Depuis 30 ans, la France s'est vraiment repliée sur elle-même ...
Pourtant, à l'instar de John Kennedy, ne vaut-il pas mieux se demander ce que nous pouvons faire pour elle plutôt que de demander qu'elle en fasse toujours plus pour nous ?
L'attitude intransigeante de la majorité des Français (55% selon les derniers sondages) envers les réfugiés cherchant asile chez nous nous ramène aux jours les plus sombres de notre histoire. Parce que chacun redoute la montée en puissance des forces les plus "rances" de notre société, nous restons dans un immobilisme inexcusable devant le drame humanitaire qui se noue sous nos yeux.
Il n'en a pourtant pas toujours été ainsi.
En 1979 - et la crise économique sévissait déjà depuis 5 années - nous avons accueilli les "boat people" fuyant l'envahissement du sud - Viet-Nam. Certes, un grand nombre d'entre eux étaient catholiques et certainement anti-communistes. Et certains, peut-être se souvenaient-ils des douceurs de l'ancienne puissance coloniale (?).
Que sont-ils devenus aujourd'hui ? Sont-ils retournés dans leur pays à la fin du conflit, ont-ils fait souche dans leur pays d'accueil, l'ont-ils quitté pour de meilleures conditions de vie ? Personne n'a essayé de le savoir ...
Pour notre part, nous avions, en 1979, pris contact avec l'OFPRA (l'Office des réfugiés et apatrides) pour proposer un emploi de garde d'enfants à temps complet à une jeune vietnamienne. Je me souviens que cette démarche volontariste n'avait pas été particulièrement simple pour nous, alors même que Claude jouissait d'un poste éminent dans l'Administration ...
Elle se prénommait Thuy Nga, avait 20 ans et parlait à peine notre langue, sortait du lycée et n'avait jamais travaillé. Elle est restée chez nous une année, juste la durée du contrat, juste de quoi rebondir sur un emploi plus rémunérateur ...
Je donnerais cher pour savoir ce qu'elle est devenue. Elle est sans doute devenue à son tour grand-mère, elle aussi, ayant rayé de ses souvenirs cet épisode dramatique de sa jeune existence.
Comment a-t-elle surmonté cette épreuve ? Nous l'avons accueillie, logée et nourrie, emmenée en vacances avec nos enfants. Elle ne nous a presque rien raconté de ce qu'elle avait subi durant sa fuite et son exil forcé, seulement qu'elle avait, avec sa famille, vécu quelques mois dans un "camp" en Normandie, le temps d'apprendre le français afin de pouvoir tenir un emploi ... redevenir indépendante.
Elle a rempli son contrat, nous aussi, et nous n'avons plus jamais reçu de ses nouvelles. Mais au moins avons nous apporté une petite contribution à cet afflux soudain de réfugiés, qui n'ont finalement bousculé aucun équilibre dans notre pays.
Hélas, je n'ai plus aucun enfant à faire garder aujourd'hui !