Le piano oriental – de Zeina Abichared (Casterman)
Pour ce dernier samedi du mois d’août et avant une rentrée très attendue, Case Départ vous propose une petite sélection. En vous ouvrant sa bibliothèque, le blog met en lumière de très bonnes bandes dessinées. Nous passons au crible, les albums suivants : la très belle série manga Orange publiée par Akata, le sixième volet de la série de Joann Sfar : Le chat du rabbin, le premier volume du manga Arte, Léonid : la nouvelle série animalière jeunesse des éditions Soleil, L’enragé du ciel : l’adaptation libre de la vie du pilote émérite Roger Henrard , Le piano oriental : le nouvel album de la franco-libanaise Ziena Abirached, La dame de Damas : une version de Roméo et Juliette pendant le soulèvement syrien, le premier volume du comics français The infinite loop, Le dernier tome du Tempe du passé de Hubert & Etienne Le Roux, le premier volet de la biographie de Charles de Gaulle, Baby Boom : l’adaptation de la nouvelle de Jean Vautrin, la réédition de Kid Eternity : un comics de Grant Morrison, le premier volume du manga Freak Island et le 28e tome des aventures des Simpson. Bonnes lectures.
Orange
Attention shôjo à lire et découvrir absolument ! Publié par Akata, Orange, est un manga de Ichigo Takano et qui met en scène des lycéens face à un drôle de phénomène fantastique : ils reçoivent des lettres écrites par eux-même mais venant du futur. Ainsi, ils peuvent influencer ou changer le cours de leur histoire.
Résumé de la série :
Un matin, alors qu’elle se rend au lycée, Naho reçoit une drôle de lettre… une lettre du futur ! La jeune femme qu’elle est devenue dix ans plus tard, rongée par de nombreux remords, souhaite aider celle qu’elle était autrefois à ne pas faire les mêmes erreurs qu’elle. Aussi, elle a décrit, dans un long courrier, les événements qui vont se dérouler dans la vie de Naho lors des prochains mois, lui indiquant même comment elle doit se comporter. Mais Naho, a bien du mal à y croire, à cette histoire… Et de toute façon, elle manque bien trop d’assurance en elle pour suivre certaines directives indiquées dans ce curieux courrier. Pour le moment, la seule chose dont elle est sûre, c’est que Kakeru, le nouvel élève de la classe, ne la laisse pas indifférent…
Résumé du quatrième volume :
Naho et Kakeru se sont enfin avoués leur amour. Mais les deux adolescents ne savent pas encore vraiment comment se comporter, l’un vis-à-vis de l’autre, et ce que signifie le fait de « sortir ensemble ». L’arrivée imminente de la course de relais pourrait bien donner un coup de pouce à leur relation naissante… À moins que l’absence de la mère de Kakeru ne se fasse trop cruellement sentir ?
Malgré un immense succès éditorial, la publication d’Orange a connu quelques soubresauts passant de la revue Bessastu Margaret consacrée aux shôjos (des éditions Shûeisha) à Gekkan Action (des éditions Futabasha), un magazine qui publie des histoires plus adultes. Ce qui peut très bien fonctionner car ce manga est vraiment tout public.
Shôjo de très grande valeur, intelligent et accrocheur, Orange ne laisse pas indifférent et se lit d’une traite. Il faut souligner que ce titre qui aurait pu être une énième histoire romantique entre lycéens glisse rapidement vers un récit fort, entre la fable et le drame, agrémenté d’un peu de fantastique. Construit un peu de la même manière que le formidable Erased de Kei Sanbe chez Ki oon (un garçon peut se transporter dans le passé, juste avant des drames et essaie de changer le cours de l’histoire), Ichigo Takano permet à ses personnages de connaître le futur par des lettres écrites par eux-même dix ans plus tard. Le plus étrange c’est qu’ils reçoivent ses missives alors qu’ils sont encore au lycée (Est-ce clin d’œil à la série télévisée Demain à la Une, où le héros reçoit le journal du lendemain et essaie de redresser des injustices ?).
On le voit, ce genre s’est décliné sous plusieurs formes, pourtant Orange est intéressant à plusieurs titres et notamment grâce à ses personnages d’une grande complexité psychologique : Naho, jeune lycéenne plutôt discrète et très peu sûre d’elle, est la première à recevoir une lettre du futur. A 26 ans, elle a des regrets, car elle n’a pas pris les bonnes décisions lorsqu’elle était plus jeune. Intriguée, elle découvre que ce qu’elle a écrit 10 années plus tard s’est vraiment déroulé. C’est pourquoi, elle essaie d’influer sur ses actions de lycéenne. Pour cela, elle se rapproche de Kakeru, un jeune adolescent qui arrive de Tokyo. Dans les autres tomes, elle apprend que sa famille est très éloigné de lui et qu’il va se suicider. Naho qui peut changer le cours des choses, va-t-elle en avoir la possibilité, la force et l’envie ? En essayant de changer le futur et ne plus avoir de regrets, va-t-elle bouleverser le futur et donc engendrer d’autres conséquences bien pires ? Est-elle prête à cela ?
La force du manga est la grande aisance narrative de la mangaka : il arrive à passer d’une époque à l’autre facilement grâce à des séquences dans le futur qui permettent de comprendre au mieux les conséquences des actes des différents protagonistes. De plus, elle mêle habilement des thèmes forts (le suicide, les relations familiales, les relations amoureuses, le travail) et l’insouciance des personnages, due à leur vie lycéenne.
Surprenant, original et accrocheur, Orange vaut le coup d’œil, qui peut se transformer en véritable envie de tout lire.
- Orange, volume 4
- Auteur: Ichigo Takano
- Editeur: Akata
- Prix: 7.95€
- Parution: 2 juillet 2015
Le chat du rabbin
Le chat du rabbin est de retour après 9 années de silence. Joann Sfar torture de nouveau son félin philosophe puisque Zlabya, sa maîtresse, est enceinte !
Pour terminer cette chronique sur Comixtip, cliquez ici.
- Le chat du rabbin, tome 6 : Tu n’auras pas d’autre dieu que moi
- Auteur : Joann Sfar
- Editeur: Dargaud
- Prix: 12.99€
- Sortie: 28 août 2015
Arte
Etre une jeune adolescente au XVIe siècle, c’est délicat ; être une jeune aristocrate promise à un mariage forcé, c’est délicat ; être une jeune fille qui veut devenir peintre à cette époque, c’est mission impossible ! Pourtant, à force de volonté, Arte réussit à devenir apprentie chez Léo, un maestro florentin. Cette belle histoire est contée dans Arte, un manga de Kei Ohkubo, édité par Komikku.
Résumé de l’éditeur :
Italie, Florence, début du 16e siècle. Dans ce berceau de la renaissance étaient installés de nombreux ateliers où de grands maîtres rivalisaient de génie pour créer des chefs-d’œuvre. L’époque était au foisonnement culturel. Au milieu de toute cette effervescence on retrouve Arte, une jeune femme pas comme les autres. Suite au décès de son père, sa mère ne souhaite qu’une chose, la marier au plus vite ! Mais cette fille d’aristocrates florentins n’est pas du même avis. Elle a une passion dévorante pour le dessin et tente tout pour intégrer un des nombreux ateliers de peintres de la ville… en vain ! Sa condition de femme lui revient alors à la figure telle une paria… Une femme peintre ? Une fille apprentie ? Est-ce vraiment possible en pleine Italie du 16e siècle ?
©2013 by Kei Ohkubo / NSP approved Number ZCW – 41F
Force est de constater qu’en France, nous avons de très bons éditeurs de mangas. Parmi ces structures, quatre retiennent notre attention, tant leurs lignes éditoriales sont intéressantes et intelligentes : Akata, Ki oon, Doki Doki et le petit dernier Komikku. Après les excellents Chef de Nobunaga, 6 000, Le maître des livres, Eurêka, Snow illusion ou La main d’Horus, la maison d’édition nous livre Arte, un très bon manga de Kei Ohkubo.
Prépublié dans le magazine Comic Zenon depuis 2013 au Japon, ce manga historique arrive en France ce mois-ci. Il a pour toile de fond, Florence au XVIe siècle, cette ville si fourmillante d’ateliers de peintre pendant la Renaissance. Cité riche culturellement, elle rivalise avec Milan, Venise et même parfois Rome. Bien décrite dans ce manga, le lecteur peut ressentir l’effervescence et la folie de Florence. Si elle est à la pointe des commandes picturales, elle possède aussi des lieux plus sombres, moins propres. Entre les marchés, les apothicaires et les ateliers, tout l’univers des arts est représenté. Même s’il n’atteint pas la virtuosité des décors et des costumes de Cesare (de Fumiyo Soryo, Ki oon), le mangaka a pris soin d’être le plus proche possible de la vérité et c’est très abouti. Le dessin fait de tramages légers est efficace et d’une très belle lisibilité.
©2013 by Kei Ohkubo / NSP approved Number ZCW – 41F
La force du récit repose avant tout sur son héroïne Arte, un prénom prédestiné. Jeune fille de la haute société florentine, elle ne se plaît guère dans sa condition d’aristocrate. Entre un père disparu trop tôt, qui l’encourageait dans sa passion et une mère dure avec elle, elle souhaite s’affranchir de tout cela. Alors que sa mère souhaite la marier à un homme riche et de bonne famille, elle s’enfuit vers la ville, s’abandonnant à son envie de dessiner. En parcourant le centre ville, elle s’arrête dans tous les ateliers de grands maîtres afin de devenir apprentie. Rejetée parce qu’elle est une femme, elle est accueillie froidement par Léo, un peintre modeste. Lui qui n’avait jusqu’à présent jamais eu de disciple, il fait un effort, peut être parce qu’elle lui ressemble. Lorsqu’il était plus jeune, il ne souhaitait qu’une chose : être indépendant et s’assumer financièrement. C’est le début des tâches ingrates pour Arte (laver l’atelier, aller chercher les fournitures, préparer les couleurs…). Elle doit même retaper le cabanon qui lui sert de logement.
©2013 by Kei Ohkubo / NSP approved Number ZCW – 41F
On apprécie la volonté d’émancipation de cette jeune adolescente, sa grande liberté, son envie de réussir coûte que coûte. Sortir de sa belle vie de palais, entourée de domestiques pour n’être qu’une simple apprentie dans un tout petit atelier, logée dans une cabane de bois sur un toit. Tout est nouveau pour elle, elle doit tout faire elle-même : fini l’habillage par la servante, fini les courses par les autres. Elle essaie et réussit ce qu’elle entreprend. Cette belle romance historique est agréable puisque dans ce premier volume, tout sourit à cette jeune héroïne. Kei Ohkubo met aussi en lumière la place de la femme dans cette société ainsi que la part importante de la religion catholique dans les destins des Hommes.
- Arte, volume 1
- Auteur: Kei Ohkubo
- Editeur: Komikku
- Prix: 7.90€
- Parution: 27 août 2015
Léonid
Signé Brrémaud et Stefano Turconi, la nouvelle série jeunesse Léonid conte les aventures félines de ce petit chaton domestique et ses amis à la recherche de tueurs d’animaux dans une petite bourgade campagnarde.
Résumé de l’éditeur :
Léonid vit à la campagne où des champs se mêlent aux maisons du quartier, où les chats sauvages et de ferme côtoient les chats d’intérieur. Un lieu de paix néanmoins menacé… En effet, deux chats albinos, fraîchement débarqués, sèment la terreur dans le quartier du sage Léonid. Deux matous très fins, aux yeux cruels, qui s’en prennent aux agneaux juste nés dans les champs. La réaction du fermier est terrible ! Il lâche ses molosses qui nettoient les lieux sans discernement… Tant que les coupables ne seront pas neutralisés, les chats du quartier ne connaîtront pas la paix. Léonid entre alors en scène et va montrer à tous qu’il n’est plus le chaton innocent qu’on pensait.
Après Camomille et les chevaux (chez Hugo BD depuis 2012), Frédéric Brrémaud et Stefano Turconi allient de nouveau leur talent pour une nouvelle série animalière Léonid. Si leur premier univers voyait des personnages humains et animalier, celui-ci est uniquement composés par nos amis à quatre pattes. Le récit très habile du scénariste qui aurait pu être une énième histoire mignonnette avec des chats, glisse dès les premières pages vers une enquête, une belle aventure pour les enfants. Dès la page de garde, le lecteur est plongé dans ce monde félino-canin, à travers la présentation des protagonistes : les gentils Léonid et les deux chiens Rosso et Mirza, qui vivent dans un petit pavillon douillet ; mais aussi Ba’on, Arsène, Bouboule et Hoa Mai, les chats voisins ou encore L’ermite, un vieux chat aux dialogues mystérieux; et enfin, les méchants : Zeus et Apollon (clin d’œil aux chiens d’Higgins dans Magnum) ou les Albinos, deux chats sournois.
Le petit chaton frêle, un peu lâche va se retrouver au cœur d’une affaire d’assassinats d’animaux. Il quitte son petit nid pour partir à la recherche des meurtriers, notamment à cause de la disparition de son amie Ba’on. Cette belle aventure plutôt accrocheuse n’est pas dénuée d’humour à travers les personnages des chats errants mais aussi par Atchi, la souris allergique aux poils de chats. Le récit est intelligent, moderne et rafraîchissant.
Entrevu dans la série Violette autour du monde (avec Teresa Radice, Dargaud), le très beau travail du Stefano Turconi est enfin reconnu à sa juste valeur. Son trait est encore plus poussé, plus fin, avec des mouvements plus maîtrisés que sur Camomille et les chevaux. Il faut souligner que l’auteur italien a fait ses armes dans les Studios Disney et qu’il y a acquis le sens de l’action quasi cinématographique. Allié à de belles couleurs, son dessin est élégant, ce qui lui permet de livrer de très jolies planches.
Léonid : une série animalière intelligente, avec de l’action, porté par un très bon scénario et une partie graphique de grand talent. A suivre !
- Léonid, tome 1 : Les deux albinos
- Scénariste : Frédéric Brrémaud
- Dessinateur : Stefano Turconi
- Editeur: Soleil
- Prix: 10.90€
- Sortie: 26 août 2015
L’enragé du ciel
Inventeur d’un appareil photos pour les avions dans les années 30, Roger Henrard était un drôle de pilote, inconscient et au service de l’armée pendant la Seconde Guerre Mondiale. Petit-fils de ce héros méconnu, Joseph Safieddine propose de découvrir ce destin hors du commun dans l’album L’enragé du ciel, mis en image par Loïc Guyon et publié par Sarbacane.
Résumé de l’éditeur :
L’étoffe du Héros (vu du ciel) ! Découvrez l’invraisemblable vie de Roger Henrard ! Pilote virtuose, homme de courage (jusqu’à la témérité), homme de cœur, homme à femmes mais fidèle en amitié : tellement humain…
Le récit de Joseph Safieddine est construit comme une fresque historique amusante et délirante. Cette folie, il la concentre dans son héros de papier Roger Henrard, dont il s’inspire librement pour son histoire. Son grand-père est un vrai héros méconnu mais ô combien attachant. Celui qui tente de se fait engager comme mécanicien dans les Établissements Schmitt ne se rêve qu’en pilote. Maladroit et fantasque, son père hérite de l’usine de son ami et demande à son fils d’en devenir directeur des ventes. Peu concerné par cette mission, il continue de prendre des cours de pilotage, détruisant un nombre important d’avions à chaque atterrissage.
A ses heures perdues, il met au point un appareil photos qu’il utilisera dans des avions afin de faire des clichés aériens. Il est le premier à photographier Paris vu du ciel à très basse altitude (10 pages de photos sont reproduites en fin d’album). D’ailleurs aujourd’hui, 1750 clichés sont conservés au Musée Carnavalet. Bien que marié à Marcelle et père de famille (Robert est son fils), il passe son temps à courir les femmes, y compris celles qu’il croise au Moulin Rouge. Mauvais pilote et mauvais tireur, il réussit cependant à entrer dans l’aviation pendant la Seconde Guerre Mondiale et entre 1939 et 1940, il réalise des missions d’espionnage aérien au-dessus des lignes ennemies, au péril de sa vie. Mais, il sera obligé de se replier vers l’Algérie lorsque toute son unité sera décimée.
Par cet album, Joseph Safieddine rend un magnifique hommage à son grand-père. Il souligne d’ailleurs : « C’était le héros de ma grand-mère, une légende pour nous tous, les arrières-petits-enfants, et je suis très fier de lui rendre hommage ». Instable, beau parleur, embobineur et gaffeur, c’est avant tout ce personnage qui accroche le lecteur tant il est fou, inconscient, dragueur et amusant malgré lui. L’enragé du ciel est porté par une belle partie graphique. Premier album et première réussite pour Loïc Guyon, dont le trait est dans la veine de Christophe Blain, Clément Oubrerie ou Zanzim. Virevoltant, avec beaucoup d’aisance dans les mouvements, son dessin lui permet de livrer des planches rythmées et de restituer la folie-douce du récit. Pour lui : « Roger Henrard était un personnage hors norme. En dessinant cet album, je me suis embarqué avec lui dans un voyage à sa démesure ! » Ce nouvel auteur prometteur est à suivre de près !
- L’enragé du ciel
- Scénariste : Joseph Safieddine
- Dessinateur : Loïc Guyon
- Editeur: Sarbacane
- Prix: 24€
- Sortie: 2 septembre 2015
Le piano oriental
Après Mourir, partir, revenir, le jeu des hirondelles (chez Cambourakis), Zeina Abirached propose Le piano oriental (Casterman), une nouvelle immersion dans le Liban des années 70-90. Pour cela, elle s’inspire de l’histoire de son grand-père, inventeur d’un piano singulier, capable de jouer les quarts de tons. Ce très beau récit établit un pont entre la France et le pays de naissance de l’auteur, un pont entre les deux cultures.
Résumé de l’éditeur :
Un récit inspiré de la vie de son ancêtre, inventeur d’un nouvel instrument de musique dans le Beyrouth des années 1960. Folle tentative pour rapprocher les traditions musicales d’Orient de d’Occident, ce piano au destin méconnu n’aura vu le jour qu’en un seul exemplaire, juste avant que la guerre civile ne s’abatte sur le Liban.
Après six années d’absence, Zeina Abirached propose un récit singulier qui met en parallèle l’histoire de son grand-père et celle d’un jeune pianiste d’aujourd’hui. Ce bel exercice narratif lui permet de parler de son aïeul, de musique, d’arts et des relations amicales entre la France et le Liban, un pays sous protectorat français après la Première Guerre Mondiale. Depuis ces années, les libanais sont profondément francophiles et beaucoup d’entre eux ont tenté de vivre en métropole et inversement.
Alors que dans son précédent ouvrage, Mourir, partir, revenir, le jeu des hirondelles (chez Cambourakis), l’auteur franco-libanaise nous racontait son enfance à Beyrouth, dans la même veine que Persépolis de Marjane Satrapi ; Le piano oriental nous fait voyager dans son pays quelques décennies auparavant. Pour cela, elle dépeint Abdallah Kamanja, un personnage fantasque, employé par la Compagnie des Chemins de Fer Libanais, féru de musique, virtuose du piano. Inventeur de génie, il met au point un piano capable de jouer des quarts de tons. Cette folie-douce, sa joie de vivre, lui permettent de créer, d’observer et d’accroître sa curiosité. Après l’invention de son instrument, il est invité à Vienne par les Hofman, célèbres facteurs de pianos. Accompagné de Victor, son ami, il part vers la capitale autrichienne, via Marseille. Ce fabuleux voyage va se muer en un périple fou.
Par cette histoire, Zeina Abirached parle du Liban mais aussi d’elle, de son départ vers la France, son déchirement lorsqu’elle quitte son pays natal ; mais aussi par les ponts que les uns et les autres jettent entre les deux cultures. Pour appuyer son propos, elle livre une sublime partition graphique. Influencée par David B et Marc-Antoine Mathieu, Le piano oriental est composé de planches en noir et blanc richement décorées. Entrelacs, arabesques, répétitions de formes et grands aplats noirs font de cet album, un récit original. Proche de celui de Marjane Satrapi, son dessin navigue parfois dans l’onirisme et la poésie. La musique, l’architecture et les costumes se marient à merveille dans des pages très réussies.
- Le piano oriental
- Auteure: Zeina Abiracheb
- Editeur: Casterman
- Prix: 22€
- Parution: 02 septembre 2015
La dame de Damas
Au cœur de la capitale syrienne, Karim et Fatima s’aiment d’un amour impossible. La famille de la jeune femme soutient le régime de Bachar El Assad, tandis que celle du jeune homme y est hostile. Entre les bombes, leur couple doit pourtant résister et rester uni. Cette variation de Roméo et Juliette aux confins de l’extrême-orient est racontée dans La dame de Damas, un album Futuropolis de Jean-Pierre Filiu et Cyrille Pomès.
Résumé de l’éditeur :
À Damas, Karim et Fatima s’aiment d’un amour impossible, pris dans le flot des traditions et de la guerre civile qui ravage la Syrie. Mais Karim et sa famille sont engagés contre Bachar al-Assad, alors que Fatima a dû unir son destin à celui du régime. Quand ils se retrouvent enfin, à l’été 2013, après avoir vécu ce qui ressemble déjà à mille vies, l’impensable va frapper la capitale syrienne : La mort blanche. Ce jour-là, les forces armées de Bachar al-Hassad bombardent à l’arme chimique et à l’arme conventionnelle plusieurs quartiers de Damas, faisant des centaines de morts. Loin de l’arsenal des rebelles syriens où l’on se partage une kalachnikov pour trois et où la balle coûte 2 euros.
La fin de l’année 2010 est marquée par les Révolutions et le Printemps Arabe en Tunisie, en Egypte et en Libye. Alors que les peuples de ces pays se rêvent en hommes libres, en Syrie, leurs tentatives sont baîllonnées et réprimées dans le sang. Le régime Baas de Hafez puis de Bachar El Assad son fils, est au pouvoir depuis 40 ans. A la mort du dictateur, les observateurs internationaux étaient plutôt optimistes pour l’ouverture du pays. Mais la transition ne change rien et le nouvel homme fort de Damas continue le même chemin que son père.
Alors que Bachar est au pouvoir depuis 2000, les 40 ans du régime est célébré dans les rues par des cris obligatoires et de nombreuses fêtes. Les récalcitrants sont observés de près, rudoyés et enfermés par les Moukhabarates (les policiers politiques). Au milieu de cette effervescence à Daraya, la banlieue de Damas, il y a Karim, étudiant en médecine, amoureux de Fatima. Pourtant, la jeune femme n’en a pas envie : le jeune homme n’habite plus le quartier et ne revient que peu souvent, uniquement pour les vacances. Il faut souligner que leurs familles respectives ont des idées très éloignées, celle de Fatima soutient Bachar, tandis que celle de Karim souhaite son départ.
Alors que l’Egytpe a fait partir Moubarak, les envies de révolution se font ressentir dans les rues de la capitale syrienne. Mais, le régime réprime rapidement ces velléités par des massacres de grandes ampleur. La guerre civile fera entre de 220 000 et 330 000 morts selon l’Observatoire syrien des Droits de l’Homme depuis 2011.
Le duo d’auteurs avait déjà travaillé ensemble lors de la création de l’album Le printemps des arabes (Futuropolis, 2013). Ils continuent leur collaboration sur une thématique proche avec ce nouveau récit. Cette belle variation de Roméo et Juliette en Syrie, permet à Jean-Pierre Filiu de nous parler de ce magnifique pays, étouffé par un régime fort depuis 40 ans. Malgré les révoltes dans le Nord de l’Afrique, la Syrie ne pourra pas opérer de changement à cause de la répression sanglante de la part d’El Assad. Entre traditions et modernité, les deux tourtereaux ne peuvent convoler et s’aimer facilement. Cette belle histoire d’amour avec une tension de tous les instants en toile de fond est magnifiquement mise en image par Cyrille Pomès. Son trait vif permet de livrer des planches rythmées et remplies de mouvements. Ses très belles couleurs ocres, grises et noires apportent la chaleur et les tourments du récit.
- La Dame de Damas
- Scénariste : Jean-Pierre Filiu
- Dessinateur : Cyrille Pomès
- Editeur: Futuropolis
- Prix: 18€
- Sortie: 20 août 2015
The infinite loop
Elsa Charretier et Pierrick Colinet avaient une folle envie de raconter une histoire de science-fiction. Sans éditeur, dans un premier temps, ils décident de faire appel aux édinautes par la plateforme de financement participatif Ulule. Le projet est adopté au-delà de leurs espérances et le livre sort une première fois en France en édition limitée mais c’est aux Etats-Unis en avril 2015 qu’il voit réellement le jour aux éditions IDW. Pour son retour chez nous, c’est Glénat qui publie une version plus définitive de The infinitive loop.
Résumé de l’éditeur :
Teddy vit dans un futur lointain, un monde édulcoré et sans aspérité où il n’y a plus d’enjeux, plus de haine, et surtout… plus d’amour. Un monde en apparence apaisé et sans conflit et où les voyages spatiotemporels font partie du quotidien. Teddy y mène une existence parfaite, exerçant son travail de correcteur d’anomalies temporelles au sein d’une brigade gouvernementale. Sa vie se déroule sans accroc jusqu’à ce que l’une de ces anomalies prenne la forme d’une jeune femme. Teddy est alors confrontée à un choix terrible : osera-t-elle défier sa hiérarchie et sauver l’anomalie ou va-t-elle purement et simplement la supprimer ?
Sans époque fixe (SEF), la belle rousse Teddy fait un drôle de métier : elle vient à bout des anomalies temporelles. Les Forgeurs, d’étranges amuseurs, ont pris des libertés avec l’histoire. Ils aiment déplacer des objets anachroniques dans d’autres époques : un dinosaure, un phonographe, un sabre laser en 1964, par exemple. Avec l’aide d’Ulysse, elle efface ces anomalies pour le bien de l’humanité. Alors que le jeune homme aimerait que la belle tombe amoureuse de lui, elle découvre lors d’une nouvelle mission, une anomalie particulière, sous la forme d’Ano, une jeune fille aux cheveux longs et bleus. Alors qu’elle n’arrive pas à l’éradiquer, elle s’enfuit avec elle. C’est la début d’un belle histoire d’amour entre les deux jeunes femmes. Pourtant, rien n’est simple, Teddy devrait l’effacer mais elle n’y arrive pas. Noël et Léon, deux agents spéciaux, se mettent en quête de les retrouver.
Le récit d’anticipation de Pierrick Colinet est d’une réelle efficacité. Si les failles temporelles sont souvent reprises dans les histoires de science-fiction, pour cet album, l’idée d’objets anachroniques est intéressante et bien amenée. Les dialogues percutants et les descriptions directement sur les planches (pour les objets ou les arborescences) sont autant d’accroches intelligentes. En choisissant le personnage de Teddy, le scénariste de Aeternum Vale (avec Elsa Charretier), aborde avec beaucoup de naturel, les amours lesbiennes. Simple dans son approche, cette très belle histoire d’amour, nous rappelle que cela est naturel. Militants hétérosexuels de la cause homosexuelle (Pierrick et Elsa sont un couple), ils livrent aussi un dossier sur quatre pages en fin d’album dont le thème est les personnages homosexuels dans les comics américains.
Le trait aérien et très moderne d’Elsa Charretier est d’une grande tendresse et sensualité. Elle n’a pas son pareil pour mettre en image les corps de ces deux femmes souvent enlacées. La dessinatrice française a bien intégré les codes des comics et livre des planches rythmées lorsqu’il y a aussi de l’action (Teddy à la recherche d’anomalies) ou lors des courses-poursuites entre les deux femmes et les agents à leurs trousses.
- The infinite loop, volume 1 : L’éveil
- Scénariste: Pierrick Colinet
- Dessinatrice : Elsa Charretier
- Editeur: Glénat Comics
- Prix: 14.95€
- Parution: 26 août 2015
Le temple du passé
Après un premier volume très réussi, Hubert et Etienne Le Roux reviennent avec le dernier tome du Temple du passé, l’adaptation d’un roman de science-fiction de Stefan Wul.
Résumé de l’éditeur :
De tout un équipage, ils ne sont plus que deux. Échoués sur une planète inhospitalière, Jolt et Massir découvrent que leur vaisseau a été happé lors de son crash par une monstrueuse créature marine. Généticien de génie, Jolt lance le pari fou de faire muter la bête pour la contraindre à émerger. Mais si l’expérience fonctionne, que trouveront les deux hommes sur la terre ferme ? Qui captera leur signal de détresse, et quand ?
En proposant une déclinaison dessinée des Univers de Stefan Wul, les éditions Ankama ont eu une riche idée. Pratiquement toutes sont réussies. L’adaptation en deux tomes du Temple du passé fait partie de cette catégorie. Il faut dire que Hubert a travaillé de façon admirable le roman pour en livrer une version accrocheuse et très intelligente. Il faut souligner que le scénariste, qui commence à compter dans l’univers du 9e art (Le legs de l’alchimiste avec Tanquerelle, Glénat ; La ligne droite avec Marie Caillou, Glénat ; Miss Pas touche avec les Kerascoët, Dargaud ou Ma vie posthume avec Zanzim, Glénat) mise sur une histoire accrocheuse, simple et efficace, ainsi que des personnages forts et complexes.
Alors que le vaisseau spatial dirigé par Massir avait été englouti par un monstre dans le premier volume, proposant un huis-clos très angoissant et étouffant ; le deuxième volume s’ouvre sur l’extinction de tous les membres de l’équipage sauf le commandant et Jolt, le tout jeune scientifique. Ce dernier s’emploie à faire sortir le monstre de l’eau afin de s’extraire de son estomac. Pour cela, il fabrique un excitant nerveux pour le faire bouger. Puis, il l’anesthésie, provoquant une rupture d’anévrisme. Quasi instantanément, il ne reste que le squelette et le vaisseau apparaît, mais en deux morceaux. Les deux hommes doivent donc imaginer un stratagème pour les rassembler. Au passage, Jolt découvre des œufs contenant de drôles d’animaux intelligents tout rouge, qui imitent leurs gestes et s’articulent comme une société de fourmis.
Du côté des deux héros, Massir, quinquagénaire viril et ténébreux, est toujours aussi bouleversé par la mort de sa femme. Jolt, quant à lui, se rapproche de son commandant, l’effleurant jusqu’à une pulsion physique, comme le veut d’ailleurs leur société calquée sur l’Antiquité grecque. Du côté du graphisme, Etienne Le Roux donne la pleine mesure de son talent. Revenant à ses premières amours (Amenophis IV, avec Dieter et Hubert, chez Delcourt), il propose des planches d’une belle lisibilité, composées de grandes cases. Son trait rétro et très soigné est idéal pour conter des histoires de science-fiction.
Le temple du passé : une série de science-fiction en deux tomes d’une grande qualité tant sur le plan scénaristique que sur celui du graphisme. A lire pour se dépayser et passer un agréable moment de lecture.
- Le temple du passé, tome 2/2 : Envol
- Scénariste : Hubert
- Dessinateur : Etienne Le Roux
- Editeur: Ankama, collection Les univers de Stefan Wul
- Prix: 14.90€
- Sortie: 21 août 2015
Charles de Gaulle
Les français aiment profondément Charles De Gaulle. Du Général, futur président de la république, souvent nous connaissons parfaitement son action dans la Résistance à partir de 1940, puis la Libération, sa première mission de gouvernement après 1945 et son arrivée au pouvoir en 1958. Mais peu connaissent son enfance et ses premiers pas dans l’armée. L’historien Jean-Yves Le Naour répare cet oubli en proposant le premier volet de cette fresque sur Charles de Gaulle (tome 1 : le prisonnier 1916-1921), aidé sur la partie graphique par Claude Plumail et édité par Grand Angle.
Résumé de l’éditeur :
Avant d’être le fondateur de la Résistance le 18 juin 1940 et le président de la République en 1958, le général de Gaulle a d’abord été un combattant de la Grande Guerre, un officier plein d’assurance et d’illusions. Fait prisonnier sur le champ de bataille de Verdun en 1916, le capitaine de Gaulle tente à cinq reprises de s’évader des forteresses allemandes.
Afin de comprendre encore mieux De Gaulle, Jean-Yves Le Naour a rédigé un cahier de 10 pages en fin d’album. Le lecteur découvre ainsi que l’homme qui a dit non à la capitulation avait déjà cette grande volonté de s’ériger contre l’ennemi. Ses valeurs pointent déjà dans sa tête et on le découvre inflexible et déterminé.
En 1916, il est envoyé par Philippe Pétain (à cette époque, héros français) sur le front pour diriger un petit bataillon. Le maréchal le sent, cet homme deviendra un grand militaire. Arrivé sur place, des bombardements allemands douchent déjà ses espoirs de victoire. Laissé pour mort, il n’est pourtant que blessé. Après sa convalescence, il est emprisonné dans un camp lituanien. Sa première pensée : s’évader ; et c’est le début d’une longue litanie de tentatives d’évasion. Passant d’une prison à l’autre, il n’aura toujours que cette idée en tête : en sortir, en vain. Avec l’aide de ses compagnons d’infortune, il élaborera des plans plus ou moins intelligents. Au delà du côté un peu amusant de ses sept échecs, le lecteur découvre un Charles méconnu.
Officier sans peur, héroïque, stoïque, très hautain et quasi aristocratique vis-à-vis de ses camarades (il ne se laissera jamais tutoyer), il impressionne par son intelligence et sa grande stature de deux mètres. Il ne perd jamais espoir et est plutôt très bien traité par ses geôliers. Ce grand égard, il le doit à son statut d’officier : pas de travail forcé, i mange mieux que les gardiens et peut recevoir des colis de sa famille. Avec ses compagnons, ils peuvent se permettre de choses qu’aucun prisonnier ne pourrait essayer. Pour occuper son temps en prison, ce grand lettré continuera de lire de la grande littérature, de la philosophie et perfectionnera même son allemand.
Le trait semi-réaliste de Claude Plumail est parfait pour conter cette fresque historique, malgré quelques postures un brin figées et des erreurs dans les mouvements de bras (tennis ou port du revolver). Il faut souligner que les deux auteurs ont déjà travaillé sur Les taxis de la Marne (Grand Angle) et que Jean-Yves Le Naour est spécialiste de la Première Guerre Mondiale.
- Charles de Gaulle, tome 1 : 1916-1921, Le prisonnier
- Scénariste : Jean-Yves Le Naour
- Dessinateur : Claude Plumail
- Editeur: Grand Angle
- Prix: 13.90€
- Sortie: 26 août 2015
Baby boom
Décédé en juin dernier, Jean Vautrin était un très grand romancier français. Réalisateur et scénariste, ses écrits furent aussi adaptés en bande dessinée et notamment le plus connu Le cri du peuple par Jacques Tardi, une fresque historique grandiose formidable chez Casterman. Après Bloody Mary (avec Jean Teulé, Glénat), Canicule (avec Baru, Casterman), ou encore Le pogo aux yeux rouges, déjà avec Eugénie Lavenant (Sarbacane), voici Baby Boom, Prix Goncourt de la nouvelle en 1986, mis en image par la même dessinatrice, aux éditions La Boîte à Bulles.
Résumé de l’éditeur :
Duncan et Tracy ne peuvent pas avoir d’enfant, malgré le désir viscéral de Tracy d’avoir une petite fille. Son thérapeute lui conseille de recourir aux « bébés-choux », des poupées de chiffon qui font office de substitut à l’enfant désiré… Mais, alors que son épouse s’investit entièrement dans cette grotesque parodie de maternité, Duncan cherche à tout prix à retrouver sa vie de couple et en particulier sa vie sexuelle.
Le nouvelle très noire de Jean Vautrin est étrange, angoissante, surprenante et intelligente; permettant de se poser des questions sur le couple, la maternité, l’envie d’avoir un enfant, sur la médecine, le confort, ou encore comment combler un manque. L’album est donc un vrai roman graphique, à savoir le texte illustré par des dessins d’Eugénie Lavenant. Le romancier propose au lecteur de se glisser dans la tête de ses personnages, perturbés, à la psychologie complexe, dans les méandres de leurs cerveaux tant bouleversés.
Etats-Unis. Porter un enfant, Tracy en a envie. D’ailleurs, elle en a un depuis six mois, ou plutôt le croit-elle. Cette grossesse, elle la vit comme n’importe qu’elle femme enceinte, pourtant il n’y a rien à l’intérieur de son ventre. Duncan, son compagnon n’en peut plus de ses caprices, ses envies soudaines ; il sombre dans une forme de dépression. Ils décident alors d’aller voir un psychologue afin de trouver une solution à ce mal être. Il leur propose d’adopter un bébé-chou, faux-bébé, sorte de poupée chiffon que la mère va choyer comme un vrai : l’accouchement, les vêtements, les couches, les repas ou la chambre à décorer. Ils peuvent même se permettre de choisir le poids, la taille, la couleur des yeux et le sexe. Le Jour J, ils se rendent donc dans la clinique spécialisée pour ce genre d’accouchement et arrive alors Benvenida, une jolie petite fille.
Eugénie Lavenant propose des illustrations froides, sans chaleur, pour restituer au mieux le thème sombre du récit de Jean Vautrin. Les grands aplats de couleurs (vert, orange, marron…) par ordinateur apporte aussi la distance face à l’histoire dérangeante, singulière et aux personnages fous.
- Baby boom
- Scénariste: Jean Vautrin
- Dessinatrice : Eugénie Lavenant
- Editeur: La Boîte à Bulles
- Prix: 19€
- Parution: 26 août 2015
Kid Eternity
Kid Eternity fut créé dans les années 60, remis au goût du jour par Grant Morrison et Duncan Fegredo en 1991 et publié par DC Comics. En cette fin août, les éditions Urban Comics proposent de nouveau cette histoire emblématique de cette époque.
Résumé de l’éditeur :
Humoriste en difficulté, Jerry Sullivan broie du noir. Il s’est déjà fait à l’idée de la mort, et va bientôt en apprendre bien plus sur elle qu’il ne l’aurait souhaité. Rescapé d’un terrible accident de voiture, Jerry va faire la connaissance d’un étrange personnage appelé Kid, récemment échappé des Enfers et en route pour une mission d’importance cosmique que lui aurait confié les forces du Paradis eux-mêmes. Mais pour mener à bien sa mission, Kid aura besoin de Jerry pour libérer quelques-unes des figures les plus emblématiques de l’Histoire. Contient: Kid Eternity TPB.
Tel Voldemort dont on ne doit prononcer le nom, Kid est arraché des Enfers lorsqu’il est appelé par les Terriens. Artiste raté, Jerry, se retrouve dans un casino et appelle par mégarde le jeune garçon, imité par les personnes autour de lui. Poursuivi par des Schichirirons, des êtres maléfiques, Kid parvient à échapper à son sort en prenant place dans l’esprit de Jerry. Les deux personnages doivent alors cohabiter et le jeune garçon manipule intellectuellement l’humoriste afin d’aller libérer Monsieur Gardien, son meilleur ami.
Le récit fantastique et d’horreur de Grant Morrison est nébuleux et tortueux. Difficile de suivre son histoire tant elle est riche, fait apparaître des flash backs dans tous les sens et met en parallèle le passé des deux protagonistes. Jerry et Kid sont alors intimement liés pour délivrer Monsieur Gardien. Il faut donc être bien concentré pour comprendre Kid Eternity. La seconde partie de l’album est plus fluide et plus simple à suivre.
Paru la première fois dans la revue Hit Comics #25, Kid Eternity est une création de Otto Binder et Sheldon Moldoff en décembre 1942. Publié par Quality Comics, il est repris de 1956 jusque dans les années 70 par DC Comics et ressuscité en 1991 par Grant Morrison. Le scénariste utilise les grandes lignes de ce super-héros (sa mort et le fait de revenir sur Terre) mais ajoute de nombreux éléments pour le faire évoluer. Caractéristique des albums publiés dans les années 90, l’histoire est des plus complexes et à l’esthétique ultra singulière. Il s’inscrit dans la même veine que Arkam Asylum, du même scénariste et Dave McKeane, sans en atteindre la même qualité et la même force. Duncan Fegredo parvient néanmoins à livrer des planches de très belle valeur. Son dessin laisse transparaître ses traits de construction pour accélérer le rythme de l’histoire par un trait vif et presque jeté. Le travail sur les couleurs est quant à lui très abouti et très beau.
- Kid Eternity
- Scénariste : Grant Morrison
- Dessinateur : Duncan Fegredo
- Editeur: Urban Comics, collection Vertigo Deluxe
- Prix: 15€
- Sortie: 21 août 2015
Freak Island
Les éditions Delcourt dévoilent le premier volume de Freak Island, un manga d’horreur signé Masaya Hokazono.
Résumé de l’éditeur :
Les six membres d’un club de fouilles s’approchent de l’île déserte de Kikuike pour visiter ses ruines. Alerté par ce qui lui semble être un naufragé, Higashiyama rejoint le rivage. Et se retrouve face à un homme à tête de cochon ! Tandis que ce dernier lui explose littéralement la cervelle à coups de marteau, le bateau des étudiants fait naufrage. Ils n’ont pas d’autre choix que de se réfugier sur l’île.
Freak island©Masaya Hokazono 2014/Take Shobo
C’est en 2013 que Masaya Hokazono débute la publication de Freak Island au Japon. Le récit du mangaka est construit comme un thriller trash et très gore où la violence, les humiliations et les morts se compte à la pelle. Dès la première page, le lecteur est plongé dans l’horreur lorsqu’il découvre une jeune femme emprisonnée par un piège à loup et qui se fait assassiner sauvagement par un homme au masque de cochon, habillé d’un beau costume. Cet être mystérieux, peu loquace est d’une stature immense, règne en maître sur une île déserte, non répertoriée. Au large, un sublime yacht est composé d’un équipage de jeunes étudiants qui appartiennent à un club de fouilleurs. Si la bonne humeur est perceptible à bord, rapidement certains pressentent un personne qui les observe.
Freak island©Masaya Hokazono 2014/Take Shobo
Higashiyama, dont le père est propriétaire du magnifique bateau, plonge pour rejoindre la plage parce qu’il pense que l’homme est un naufragé. Mais, l’homme à la tête de cochon ne l’accueille pas de la meilleure de manière : il le frappe à mort. Sur le navire, c’est la stupéfaction. Obligés d’accoster pour récupérer leur ami, les autres membres sont tétanisés. Takaku découvrant même des fûts contenant des matières nucléaires au fond de la mer.
Freak island©Masaya Hokazono 2014/Take Shobo
La tension est palpable rapidement, grâce à un univers sombre, angoissant et ultra-violent, mis en place par Masaya Hokazono. L’histoire vire rapidement au cauchemar cruel et sanglant. Pas de réseau téléphonique, une nuit effrayante et des zones d’ombre concernant l’homme-cochon ou son acolyte et c’est le début de la fin. L’humour n’est pas absent de ce manga par les personnages, leurs dialogues et leur passé. Il faut souligner que ce premier volume ne nous a pas enthousiasmé alors que le résumé était plutôt alléchant. Agréable à la lecture, il manque trop d’éléments pour se faire une véritable idée. Il faudra donc attendre la publication du deuxième volet. Ce seinen d’horreur ravira donc plutôt les amateurs du genre.
- Freak Island, volume 1
- Auteur: Masaya Hokazono
- Editeur: Delcourt, collection Seinen
- Prix: 7.99€
- Parution: 19 août 2015
Et pour quelques pages de plus…
Pour compléter notre sélection de la semaine, Case Départ vous conseille aussi les albums suivants :
Les Simpson déchaînés
La série culte de Matt Groening, Les Simpson fêtent leur vingt-cinq ans cette année et les éditions Jungle font paraître le vingt-huitième tome Les Simpson déchaînés, un album pour les amateurs de la famille déjantée de Springfield.
Résumé de l’éditeur :
D’ho ! Un nouvel album des Simpson ! Des histoires inédites où Homer, Bart et le reste de la famille la plus déjantée des Etats-Unis, se chamaillent et enchaînent les bêtises. Un succès à la télévision comme sur le papier qui permet, en 2015, de publier le 28e album en BD.
Pour cet album, différents auteurs ont imaginé les trois histoires inédites, issues de la série Les Simpson de Matt Groening :
- Heureux les geeks car ils héritent de la Terre (scénario Ian Boothby et dessin Erick Tran). Lisa est heureuse, la star du petit écran Hena est en ville pour une série de dédicaces. Emmenée par Homer, elle s’y rend néanmoins seule. C’est de la folie, un visiteur sosie d’un personnage de la série engendre un mouvement de foule.
– Itchy et Scratchy dans L’espion qui fondait (scénario Jesse Leon McCann & Robert Graft, dessin James Llyod). Krusty le clown lance de nouveaux produits de sa marque. Pour fêter l’événement, il a glissé 4 pailles en or dans ses bouteilles de coca. Les gagnants pourront visiter l’usine qui fabrique les objets. C’est Homer qui a avalé la permière des quatre… Une beau pastiche du film de Tim Burton, Charlie et la Chocolatrie.
- Le jour des casse-pieds (scénario Ian Boothby, dessin Julius Preite). La classe de Bart part visiter le laboratoire du Professeur Frink…
Cet album ravira les néophytes, les familles et les amateurs de la série télévisée, diffusée sur W9 (soirées spéciales le samedi, des audiences qui cartonnent et qui passent souvent le million de téléspectateurs). Histoires inédites, dans l’esprit de Matt Groening ne sont pas non plus très réjouissantes, car plutôt classiques. Efficaces, sans atteindre la folie de la série TV, elles sont portées par une partie graphique, inégales selon les auteurs. On préférera les dessins de James Llyod à ceux d’Erick Tran.
- Les Simpson, volume 28 : Les Simpson déchaînés
- Scénariste : Jesse Leon Mc Cann, Robert Graft et Ian Boothby, d’après Matt Groening
- Dessinateurs : Julius Preite, James Lloyd et Erick Tran
- Editeur: Jungle
- Prix: 10.45€
- Sortie: 26 août 2015