont été obtenus par le passé avec des équipements laser et une ancienne version du programme de photogrammétrie. Mais cela revenait très cher et prenait beaucoup de temps et de ressources.
Le nouveau logiciel ne coûte que quelques milliers de couronnes (quelques centaines d'Euros) ce qui signifie qu'il est beaucoup plus accessible.
Avec un logiciel de photogrammétrie, et un simple appareil photo, trois ou quatre images de différents angles de vue sont suffisants pour faire un simple modèle 3D. "Plus il y a d'images, plus la qualité est meilleure" ajoute Sauvage.
Il est aussi possible d'utiliser des images d'anciennes découvertes et de construire un modèle 3D. Par exemple, on peut faire un modèle à partir des photos de précédentes fouilles de tombes Viking, et de l'utiliser pour voir comment le site de fouille a évolué avec le temps.
Skoglund, archéologue marin, a essayé cette méthode avec le bateau hollandais "De Grawe Adler" (l'Aigle Gris) qui a coulé en 1696 à Hustadvika. Il a été découvert en 1982 lorsque le dragage de sable commençait à détruire des parties du navire.
"J'ai nagé tout le long de l'épave il y a quelques années tout en prenant des photos" explique Skoglund. C'était sans penser à la possibilité de faire un modèle 3D du bateau. Le fait que les photos avaient été prises sous l'eau a un peu compliqué la tâche lorsqu'il a fallu les rassembler, mais sans être impossible.
Et voici ce que cela a donné:
Modélisatin de l'épave "De Grawe Adler". Photo: Credit: University Museum
Lorsque les résultats son suffisamment précis, ils peuvent être utilisés pour contrôler la décomposition du navire. Les découvertes faites sous l'eau ont tendance à être particulièrement fragiles, et la décomposition peut être difficile à voir. On plonge toutes les quelques années pour vérifier que tout va bien.
Avec cette nouvelle méthode, la décomposition peut être mesurée de manière plus précise, et du coup, des mesures appropriées de protection peuvent être mises en place.
Les développements futurs de la photogrammétrie
La prochaine étape serait de pouvoir mettre une paire de lunettes 3D et de marcher virtuellement dans un site de fouille; mais cela ne se fera pas avant quelques années.
Il y a un défi cependant: il faut pouvoir stocker les mesures numériquement d'une manière qui sera utile pour les générations à venir.
Les archéologues d'aujourd'hui travaillent avec des notes et des prises de mesures sur les fouilles qui peuvent être utilisées pendant des centaines d'années... Une photo prise il y a 100 ans et toujours valable aujourd'hui. Alors que personne ne sait si un fichier PDF sera toujours utilisé en 2115.
Cela est un défi pour toutes les informations stockées numériquement.
Source:
Physorg: "New technology allows archaeologists to easily map excavation sites in 3D"