En quelques mots, pourriez-vous présenter le Collège latin, que vous dirigez ?
Le Collège latin est un établissement d’enseignement secondaire hors contrat accueillant des élèves de la sixième à la troisième. Il repose sur le principe du préceptorat en petit groupe : les élèves forment des classes d’une douzaine de membres confiées chacune à la direction d’un précepteur. Celui-ci entretient une relation privilégiée avec ses élèves et coordonne les différents professeurs.
Pourquoi avoir eu envie de fonder le Collège latin ?
Je ne parvenais pas, au sein des grandes classes des collèges classiques, à donner ce que je voulais donner à mes élèves, et surtout à leur donner ce dont ils avaient besoin. J’ai alors eu l’intuition d’un modèle éducatif fondé sur la tradition scolaire antique et médiévale, une tradition qui privilégiait la transmission de personne à personne plutôt que la formation de masse.
Concrètement, comment fonctionnez-vous ?
Les élèves ont dans chaque discipline des professeurs qui en incarnent les exigences propres. L’un d’eux, le précepteur, assume en parallèle un tout autre rôle, spécifique à notre modèle éducatif : il encadre le travail personnel des élèves (les devoirs sont faits à l’école), veille à leur formation humaine et culturelle, les reçoit régulièrement en entretien individuel… C’est une mission exaltante, qui suppose des personnalités polyvalentes, enthousiastes et exigeantes avec elles-mêmes.
Qu’apportez-vous de plus qu’un collège classique ?
Les collèges classiques conviennent à des élèves à l’aise dans le relatif anonymat des grands groupes et suffisamment autonomes pour se conduire eux-mêmes. Le Collège latin s’adresse à des élèves plus exigeants d’un point de vue affectif, désireux d’une relation pédagogique forte avec leurs professeurs ; des élèves qui ont besoin aussi, plus que d’autres, de la considération de leurs maîtres.
Comment favorisez-vous l’apprentissage de la lecture ?
Pour le moment, le Collège latin n’accueille les élèves qu’à partir de la sixième : la question de l’apprentissage de la lecture ne se pose donc pas. En revanche, il nous incombe souvent de former ou du moins de développer chez nos élèves l’habitude et le goût de la lecture. C’est pourquoi deux plages horaires y sont chaque jour consacrées : le matin, avant les cours, de 8 heures à 8h20 ; l’après-midi, après le déjeuner, de 13 heures à 13h20. Ce sont des moments de silence partagé que les élèves apprécient particulièrement. Le choix des lectures est guidé par le précepteur, en fonction d’objectifs pédagogiques mais aussi des facultés et des goûts de chacun. Aux uns, nouveaux lecteurs, seront conseillés de petits récits d’aventure dont ils viendront vite à bout (il importe de leur faire goûter la satisfaction d’avoir terminé un ouvrage) ; aux autres, des œuvres plus consistantes.
Quel est votre avis sur la réforme du collège ?
La réforme propose « un fonctionnement quotidien assoupli pour s’adapter à la diversité des besoins des élèves ». Ce n’est pas le fonctionnement des collèges qu’il faut adapter, c’est la teneur même des programmes, de manière à tenir compte des talents et des ambitions individuelles. La gangue qu’il faut briser est celle du « Collège unique », qui, en dépit de la réalité et du bon sens, paralyse les efforts. Fixer pour objectif prioritaire que tous les élèves de quatorze ans maîtrisent un même programme fait fi de la diversité des talents et, paradoxalement, manque d’ambition. Il faut accepter qu’à l’adolescence certains s’épanouissent dans l’étude quotidienne des mathématiques et des Belles Lettres, et que d’autres ne s’y épanouissent pas. Le Collège unique repose sur un sous-entendu d’une extrême violence, frustrateur et castrateur : celui selon lequel, si un élève ne s’épanouit pas dans l’étude des disciplines théoriques, c’est qu’il est un être inadapté.
Vous avez changé de locaux dernièrement, pourquoi ?
Nos nouveaux locaux, plus grands, plus lumineux, nous permettront d’accueillir davantage d’élèves et de mieux organiser les enseignements.
Prévoyiez-vous de futurs développements ? L’ouverture d’un deuxième établissement ?
Je souhaite aussitôt que possible ouvrir un lycée mais ma priorité est la consolidation du collège. Dans tous les cas, ce qui nous permettra d’aller de l’avant, c’est la collaboration de professeurs exceptionnels et engagés.