Claude Margat
" Comme beaucoup d'autre texte de Bernard Noël, le Monologue du nous est une sorte de carrefour à partir duquel tout regard peut se sentir invité à visiter l'hôpital où l'on soigne les blessures innombrables d'un réalisme aveugle. Peut-être en effet le livre doit-il aller jusqu'à faire exploser notre identité pour nous aider à en recomposer la perspective. On ne saurait en effet porter un regard juste sur la situation actuelle du terrorisme sans déplacer le faisceau de notre lampe vers une zone d'ombre que nous détestons de visiter : celles où se trouvent entassées toutes erreurs du colonialisme et les rancœurs accumulées par les dominés. Les pays riches font la loi, les pays pauvres la subissent. Parmi tous ces humiliés, certains ont une fierté plus vive... plus dangereuse. Même si la communauté humaine que le scripteur appelle de ses vœux n'a plus la moindre chance de voir le jour, rien en effet ne sera réglé tant que l'homme vaudra moins que la marchandise qu'il consomme. En attendant, toujours en attendant, reste le livre, le lieu d'accroche, cette voie qui court de mot en mot vers l'image d'un homme nu, " souverain et merdeux " comme le définissait Georges Bataille... mais libre enfin."
Claude Margat, à propos du livre de Bernard Noël : " Monologue du nous ", dans le magazine le Matricule des Anges, mai 2015 http://https://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Margat